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Marchés publics : risques et récompenses pour les PME du monde arabe

20 mai 2015


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Arne Hoel l World Bank

LES POINTS MARQUANTS
  • La région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord compte d’importants marchés publics, mais pour les petites et moyennes entreprises (PME), les obstacles sont nombreux si elles veulent répondre à des appels d’offres et honorer des contrats publics.
  • La Banque mondiale travaille avec des partenaires régionaux pour que les PME soient dotées des instruments nécessaires à leur compétitivité sur les marchés publics.
  • Les pouvoirs publics, les institutions de formation et le secteur privé de huit pays organisent des formations pour voir émerger des fournisseurs publics fiables et stimuler leur économie.

Pour beaucoup de PME, l’obtention d’un contrat public permet de stabiliser l’activité et d’être vecteur de croissance.

Cette perspective est d’ordinaire réjouissante.

Cependant, Shirzad a vite déchanté devant la longueur des délais de paiement. Cet entrepreneur travaille au nord de l’Iraq, au sein du Gouvernement régional du Kurdistan, où le budget de l’État est déjà fortement mis à contribution pour gérer l’afflux de réfugiés, du fait des troubles récents.

Cette situation a compliqué la tâche de l’administration régionale qui peine à régler ses fournisseurs à temps.

Une entreprise de plus grande taille aurait pu absorber ces retards de paiement, mais pas Shirzad, tenu de verser les salaires et ne disposant guère d’autres sources de revenus. Son entreprise n’a pas la trésorerie d’une grande entreprise qui lui permettrait de couvrir la masse salariale.

C’est le type même de situation qui peut conduire à une faillite, et l’une des raisons pour lesquelles les PME ne peuvent se permettre de répondre à des appels d’offres publics.

Il existe d’autres obstacles tout aussi décourageants pour les acteurs de petite taille.

Certaines administrations de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) exigent, par exemple, des soumissionnaires des acomptes considérables pour les contrats publics, décourageant de fait les entreprises comme celle de Shirzad.

D’autres administrations ont instauré des critères très stricts sur le profil des soumissionnaires, ce qui restreint l’accès au processus des petites entreprises. Par ailleurs, les PME connaissent souvent moins bien les sources d’informations donnant accès à ces opportunités.

Voilà pourquoi, même lorsqu’il existe des lois officielles qui encouragent les PME à soumissionner, celles-ci se retrouvent nettement désavantagées.

Certains obstacles sont cependant inhérents à ces petites entreprises.

Privées de toute expérience dans le domaine de la commande publique, à la différence de grandes entreprises au riche carnet d’adresses, les PME ne savent souvent pas formuler une proposition pour emporter le marché ou déterminer un prix compétitif. La plupart ignorent où trouver les informations portant sur les lois et les procédures régissant le processus. Parfois, il arrive qu’elles ne connaissent pas leurs droits, ou leur devoir d’intégrité, dans le cadre d’un contrat passé avec le gouvernement.



« Les petites et moyennes entreprises ne se rendent souvent pas compte du potentiel offert par les marchés publics.  »


Selon Yolanda Tayler, responsable du département gouvernance au sein de la Banque mondiale, « même si les PME représentent 80 à 90 % des entreprises du secteur formel dans la région MENA, elles ne se rendent souvent pas compte du potentiel offert par les marchés publics. En Iraq, par exemple, plus de 51 milliards de dollars sont consacrés aux marchés publics. Pourtant, les entreprises de plus petite taille ne profitent pas de la part qui leur revient légitimement ».

Pour remédier à ces carences, la Banque mondiale travaille avec des États, des institutions de formation et le secteur privé dans huit pays de la région MENA, afin de toucher les PME et de les sensibiliser à des instruments et à des méthodes qui leur serviront à se positionner sur les marchés publics. Au total, plus de 70 formations se seront déroulées d’ici à fin juin 2015, dans le cadre d’un programme régional historique, financé par un mécanisme de l’Initiative du monde arabe dédié aux micro-entreprises et PME.

Au sein du Gouvernement régional du Kurdistan, la Kurdistan Contractors Union a collaboré avec le ministre du Plan pour organiser 10 ateliers dans quatre villes, ciblant 250 PME.

En Égypte, l’Autorité générale pour les services du gouvernement s’est associé à un institut de formation pour la réalisation de 18 ateliers dans 16 villes du pays, dont l’envergure et le champ action remarquables favoriseront le partage d’informations et de connaissances avec les nouveaux fournisseurs, aux quatre coins du pays.

Au Liban, l’Institut des Finances, en partenariat avec une école de commerce privée, a mis au point un programme impressionnant, dont le lancement en mars a été relayé par dix quotidiens locaux et quatre chaînes de télévision. Ce projet prévoit également d’évaluer les résultats obtenus, en mesurant le degré de réussite des entreprises participantes dans l’obtention de marchés publics.

À Djibouti, la Chambre de Commerce a coordonné ses efforts avec la Commission nationale de la commande publique pour l’organisation de six ateliers.

Dans les territoires palestiniens, le Haut Conseil des politiques de la commande publique a choisi de s’associer avec l’Université de Ber Zeit pour l’organisation de douze séances destinées aux entreprises locales.

En privilégiant une approche qui cible les marchés, ces pays espèrent favoriser l’émergence de nouveaux fournisseurs publics fiables qui stimuleront réellement l’économie. À ce jour, le programme a formé plus de 700 petites entreprises dans 21 villes et dans 7 pays.

Ces initiatives font plus qu’offrir de nouvelles opportunités à des entrepreneurs comme Shirzad. Elles permettent avant tout au secteur public d’améliorer son image et de renforcer ses liens avec le secteur privé, afin de mieux employer l’argent du contribuable et de contribuer à la croissance de l’emploi.


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