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ARTICLE18 avril 2025

Obtenir son acte de naissance : un sésame pour la vie

The World Bank

Lucresse (à gauche) présentant son acte de naissance. Crédit : O. Hebga/ Banque mondiale.

LES POINTS MARQUANTS

  • En 2023-2024, près de 60 000 élèves camerounais scolarisés en dernière année du cycle primaire ont obtenu leur acte de naissance, leur permettant de poursuivre leurs études.
  • Les frais d’établissement de ces actes de naissance ont été réduits de 76 %, facilitant l’accès aux familles les plus démunies.
  • Une seconde phase est prévue pour couvrir 1 450 000 élèves (dont 49% de filles) sans acte de naissance au Cameroun, avec un budget de 400 000 millions de FCFA en cours de mobilisation.

L’année scolaire 2023-2024 s’est achevée en beauté au Cameroun pour près de 60 000 élèves scolarisés en dernière année du cycle primaire : malgré de nombreux obstacles, ils ont pu obtenir le « premier diplôme » de leur vie : leur acte de naissance.

Lucresse pensait ne pas pouvoir accéder cette année au lycée bilingue de Ngaoundéré. Comme la majorité des élèves en classe de CM2 de la région de l’Adamaoua, elle faisait partie des 47,1% des élèves inscrits dans le cycle primaire ne possédant pas d’acte de naissance, ce précieux sésame sans lequel, les rêves de poursuite d’études supérieurs se voient stoppées net.

Au Cameroun, l’ampleur du problème des actes de naissance demeure considérable, malgré les campagnes régulières menées par divers acteurs, dont la Banque mondiale et l’UNICEF, pour sensibiliser les parents à l’importance de faire établir l’acte de naissance du nouveau-né dès sa naissance. Selon les données pour 2023 du Ministère de l’Education de base, environ 1 250 000 élèves des écoles primaires publiques du Cameroun étaient scolarisés sans acte de naissance. Ces enfants, une fois en classe de CM2 ou Class 6 dans le système anglophone, ne peuvent pas de soumettre leur candidature aux examens de fin d’année scolaire, avec pour conséquence directe, l’arrêt de leur scolarité en cycle primaire.

Nous avons tous un rôle de sensibilisation à jouer auprès des communautés.
Maimouna Mouelle Moussa,
sous-préfet de Ngaoundéré IIIe
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Maimouna Mouelle Moussa, sous-préfet de Ngaoundéré IIIe. Crédit : O. Hebga / Banque mondiale.

Une opération exceptionnelle de recensement et d’action

Le Programme d’appui à la réforme de l’éducation au Cameroun (PAREC), en synergie avec des partenaires institutionnels tels que les ministères de l’Education de Base, de la Justice, de la Santé, Administration Territoriale, Promotion de la Femme et de la Famille, l’UNICEF, ou encore le Bureau national de l’Etat civil (BUNEC) a mis en place une vaste opération d’enregistrement hors délai des naissances des élèves en fin de cycle et d’établissement d’acte de naissance pour les enfants en classe de CM2 et Class 6 entre les mois d’avril et mai 2024 sur l’ensemble du territoire camerounais.

Sans acte de naissance, mon fils n’aurait pas pu se présenter aux examens. Son avenir scolaire était en jeu. Aujourd’hui, je suis sereine pour son avenir.
Marie-Thérèse Beguel,
étudiante
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Marie-Thérèse Beguel, étudiante. Crédit : O. Hebga / Banque mondiale.

Pour le ministre de l’Education de base, le Pr. Laurent Serge Etoundi Ngoa, « l’établissement et la délivrance des actes de naissance aux élèves en fin de cycle primaire de l’année scolaire 2023 / 2024 - au-delà d’assurer la performance de la stratégie sectorielle - intervient comme une promotion de la scolarisation de nos enfants et à leur donner une identité judiciaire. Le Cameroun observe ainsi ses engagements internationaux relatifs à la protection des droits de l’enfant.”

L’école a joué son rôle et a aidé les familles à constituer les dossiers des élèves pour qu’ils puissent passer leurs examens en fin d’année.
Eric Mayah,
directeur de l’école publique de Dang
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Eric Mayah, directeur de l’école publique de Dang. Crédit : O. Hebga / Banque mondiale.

Une coordination à plusieurs niveaux a été nécessaire pour garantir la réussite de cette opération :

  • au niveau central incluant une commission de supervision nationale et une équipe de coordination technique mise en œuvre par le PAREC ;
  • au niveau opérationnel comprenant les tribunaux et les audiences foraines spéciales ;
  • Et au niveau local faisant intervenir les commissions d’arrondissement, les inspections départementales et régionale en charge de l’éducation, les directeurs d’école et parent d’élèves.

Des résultats concrets et tangibles

Après 544 audiences foraines spéciales et 48 232 décisions favorables obtenues, 98% des enfants ciblés en classe de CM2 et de Class 6 ont pu prendre part aux examens de fin de cycle primaire.

Le coût pour faire des actes de naissance est prohibitif. Je suis très soulagé que ces frais ont pu être réduits et même pris en charge pour ma famille.
Emmanuel Bouba,
Moto taximan
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Emmanuel Bouba, Moto taximan. Crédit : O. Hebga / Banque mondiale.

A travers les discussions avec les différentes parties prenantes et tirant les leçons de la première phase, il a été possible de réduire de plus de 76% les frais d’établissement des actes. De près de 9 500 FCFA, ces coûts vont passer à environ 2 015 FCFA. Avec les perspectives de réduction des frais établissement des certificats d’âge d’environ 600 FCFA plutôt que 1 500 FCFA, ces réductions pourront atteindre près de 80% des coûts statutaires. Des discussions sont en cours avec le ministère de la santé pour faire passer ces frais à 300 FCFA.

Quelle suite pour la nouvelle année scolaire ?

Le succès de cette opération ainsi que les leçons apprises ont permis aux autorités d'approuver une seconde phase permettant à terme de couvrir l’ensemble des élèves sans acte de naissance au Cameroun. Il s’agit avec cette opération spéciale, de doter 1 450 000 élèves (49 % de filles) d’acte de naissance leur permettant ainsi de poursuite leur études sans aucun risque d’abandon ou de redoublement.

Pour atteindre cet objectif, il faudrait mobiliser environ 400 000 millions de FCFA, et des discussions avec des partenaires, tels que UNICEF, la BAD, l’UNESCO sont en cours.

L’opération spéciale de 2023-2024 demeure une mesure transitoire. Il serait donc primordial d’aborder les aspects ci-après pour éradiquer définitivement ce phénomène qui gangrène le système éducatif camerounais depuis des années en :

  • rendant plus flexibles et accessibles les procédures d’octroi d’actes de naissance aux élèves ;
  • réduisant les coûts liés aux procédures pour permettre aux ménages plus démunis de pouvoir y faire face. En effet avec un seuil de pauvreté de 2,5 USD/jour, plus de 20 jours de travail sont nécessaires pour supporter les coûts d’obtention d’actes au Cameroun ;
  • instituant un système de guichet unique permettant de limiter les efforts et risques de perte liés au processus ;
  • renforçant l’implication des comités de gestion des écoles, des directeurs d’école et enseignants et des parents pour jouer un plus grand rôle dans le suivi et l’assistance aux élèves sans acte de naissance.

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