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Iraq : renforcer les capacités de gestion des fonds publics

21 avril 2015


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Tour Mamoun à Bagdad.


LES POINTS MARQUANTS
  • La gestion de l’investissement public en Iraq implique de former les fonctionnaires aux appels d’offre.
  • La Banque mondiale et les autorités iraquiennes ont lancé, avec les universités publiques du pays, un programme novateur pour constituer un corps de professionnels des marchés publics.
  • En misant sur les fonctionnaires de demain, ce programme devrait avoir un impact profond et durable.

Avec ses réserves de pétrole — les troisièmes du monde — l’Iraq a les moyens d’investir dans ses infrastructures, malgré le conflit et malgré les aléas des cours internationaux du pétrole. En 2014, le pays aura passé pour plus de 51 milliards de dollars de marchés publics, soit plus de 20 % de son PIB. Mais pour s’assurer que cette manne contribue au développement de l’économie nationale, il faut disposer d’un système efficace de gestion des appels d’offre.

Plongé depuis des décennies dans un cycle déstabilisant de sanctions, de guerre et d’instabilité, le pays doit faire avec un système de passation des marchés publics inopérant, corrompu et peu réactif. Une situation qui freine les dépenses budgétaires lesquelles, selon le rapport 2014 de la Banque mondiale sur la gestion de l’investissement public (a), ne représentent en général que 50 à 60 % des capacités.

Une autre évaluation (a), réalisée en 2012, mettait en évidence l’ampleur de la corruption dans les marchés publics, un phénomène qui dissuade les investisseurs de faire des affaires en Iraq et obère donc les possibilités d’augmenter les investissements étrangers. Autrement dit, l’obsolescence du système iraquien de passation de marchés, conjuguée à des problèmes de capacités d’absorption depuis le conflit, renchérissent considérablement le coût de l’investissement public tout en réduisant sa rentabilité.

L’équipe de la Banque mondiale en charge des marchés publics pour la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) épaule les autorités du pays pour remédier à cette situation. La stratégie régionale de la Banque mondiale dans ce domaine prône un renforcement des capacités qui aille au-delà de formations ponctuelles de court terme pour privilégier des programmes complets au service de solutions plus durables. Dans le cas de l’Iraq, la Banque mondiale entend aider le pays à constituer une nouvelle génération de fonctionnaires capables de gérer avec efficacité et en toute intégrité les marchés publics du pays.

Grâce à un don du Fonds fiduciaire pour l’Iraq (a), la direction des marchés publics (PCD) au sein du ministère iraquien du Plan a noué des partenariats stratégiques avec six universités publiques dans différentes régions du pays. L’idée est de constituer un vivier de fonctionnaires sachant appliquer les principes de l’économie, de l’efficacité et de la concurrence au processus de passation de marchés publics.

La portée géographique du programme et l’approche multidisciplinaire suivie contribuent à sa diversité qui reflète, de ce fait, les multiples facettes des processus publics d’appels d’offre. Pour concevoir des programmes de formation adaptés et couvrant tout le spectre académique, la PCD s’est adjoint l’aide de facultés de droit, d’ingénierie, d’administration publique et de commerce.

Mais il fallait s’assurer auparavant que les universitaires iraquiens censés assurer cette nouvelle formation avaient accès à des contenus pertinents. C’est la raison pour laquelle les autorités iraquiennes ont sollicité l’aide de la Banque mondiale, ce qui a permis à la PCD de signer un partenariat avec l’université Paris-Ouest Nanterre La Défense, en France.

En octobre 2014, un groupe de 18 enseignants et administrateurs iraquiens de l’université de Bagdad Salah Aldeen et des universités techniques de Sulaimaniya, Kufa et Basrah ont participé à une formation diplômante intensive de deux semaines, à Nanterre. « Les étudiants iraquiens sont l’avenir de notre pays », a déclaré l’ambassadeur d’Iraq en France, Fareed Yasseen, à propos de ce partenariat. « Nous devons multiplier les formations de ce type pour impartir à nos étudiants les compétences modernes nécessaires pour réussir dans une carrière publique et au-delà. »

Certains universités iraquiennes ont déjà adapté leurs programmes et intégré les marchés publics dans leurs cursus. C’est ce qu’a fait notamment Angham Ezzulddin Ali Alsaffar, professeur de génie civil à l’université de Bagdad, qui a apprécié l’utilité de cette formation pour elle comme pour ses étudiants. Ahmed Saydok, directeur de la formation continue à l’université Salahaddin d’Erbil, est à l’origine du lancement de nouvelles universités d’été. « Les étudiants sont comme un bloc d’argile brute. À nous de les façonner », explique-t-il.

Ce programme n’est pas né de rien : il est le fruit d’un engagement durable avec la Banque mondiale, qui s’est efforcée de trouver des solutions adaptées au contexte du pays. Dès le début des discussions, les autorités ont accepté de renforcer les capacités du personnel en charge des marchés publics. « Nous avons fixé les bases d’un programme déployé sur trois ans », indique Hamed Ahmed, responsable du suivi et de la coordination au sein de la PCD.

Une évaluation des besoins a été réalisée en 2013, qui a notamment mis en évidence l’ampleur des attentes : des milliers de fonctionnaires et d’autres acteurs sont régulièrement impliqués dans la passation de marchés publics sans y connaître en général grand-chose. Comment faire pour tous les former ?

C’est exactement le but de ce programme de renforcement des capacités : en travaillant avec des professeurs d’université et leurs étudiants, l’initiative parie sur l’avenir puisqu’elle forme les futurs responsables de la gestion des marchés publics en Iraq. Elle reconnaît de ce fait implicitement l’immensité des besoins d’investissement du pays, que ce soit dans l’eau, les transports ou l’énergie et, partant, l’obligation de disposer d’une fonction publique capable de gérer et de mener à bien ces projets.




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