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TRIBUNE16 novembre 2022

Les COP offrent au Moyen-Orient et à l’Afrique du Nord la possibilité de prendre le leadership en matière climatique

Dans un monde confronté à de multiples crises — y compris la guerre en Ukraine, l’impact continu de la COVID-19 et la montée de l’inflation — celle qui menace le plus la planète et le bien-être de ses habitants est le dérèglement du climat. Et pourtant, les progrès en matière de prévention des effets potentiellement catastrophiques du réchauffement mondial sont au point mort. Selon un rapport récent des Nations unies (ONU), seuls 24 pays sur 193 ont donné suite à l’engagement qu’ils avaient pris à la COP26 à Glasgow (Écosse) d’intensifier leur action contre le changement climatique.

C’est la raison pour laquelle la COP27 en cours – la Conférence des parties sur les changements climatiques de l’ONU – revêt une importance toute particulière pour relancer la dynamique. L’enjeu de ce grand rendez-vous mondial placé sous l’égide des Nations unies est de retrouver l’élan nécessaire pour tenter de préserver l’avenir de facteurs tels que la montée des océans, des tempêtes toujours plus destructrices, des incendies de forêt de plus en plus fréquents, la désertification des paysages et d’autres dangers qui mettent en péril la santé et la stabilité dans le monde entier.

Après l’Égypte, qui accueille la COP27 à Charm el-Cheikh, c’est aux Émirats arabes unis (EAU) que se tiendra la COP28. Une double occasion pour la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) de revitaliser l’action internationale face au changement climatique et de faire porter l’attention sur les besoins de financement et d’assistance des pays qui la composent.

Soutenir la transition énergétique

Les pays de la région MENA sont parmi les plus touchés par les dérèglements climatiques et les moins préparés à les affronter : 60 % de leur population vit dans des zones souffrant d’un grave stress hydrique, tandis que 75 % de l’agriculture régionale dépend des niveaux de précipitations qui, selon les prévisions, devraient diminuer au cours des prochaines décennies et menacer encore plus la sécurité alimentaire. En Afrique du Nord, 20 millions de personnes pourraient être contraintes de migrer à l’intérieur de leur pays en raison de l’élévation du niveau de la mer, de la réduction des sources d’eau douce, de la baisse des rendements agricoles et de l’avancée de la désertification.

Les obstacles à l’action climatique dans la région MENA sont notamment la croissance démographique, l’urbanisation galopante, la réduction des ressources en raison de la pandémie de COVID et autres tensions budgétaires, ainsi que l’absence de diversification économique, en particulier dans les pays tributaires des exportations de pétrole. En 2020, 98 % de la production d'énergie dans la région MENA provenait de combustibles fossiles.

Pour jouer un rôle de leadership, les pays de la région doivent mettre en œuvre les mesures audacieuses annoncées l’an dernier, en allant au-delà de leurs engagements « verts » pour atteindre les objectifs affichés, grâce à la mise en place de politiques plus énergiques, au renforcement de la coopération régionale et à l’accroissement des financements pour le climat.

Les pays producteurs de pétrole doivent remédier aux inefficacités de leurs activités d'extraction. En Irak, par exemple, la capture du gaz torché gaspillé pourrait permettre d'économiser environ 2,5 milliards de dollars par an, d'alimenter 10 gigawatts de capacité de production d'électricité par an et de réduire la dépendance à l'égard des importations, ce qui permettrait presque de combler l’écart actuel entre l’offre et la demande, et d’améliorer la sécurité énergétique.

Certains pays, comme les Émirats arabes unis, pourraient conquérir 25 % du marché de l’hydrogène à faible teneur en carbone, dont la valeur devrait atteindre plus de 400 milliards de dollars par an au cours des cinq prochaines années. D'autres, dont l'Arabie saoudite, investissent dans des technologies alternatives transformationnelles telles que l'hydrogène vert à travers ses projets de grande ampleur.

La transition vers des sources d’énergie plus vertes pourrait créer des millions d’emplois. L’Égypte à elle seule devrait générer 2 millions de nouvelles opportunités d’emplois directs et indirects indispensables au cours des 30 prochaines années en atteignant ses objectifs en matière d’énergies renouvelables. Dans des pays comme la Tunisie, la Jordanie et le Maroc, le verdissement énergétique pourrait aussi permettre de réduire la dépendance aux importations de combustibles fossiles. Dans sa quête de sources d’énergie de substitution, l’Union européenne pourrait en effet se tourner vers la région MENA en tant que fournisseur fiable d’énergie verte (solaire, éolien et hydrogène).

Les pays de la région MENA peuvent en outre faire preuve de leadership en mettant en œuvre des réformes audacieuses visant à permettre au secteur privé de participer aux transitions économiques nécessaires pour agir efficacement en faveur du climat. Cette participation pourrait notamment permettre de combler les déficits de financement, mais aussi d’apporter des technologies de pointe et des solutions innovantes dans le domaine des énergies renouvelables.

Financement des solutions

La région MENA est la région qui reçoit actuellement le montant le plus faible des ressources destinées à la lutte contre le changement climatique. Selon le rapport Climate Policy Initiative (a), ce montant est estimé à 16 milliards de dollars par an, alors que les besoins de financement sont estimés à 186 milliards de dollars (a) dans les contributions déterminées au niveau national soumises par les pays au titre de leurs engagements climatiques.

Les financements du Groupe de la Banque mondiale en faveur de l’action climatique dans la région MENA devraient atteindre 10 milliards de dollars entre 2021 et 2025. Ils soutiendront des transformations dans les secteurs de l’eau, de l’alimentation, de l’énergie, du développement urbain et du financement, entre autres domaines d’action prioritaire. Le Groupe a contribué à hauteur de 16 milliards de dollars à travers 185 obligations vertes (green bonds) libellées dans 23 monnaies. Il s’est engagé à consacrer en moyenne 35 % de ses financements à l’action climatique et a aligné tous ses flux financiers sur l’accord de Paris adopté lors de la COP21 en 2015.

Ce financement apporte un soutien essentiel pour renforcer la capacité d’adaptation des populations aux dérèglements climatiques et faciliter une transition verte, comme l’illustrent les exemples suivants. Au Maroc, 200 000 producteurs et entrepreneurs agroalimentaires bénéficient d’incitations financières pour se tourner vers des pratiques agricoles climato-intelligentes, tandis qu’en Égypte, un programme de lutte contre la pollution atmosphérique au Caire devrait réduire de 23 % les émissions des transports publics. Au Yémen, pays ravagé par la guerre, des panneaux solaires portatifs permettent à près de 100 000 ménages et à plus de 500 écoles, centres de santé et autres installations d’avoir accès à l’énergie. En novembre 2022, des rapports nationaux sur le climat et le développement seront publiés pour l’Égypte, l’Iraq, la Jordanie et le Maroc, définissant les domaines prioritaires dans lesquels il est urgent d’agir pour mettre les pays sur la voie d’un développement plus durable.

La lutte contre le changement climatique est déterminante pour réduire la pauvreté dans le monde et promouvoir une prospérité partagée. Les deux prochaines réunions de la COP devront faire preuve d’un leadership audacieux en cette période des plus cruciales pour relever les défis d’un monde au climat changeant.

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