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ARTICLE 22 avril 2020

Journée mondiale de la Terre : y aura-t-il un avant et un après COVID-19 pour la pollution due aux transports ?

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Chapman Chow/Unsplash


LES POINTS MARQUANTS

  • Aujourd’hui, le secteur des transports représente un quart des émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à l’énergie, un chiffre qui pourrait atteindre 33 % si nous n’agissons pas.
  • Les émissions de GES provenant des transports pourraient augmenter après la pandémie de COVID-19.
  • En investissant dans les transports à faible intensité de carbone, les pays peuvent suivre une voie différente et favoriser une reprise plus durable et plus inclusive.

Aujourd’hui, le secteur des transports représente un quart des émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à l’énergie, un chiffre qui pourrait atteindre 33 % si nous n’agissons pas.

L’ampleur du problème est plus que jamais manifeste aujourd’hui, à l’heure où le coup de frein porté aux transports urbains par la pandémie de COVID-19 a eu pour effet immédiat d’améliorer la qualité de l’air dans de nombreuses villes. La pollution, mais aussi les émissions de GES ont considérablement diminué dans le sillage de l’épidémie : les préoccupations sanitaires et la généralisation des restrictions de déplacement ont fait reculer la demande de mobilité partout dans le monde. Les embouteillages semblent soudain n’être plus qu’un lointain souvenir, les compagnies de transport maritime annulent des centaines de traversées et les pistes de certains des plus grands aéroports du monde ne sont plus utilisées que pour stationner des avions cloués au sol.

La crainte d’un redémarrage plus carboné

Cette tendance risque cependant d’être de courte durée. Le virus finira par refluer, et les pouvoirs publics, les entreprises et les populations se hâteront de rattraper le temps perdu et de réduire au maximum l’incidence de la pandémie sur l’économie. Si l’on en croit les précédentes crises mondiales, on observerait alors une hausse nette des émissions, y compris dans le secteur des transports. Après la récession de 2008-2009, les émissions de carbone ont bondi de 6 % (a) en un an, en partie parce que les nombreux programmes d’investissement mis en place pour relancer l’économie ont misé sur des industries à forte intensité de carbone.

« Compte tenu de l’urgence économique et de la faiblesse des cours du pétrole, il apparaît de plus en plus nettement que les émissions du secteur des transports grimperont en flèche une fois la crise passée. Cependant, les États pourraient tirer profit de la relance post-pandémie pour déployer des solutions de transport plus propres, plus durables et déjà disponibles », explique Makhtar Diop, vice-président de la Banque mondiale pour les Infrastructures. « Favoriser le développement de transports sobres en carbone ne profitera pas seulement au climat : cela permettra aussi de soutenir la croissance économique à long terme, de créer des emplois de qualité et de relier un plus grand nombre de personnes aux opportunités. »

La Banque mondiale œuvre déjà à cette transition. Au terme de l’exercice 2019, 52 % de ses projets dans le secteur des transports avaient contribué à l’atténuation des émissions et à l’adaptation aux dérèglements climatiques. « Face à la pandémie actuelle, nous avons renforcé l’accent mis sur les transports climato-intelligents, qui pourraient constituer un puissant vecteur de relance économique », explique Guangzhe Chen, directeur mondial de la Banque mondiale pour les Transports. « Alors que la crise aggrave les pressions budgétaires sur les gouvernements du monde entier, l’enjeu de la viabilité financière devient un élément encore plus important dans notre appui aux pays. La mobilisation de financements privés pourrait faire partie de la solution. »

Des modes de transport plus propres

Dans les pays en développement, beaucoup de citadins passent des heures coincés dans les embouteillages, à bord de leur voiture ou dans de vieux bus au diesel, ce qui nuit considérablement au climat, à la productivité et à la santé publique.

Les équipes de la Banque mondiale proposent aux États les financements et l’expertise nécessaires pour développer de meilleures solutions adaptées aux contextes locaux : la mise en œuvre de systèmes modernes de gestion du trafic, l’amélioration de la conception des espaces publics pour promouvoir le vélo et la marche, ou, plus important encore, l’investissement dans des systèmes de transport en commun fiables (métro, tramway, liaisons rapides par autobus…). Soit autant de solutions qui facilitent la mobilité urbaine, tout en réduisant l’empreinte carbone des transports urbains.

