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08 septembre 2020

5 années de leadership climatique : bilan du premier Plan d'action du Groupe de la Banque mondiale sur le changement climatique

Esthelle Chapron est l'une des 3 000 volontaires formés qui évacuent les gens et sauvent des vies lorsque des catastrophes naturelles frappent Haïti. Photo prise à Solino, Port-au-Prince. © Vincent Theodore/Banque mondiale 

Action climatique : un accélérateur du changement

En 2016, un ouragan de catégorie 4 balayait l'un des pays les plus pauvres du monde, déjà dévasté par un tremblement de terre quelques années auparavant et fragilisé par des décennies de tourmentes politiques. L’ouragan Matthew a frappé plus de deux millions d’habitants en Haïti, faisant plus de 500 morts et 175 000 sans-abri.

« Ces dernières années, nous avons observé que de tels événements devenaient plus fréquents et plus puissants, du fait du changement climatique », témoigne Jerry Chandler, le chirurgien et spécialiste de la médecine de catastrophe qui est à la tête de la direction de la Protection civile, l'organisme national chargé de la gestion des risques.

En août 2020, c'est la tempête tropicale Laura qui s'est abattue sur Haïti et sa voisine, la République dominicaine, causant de nouvelles victimes et mobilisant des brigades de bénévoles.

Selon Jerry Chandler, Haïti s’emploie à renforcer ses systèmes d'intervention en cas de catastrophe et de réduction des risques, même s'il faudrait encore des moyens supplémentaires. Des projets ont été lancés pour améliorer la qualité des données météorologiques et mettre en place un système national d'alerte précoce, tandis qu’une vaste campagne de communication sensibilise la population aux procédures d'urgence.

« Il faut que les gens sachent exactement à quoi s'attendre pour pouvoir adapter leur mode de vie », explique M. Chandler.

La conjonction de la pandémie de coronavirus et du changement climatique pose des défis de développement sans précédent

À l’instar d’Haïti, les pays du monde entier sont confrontés à des risques climatiques de plus en plus élevés, dans un contexte en outre marqué aujourd’hui par la lutte contre le coronavirus (COVID-19).

La pandémie a déjà provoqué une grave crise sanitaire mondiale et pourrait plonger jusqu'à 100 millions de personnes dans l'extrême pauvreté (a). Le Groupe de la Banque mondiale a activé un mécanisme d'aide d'urgence en faveur de 100 pays en développement et prévoit de déployer 160 millions de dollars de financements jusqu’en 2021.

Parallèlement, le Groupe reste déterminé à lutter contre le changement climatique, une autre menace majeure pour les plus pauvres et les plus vulnérables de la planète notamment.

Dans le sillage de l’adoption de l'accord de Paris sur le climat, le Groupe de la Banque mondiale a présenté en 2016 un ambitieux Plan d'action sur le changement climatique (a) afin d'intensifier le soutien financier et technique aux pays en développement et, ainsi, renforcer leur action pour le climat.

L'institution internationale, qui s'était engagée à porter ses financements climatiques à hauteur de 28 % de ses prêts d'ici 2020, contre 20 % en 2016, a systématiquement dépassé cet objectif au cours de ces trois dernières années (a). Au total, et sur la durée du plan d'action,

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« Ce qui motive l'action climatique dans les pays, et en grande part aussi au sein de la Banque mondiale, c'est la prise de conscience des avantages économiques et sociaux associés à des mesures prises dès maintenant, plutôt que de les remettre à demain », souligne John Roome, directeur Développement durable de la Banque mondiale pour l'Asie du Sud.

Voici cinq premiers enseignements tirés du Plan d'action qui sont au cœur de nos efforts visant à aider nos clients à lutter contre le changement climatique, tout en favorisant un relèvement durable après la pandémie.

1. Intégrer le changement climatique dans nos projets et stratégies

Conformément au Plan d'action, Les enjeux du changement climatique sont pris en compte à chaque étape de la conception des projets et désormais intégrés dans la totalité des stratégies de développement pluriannuelles élaborées par la Banque en partenariat avec les pays en développement.

