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L’agriculture à Haïti : une révolution silencieuse dans un « nuage »

08 mars 2013


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David Edson

LES POINTS MARQUANTS
  • Le séisme de magnitude 7,0 en janvier 2010 a touché directement l’infrastructure du Ministère de l’Agriculture et de l’information a été détruite.
  • Il fallait rendre le système de gestion de connaissances plus résistant aux catastrophes naturelles et améliorer son efficacité et sa transparence.
  • Avec le soutien de la Banque mondiale, la solution a été trouvée dans un nuage - c’est-à-dire un système de stockage, de partage et de traitement des données via Internet.

Entre Les Cayes, dans le sud de l’île, où elle a été cueillie, et Port-au-Prince, une mangue parcourt 190 kilomètres de routes chaotiques à l’arrière d’un camion.

Encore récemment, lorsqu’un employé du ministère de l’Agriculture de la capitale voulait connaître les chiffres de la production de mangues à Les Cayes, il n’avait guère d’autre choix que de s’embarquer pour le même périple, en sens inverse.

Les fonctionnaires du ministère étaient peu nombreux à utiliser le courrier électronique et, les lignes téléphoniques n’étant pas fiables, ils devaient se servir de leurs portables personnels.

Enfin, aucun réseau de communication n’avait été mis en place entre l’administration centrale du ministère, à Port-au-Prince, et ses bureaux régionaux dans les dix départements du pays.

« L'information était dans des dossiers, sur des ordinateurs portables ou dans la tête des gens. Pour avoir des informations sur les zones de production, par exemple, vous deviez aller directement au contact des intéressés », explique Diego Arias, expert de l’agriculture à la Banque mondiale.

Le séisme

Les conditions étaient loin d’être idéales pour un ministère censé superviser une activité qui assure un quart du PIB du pays et la moitié de l’emploi.
Et puis un séisme de magnitude 7,0 a frappé Haïti le 12 janvier 2010, faisant plus de 200 000 morts.

Le ministère n’a pas été épargné : les bâtiments ont été touchés et des membres du personnel tués. Quantité de registres et documents officiels ont disparu et les systèmes d’information ont été détruits. Le ministère a été privé d’une grande partie de ses capacités à engager le redressement économique tant attendu.


« L'information était dans des dossiers, sur des ordinateurs portables ou dans la tête des gens. Pour avoir des informations sur les zones de production, par exemple, vous deviez aller directement au contact des intéressés  »

Diego Arias

expert de l'agriculture à la Banque mondiale

Devant l’obligation de reconstituer la « mémoire » du secteur agricole haïtien, les responsables du pays et le personnel de la Banque mondiale ont uni leurs forces pour tenter de renforcer le système de gestion des connaissances du pays.

Outre qu’il fallait le rendre plus résistant aux catastrophes naturelles et aux crises futures, il s’agissait aussi d’améliorer son efficacité, sa transparence et sa réactivité aux besoins des agriculteurs et du gouvernement.

L’informatique en nuage

Grâce à l’aide et au soutien financier de la Banque mondiale, la solution a été trouvée dans le recours à l’informatique en nuage. Un nuage (ou cloud en anglais) c’est, pour simplifier, un système de stockage, de partage et de traitement des données via Internet. Et c’est ainsi que la gestion des données agricoles de Haïti fait sa propre révolution, en toute discrétion.

La Banque mondiale a présidé à la conclusion d’un accord entre les autorités du pays et Google, qui autorise le ministère de l’Agriculture à utiliser les applications développées par la société technologique gratuitement.

Diego Arias, responsable du projet pour la Banque mondiale, souligne les deux préoccupations majeures au moment des discussions, à savoir la sécurité et le droit de propriété des données : « si le gouvernement décide un jour d’annuler l’accord passé avec Google, ce dernier remettra au ministère des CD contenant toutes les bases de données stockées sur le cloud », rappelle-t-il.

Le projet prévoit aussi l’installation d’un réseau wifi pour le ministère, la construction de diverses infrastructures et l’achat de matériel informatique.

Et c’est ainsi que le personnel du ministère peut désormais travailler sur des documents et y accéder via un téléphone portable ou un ordinateur où qu’il soit, même au fin fond de la campagne. Il peut aussi consulter ses mails, travailler en même temps que des collègues sur un document, participer à des vidéoconférences, etc. Le partage d’informations entre le ministère et les bureaux régionaux devient un jeu d’enfants.

Pour Nicolas Weber, consultant senior sur les technologies de l’information et de la communication du service Agriculture et développement rural à la Région Amérique latine et Caraïbes, « grâce à ce nouveau système, toutes les informations du ministère peuvent être protégées, utilisées et partagées, et ce même en temps de crise ».


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