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ARTICLE 02 août 2017

Éducation financière : quand l'information repose sur le besoin et le divertissement


LES POINTS MARQUANTS

  • Les ménages pauvres ne bénéficieront pas pleinement de l’accès aux services financiers s’ils ne disposent pas en même temps des outils nécessaires pour prendre des décisions avisées en la matière.
  • Dans le domaine de l’éducation financière, les formations générales et classiques destinées aux adultes ont constamment produit des résultats décevants.
  • Une nouvelle génération de travaux de recherche s’attache à explorer de nouvelles pistes, en quête de méthodes d’éducation financière plus attrayantes, divertissantes et davantage basées sur l’expérience.

MULTIMÉDIA


En 2013, le Groupe de la Banque mondiale a lancé le projet ambitieux d’universaliser l'accès aux services financiers à l'horizon 2020. Soutenue par une trentaine de partenaires, la Banque s’est engagée à permettre à un milliard de personnes d’accéder à un compte bancaire. Mais les ménages pauvres ne bénéficieront pas pleinement de cette avancée s’ils ne disposent pas en même temps des outils nécessaires pour prendre des décisions financières avisées.

« L’éducation financière joue un rôle crucial, particulièrement pour ceux qui accèdent aux produits et instruments financiers pour la première fois », explique Asli Demirguc-Kunt, directrice de la recherche à la Banque mondiale. « Pourtant, bien des questions demeurent sur les méthodes les plus efficaces. »

Lors d’un récent séminaire, Bilal Zia (a) s’est attaqué de front à cette problématique. Économiste au sein du département de la recherche de la Banque mondiale, il a passé en revue une décennie de travaux sur les succès et les échecs des efforts entrepris pour améliorer les connaissances et les compétences des ménages en matière financière.

Une chose est claire selon lui : les formations générales et classiques destinées aux adultes ont régulièrement montré leur incapacité à donner aux ménages les moyens de prendre des décisions financières plus avisées.

Par exemple, un programme en Indonésie a proposé ce type de formation à 200 ménages, mais cela n’a eu aucun impact sur la probabilité que ceux-ci ouvrent un compte bancaire. En revanche, le versement d’une petite aide financière a permis de multiplier cette probabilité quasiment par trois.

Cette situation a poussé Bilal Zia et ses collègues chercheurs à explorer de nouvelles pistes, en quête de méthodes d’éducation financière plus attrayantes, divertissantes et davantage basées sur l’expérience. Cette nouvelle génération de travaux de recherche a commencé à transformer radicalement la manière dont la Banque mondiale et ses pays partenaires s’efforcent de doter les ménages des outils dont ils ont besoin pour mieux connaître et utiliser les services et produits financiers.  

L’une de ces approches consiste à intervenir au moment où les individus se trouvent face à des choix financiers importants, là où la pratique rejoint la théorie. La Banque mondiale s’est par exemple associée au gouvernement indonésien pour proposer une formation à des travailleurs s’apprêtant à émigrer pour leur apprendre à gérer leur nouvelle source de revenus. Cette formation s’est avérée payante, particulièrement quand les familles des migrants y ont participé aussi. Les migrants se sont montrés davantage capables d’établir un budget et de mettre de l’argent de côté, et ont accumulé deux fois plus d’épargne qu’un groupe comparable qui n’avait pas bénéficié de la formation.

Une autre approche repose sur l’utilisation de la radio ou de la télévision, en exploitant le fait que ces médias de masse touchent déjà le quotidien des ménages du monde entier. En Afrique du Sud, la Banque mondiale a par exemple collaboré avec les créateurs d’une série télé populaire intitulée Scandal! pour incorporer une trame narrative autour des mésaventures financières de Maletsatsi, l’un des personnages principaux. Après avoir trop dépensé à l’aide de crédits coûteux, emprunté encore davantage pour couvrir ses dettes, puis aggravé son cas dans les jeux d’argent, Maletsatsi est obligée de tout révéler à sa famille. Avec l’aide de l’Association nationale de médiation de dettes, elle parvient à se sortir de cette situation de surendettement. À la suite des messages véhiculés par la série, les téléspectateurs ont considérablement accru leurs connaissances financières, davantage emprunté auprès de sources officielles (et moins coûteuses), et se sont moins adonnés aux jeux d’argent.

D’autres programmes prometteurs défrichent de nouvelles voies, en les combinant parfois : apprentissage expérientiel, personnalisation des contenus afin de répondre aux besoins spécifiques des individus ou encore ciblage des jeunes.

« L’éducation financière n’est pas une solution magique », souligne le chercheur. « Mais elle peut constituer un outil très utile lorsqu’elle intervient au bon moment, auprès du bon public, à travers les bons canaux, et en combinaison avec d’autres interventions. »

Si cette nouvelle vague de travaux de recherche a mis en évidence de multiples actions d’éducation financière efficaces, beaucoup reste à faire. À cet égard, la pénétration de la téléphonie mobile, qui permet de diffuser sous forme numérique des contenus susceptibles d’améliorer les capacités financières des ménages, ouvre un vaste champ de possibilités.

Selon Bilal Zia et ses coauteurs, il est urgent de tirer parti de ces possibilités, car ce sont les plus vulnérables qui bénéficieront le plus d’une éducation financière plus efficace.  



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