« Cette démarche d’intégration généralisée de l’enjeu climatique dans toutes nos activités est vraiment ce qui change tout », explique Stéphane Hallegatte, économiste principal du groupe Changement climatique à la Banque mondiale. « Elle permet d’envisager systématiquement le développement sous l’angle du climat et aide nos clients à exploiter les possibilités d'un développement à faible émission de carbone et résilient. »

Concrètement, , qu’il s’agisse de renforcer le développement numérique et la résilience climatique (a) au Bangladesh, d’intégrer le changement climatique dans la préparation du budget (a) et la planification macroéconomique aux Philippines ou encore d’améliorer l'efficacité des réseaux d'eau et d'électricité (a) alimentant le système de santé en Égypte.

2. Restaurer les paysages et améliorer les modes d'utilisation des terres

Alors que quatre milliards d’habitants dans le monde vivent dans des régions souvent en situation de stress hydrique, le Groupe de la Banque mondiale considère que

« Nous ne pouvons que constater que les systèmes alimentaires en Afrique sont globalement menacés », indique Simeon Ehui, directeur Développement durable de la Banque mondiale pour l'Afrique de l'Ouest et centrale. « Nous parlons là de 277 millions de personnes qui souffrent de sous-alimentation en Afrique et le changement climatique en est l'une des raisons principales. Nous devons être capables d'agir pour changer les choses. »

Une part croissante des projets agricoles sont « climato-intelligents » : ils permettent d'accroître la productivité et la résilience tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Par ailleurs, des solutions ont été déployées à grande échelle et bénéficient à des millions de personnes. Ainsi à Maharashtra (a),

, affirme Ayat Soliman, directrice Développement durable de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, une région où des projets font revivre les oasis, améliorent les moyens de subsistance et renforcent la résilience aux sécheresses et aux inondations.

« La qualité du processus de redressement est extrêmement importante pour ne pas aggraver l'exclusion ou exacerber les risques pour certains groupes déjà durement touchés. »

3. Protéger les personnes vulnérables contre les chocs climatiques

« Il est évident que les bouleversements dus à la pandémie soulignent toute l'importance de se protéger contre des risques environnementaux qui ont des conséquences graves et systématiques sur toute l'économie. Ils nous donnent l'occasion de reconsidérer ce qui est le plus essentiel pour la qualité de vie », affirme Benoît Bosquet, directeur Développement durable de la Banque mondiale pour l'Asie de l'Est et le Pacifique.

Grâce à son Plan d'action, le Groupe de la Banque mondiale a aidé des pays à réduire les risques de catastrophe en combinant des mesures qui renforcent à la fois la résilience des populations, des infrastructures et des économies. De telles mesures sont primordiales compte tenu de l'intensification des aléas climatiques et sont susceptibles de limiter considérablement les pertes en vies humaines. Une meilleure préparation en Inde et au Bangladesh, par exemple, a permis de mettre des millions de personnes à l'abri (a) avant l'arrivée du puissant cyclone Amphan sur leurs côtes, au mois de mai dernier.

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Grâce à des interventions de politique publique essentielles, le Bangladesh est parvenu à réduire le nombre de victimes des catastrophes climatiques.

Dans les îles du Pacifique, le CAT-DDO, un nouvel instrument prévoyant une option de tirage différé en cas de catastrophe (a), a permis à Tuvalu (a) et Vanuatu (a) d’avoir rapidement accès à des fonds d'urgence après avoir été frappés par des cyclones il y a quelques mois.

« Il s’avère que beaucoup des systèmes que nous avons mis en place pour faire face, le plus souvent, à des événements climatiques correspondent à des mécanismes de réponse d'urgence similaires à ceux qui ont été très utiles aux gouvernements pour s'organiser et répondre à la pandémie », explique Anna Wellenstein, directrice Développement durable de la Banque mondiale pour l'Amérique latine et les Caraïbes.