C’est l’approche retenue par la ville de Quito, la capitale de l’Équateur, où la Banque mondiale cofinance la toute première ligne de métro du pays (a) : quand il sera pleinement en service, le nouveau métro permettra de diminuer le volume annuel des émissions de GES d’environ 65 000 tonnes et de rapprocher près de 400 000 voyageurs par jour des zones d’activité, des écoles et des services essentiels.



Toutefois, avec la pandémie de coronavirus, les réseaux de transport public sont particulièrement mis à mal. Le nombre d’usagers est en chute libre, et certains opérateurs ont dû suspendre la vente de tickets afin de limiter les interactions entre le personnel et les voyageurs. Les compagnies de transport en commun, déjà sous-financées, voient leurs recettes s’effondrer. Même au sortir du confinement, les populations pourraient préférer la voiture individuelle aux transports publics pour des motifs sanitaires. Ces prochaines années, il sera donc vital de prolonger notre appui au secteur des transports en commun, notamment pour le préparer aux crises futures.

Autre priorité : le transport de marchandises. En Afrique, en Inde ou en Amérique latine, les poids lourds représentent à eux seuls environ 40 % des émissions du secteur des transports. L’Inde, avec le soutien de la Banque mondiale, est en train de convertir un tronçon de 1 360 kilomètres sur le Gange en une voie navigable moderne (a) pour convoyer à terme 65 millions de tonnes de marchandises par an, ce qui aboutira selon les estimations à 162 000 tonnes de GES en moins chaque année.

La technologie à la rescousse

Toutefois, le recours à ces modes de transport a ses limites. D’ici 2050, le nombre de voitures en circulation devrait doubler et la part des camions dans le transport du fret ressortira toujours à 60 % environ. Les objectifs climatiques mondiaux ne seront donc atteints que si nous réduisons considérablement les émissions des véhicules routiers.

L’une des solutions possibles serait l’adoption de véhicules modernes et efficaces, consommant jusqu’à 50 % de carburant en moins. Au Caire, un programme soutenu par la Banque mondiale visant à renouveler la flotte de taxis vieillissante de la ville (a) a réduit les émissions de GES de 350 000 tonnes entre 2012 et 2018. Pour que cette tendance se poursuive, la communauté mondiale doit soutenir l’application de normes d’émission raisonnables et la réduction des ventes aux pays en développement de véhicules usagés obsolètes, polluants et dangereux en provenance de pays développés.

Les véhicules électriques pourraient également changer la donne, s’ils sont alimentés par des sources d’énergie propres. Le marché est en plein essor : globalement, l’objectif des États à travers le monde est de porter le nombre de ces véhicules de 3 à 30 millions dans les cinq prochaines années. Des travaux sont en cours pour comprendre dans quelle mesure la mobilité électrique peut contribuer à la décarbonation des transports. Une étude récente de la Banque mondiale (a) consacrée à plusieurs pays en développement a ainsi mis en évidence les bénéfices environnementaux et sociaux de solutions de mobilité électrique adaptées au contexte local. Ce rapport énonce des principes généraux visant à consolider le marché des véhicules électriques à tous les niveaux de revenus.

La mobilité électrique n’est cependant que l’une des nombreuses technologies disruptives qui réinventent actuellement les transports. Les solutions numériques transforment rapidement nos modes de déplacement : la consultation d’informations trafic en temps réel rend les transports en commun plus attractifs ; les applications pour smartphones facilitent le déploiement du covoiturage et du vélo en libre-service ; et les plateformes en ligne ne cessent d’innover pour faire concorder l’offre et la demande de services de transport. Ces solutions sont synonymes d’efficacité accrue et, in fine, de réduction potentielle des émissions.

Transformations du marché

Alors qu’une grande partie du monde est au point mort, les contacts virtuels remplacent les mouvements physiques, les consommateurs parviennent à acheter des biens et des services autrement, le télétravail séduit de plus en plus d’employeurs et les entreprises réfléchissent à des chaînes d’approvisionnement plus courtes.

L’avenir nous dira si la situation actuelle entraînera une transformation pérenne du marché mondial des transports. Dans l’affirmative, l’incidence sur les émissions pourrait être significative — et infiniment plus importante que la baisse temporaire provoquée par le coronavirus.



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