Ces systèmes prévoient une « protection sociale adaptative », c'est-à-dire des filets de sécurité qui peuvent être activés rapidement en cas de choc majeur tel qu'un cyclone ou une sécheresse. Au Mozambique, par exemple, un dispositif existant a été étendu à 115 000 ménages supplémentaires (a) touchés par les cyclones Idai et Kenneth en 2019.

« Dans le monde entier, la Banque mondiale s'emploie à aider les pays à faible revenu à mettre en place des filets sociaux et à les rendre plus réactifs aux chocs, afin qu'ils soient mieux préparés à faire face aux crises », explique Michal Rutkowski, directeur mondial du pôle Protection sociale et emplois à la Banque mondiale. « De tels systèmes peuvent être élargis en période de crise et adaptés pour répondre à de nouveaux besoins. » 

Ainsi, pendant la pandémie, les pays dotés de solides systèmes de protection sociale ont pu intensifier plus rapidement et plus efficacement l'aide aux populations touchées (a).

 

4. Faciliter la transition énergétique bas carbone tout en élargissant l’accès à l’énergie

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Dans l'un des villages les plus reculés de l'Inde, Sarita Asur pratique une agriculture de subsistance. Elle se souvient du jour où elle a pu allumer la lumière pour la première fois (a) : « C'était un grand jour, cela a changé la vie de ma famille. » Grâce à l'aide d'une petite entreprise soutenue par IFC, l'institution du Groupe de la Banque mondiale dédiée au secteur privé, son logement est maintenant équipé de trois ampoules à LED alimentées par un réseau électrique de 8 kilowatts.

Le Groupe a donné la priorité aux investissements dans les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique, des leviers essentiels pour aider ses clients à réduire leurs émissions. Il a soutenu certains des plus grands projets solaires au monde, notamment en s’associant aux Fonds d’investissement climatiques (a) pour accompagner la construction de la centrale solaire concentrée de Noor, au Maroc, l'une des rares au monde à utiliser cette technologie d'avant-garde pour stocker l'énergie solaire. Le Groupe a également contribué à la construction du parc solaire de Benban (a), en Égypte, ainsi que de la mégacentrale solaire de Rewa (a), en Inde, qui fournit une grande part de l'électricité nécessaire au métro de Delhi, à près de 800 kilomètres de distance.

« Il est primordial de commencer à considérer l’enjeu climatique comme une chance », explique Alzbeta Klein, directrice d'IFC pour les opérations climatiques. « Les données et travaux passés démontrent que de nombreuses technologies renouvelables créent un bon nombre d'emplois. La relance après la pandémie est l'occasion pour les pays de soutenir les emplois devant être créés dans les filières d'avenir à faible intensité de carbone. »

, selon Riccardo Puliti, directeur principal des infrastructures en Afrique subsaharienne à la Banque mondiale.

Le programme Lighting Global (a) a permis de créer un marché international de l'énergie hors réseau finançant aujourd'hui une industrie qui pèse un milliard de dollars par an et qui fournit de l'électricité à plus de 150 millions de personnes.

« Nous avons pour but de doubler l'accès à l'énergie en Afrique d'ici à la fin de la prochaine décennie, de manière à ce que le continent s'impose comme un leader mondial de la lutte contre le changement climatique. Ces quatre dernières années, nos projets ont permis de mettre en service environ 1 000 MW supplémentaires d'électricité verte et respectueuse du climat, grâce aux énergies géothermique, solaire et hydroélectrique, et ce n'est pas fini », souligne Thomas O'Brien, conseiller principal dans le cadre du Business Plan pour le climat en Afrique de la Banque mondiale.

5. Évoluer vers des transports à faible émission de carbone

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Le Bangladesh a élaboré une stratégie et un plan d'action bas carbone pour son secteur du transport fluvial, avec l'aide du mécanisme mis en place par la Banque mondiale en soutien à la mise en œuvre des engagements climatiques nationaux.

Le transport étant responsable d'un quart des émissions de gaz à effet de serre liées à l'énergie dans le monde, la Banque aide ses clients à investir dans les systèmes de transport public, en transférant le fret de la route vers le rail et, si possible, vers les voies navigables qui génèrent les plus faibles émissions par tonne-kilomètre.

Comme le souligne Guangzhe Chen, directeur des infrastructures pour l'Asie du Sud, la Banque soutient la création d'un corridor ferroviaire dédié au transport de marchandises entre les mégapoles indiennes de Delhi et de Kolkata, et cherche aussi à développer les voies navigables intérieures pour le transport de fret et de personnes à travers le Bangladesh, l'Inde et le Népal.

, explique Franz R. Drees-Gross, directeur régional des infrastructures à la Banque mondiale.

Selon son homologue pour l'Europe et Asie centrale, Lucio Monari, cette région à forte intensité énergétique s'attache à transférer le transport de fret de la route vers le rail, à rendre les bâtiments publics et privés plus économes en énergie et à accroître la part des énergies renouvelables, tout en réduisant la consommation de charbon.

Et alors que les pays s'engagent en faveur d'énergies et de transports plus propres, il serait utile qu'ils réfléchissent à la manière d'assurer une transition équitable pour les communautés dépendantes des combustibles fossiles. « Pour que cette transition soit réussie, nous devrons trouver des solutions pour en atténuer l'impact sur les personnes qui travaillent dans l'économie du charbon », déclare Ranjit Lamech, directeur des infrastructures pour la Région Asie de l'Est et Pacifique de la Banque mondiale.

Des politiques de ce type peuvent en outre compléter les instruments sur le prix du carbone, sachant qu'en 2020, 61 pays à travers le monde ont déjà ou prévoient de mettre en place des systèmes de tarification du carbone.

 

Plan d'action sur le changement climatique 2.0

Le bilan du premier Plan d'action montre à quel point le Groupe de la Banque mondiale est en pointe de l'action climatique. Et demain, notre prochain plan pour la période 2020-2025, déjà lancé, entend amplifier le soutien aux pays pour qu'ils prennent des mesures ambitieuses en matière de climat, en augmentant les financements en faveur de l'adaptation et en encourageant une action systémique renforcée à l'échelon des pays.

La mise en œuvre de ce plan, à l’heure où les pays sont aussi aux prises avec les répercussions économiques de la pandémie de COVID-19, implique de préparer des interventions susceptibles de réaliser des objectifs à court terme, tels que l'emploi et la croissance économique, ainsi que des objectifs à plus long terme, comme la décarbonisation et le renforcement de l'adaptation et de la résilience, afin d'aider nos clients à mettre en place une reprise durable.

En tirant parti de notre expertise technique, de notre savoir-faire opérationnel et de nos ressources financières — et en particulier de la mise en œuvre réussie de notre précédent plan d'action — nous serons en mesure d'intensifier nos activités. Il s'agira par exemple d'aller au-delà des domaines traditionnellement liés au climat et de C'est ainsi que nous pourrons apporter à nos clients les changements systémiques essentiels qui doivent s’opérer à l'échelle de l’ensemble de l'économie et contribuer à définir dès aujourd'hui des voies de développement susceptibles de déboucher sur des systèmes décarbonés et résilients, pour les décennies à venir.

« Pour ceux d'entre nous qui travaillons dans le développement depuis des années, il est clair que le changement climatique pourrait anéantir les progrès les plus durement gagnés », indique Bernice Van Bronkhorst, directrice mondiale de la Banque mondiale pour le Changement climatique. « Nous sommes à un moment charnière : nous pouvons aider nos clients à agir sur le climat et, ce faisant, à bénéficier d'un air et d'une eau plus propres, d'océans plus sains, de villes plus résilientes et de systèmes alimentaires et agricoles plus durables. Nous sommes déterminés à faire ce qu'il faut pour cela. »