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Moins de gâchis, plus d'économies : la gestion des déchets au cœur du développement durable

03 mars 2016


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Photo: Epsos/Flickr


LES POINTS MARQUANTS
  • Plus de la moitié de la population mondiale n’a pas accès à un service d’enlèvement des déchets ménagers.
  • Environ 4 milliards de personnes utilisent des décharges illégales ou non réglementées, qui accueillent plus de 40 % des détritus produits dans le monde.
  • La Banque mondiale aide les pays et les municipalités à se doter de programmes de gestion durable des ordures ménagères, afin de collecter, d’évacuer, de recycler, de valoriser et de réduire les déchets.

Pour les habitants de Rosario, en Argentine, une ville qui gère bien ses déchets ce n’est pas qu’une ville propre. La démarche adoptée à Rosario a permis d’accroître l’activité économique tout en préservant l’environnement avec, affirme le maire Monica Fein, « un impact direct sur l’essentiel : la qualité de vie des citoyens ».

« Nous avons fait le pari d’innover dans la recherche de solutions », explique Monica Fein. « Notre décision de moderniser les services de collecte a profondément transformé notre ville. »

Il y a encore une génération, nombre de villes à travers le monde ne disposaient pas d’un programme complet pour la gestion des ordures ménagères. Les déchets organiques servaient à nourrir les animaux et les déchets d’emballages étaient quasiment inexistants. Mais aujourd’hui, sous l’effet de la croissance démographique, de l’urbanisation galopante et du développement économique, la gestion des ordures devient l’une des priorités à l’échelle planétaire.  

En 2012, la Banque mondiale a tiré la sonnette d’alarme dans un rapport phare intitulé What a Waste (a), qui prévoyait une hausse de 70 % du volume des déchets urbains à l’horizon 2025, et un documentaire encensé par la critique, Trashed (a), a montré en détail l’ampleur de la crise mondiale des déchets.    

Les villes, au centre du problème

Étant donné que la gestion des déchets solides incombe généralement aux municipalités, il n’est pas étonnant que cette problématique soit l’une des priorités des maires, dans les pays riches comme dans les pays pauvres, comme le souligne Ede Illjasz-Vasquez, directeur principal du pôle mondial d’expertise en Développement social, urbain et rural, et résilience, au sein de la Banque mondiale.

« Sans une bonne gestion des déchets solides, vous ne pouvez pas construire des villes qui soient à la fois durables et agréables à vivre », explique-t-il. « Le problème ne se résume pas à trouver des solutions techniques. Il faut aussi raisonner en termes d’impacts sur le climat (a), sur la santé (a) et sur la sécurité (a), et prendre en compte les aspects sociaux, qui vont de l’inclusion des ramasseurs d’ordures à la nécessité d’un changement de comportement, afin d’encourager les individus et les pays à produire moins de déchets et à les recycler (a). » 


« Sans une bonne gestion des déchets solides, vous ne pouvez pas construire des villes qui soient à la fois durables et agréables à vivre. Le problème ne se résume pas à trouver des solutions techniques. Il faut aussi raisonner en termes d’impacts sur le climat, sur la santé et sur la sécurité, et prendre en compte les aspects sociaux. »
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Ede Ijjasz-Vasquez

Directeur principal du pôle mondial d’expertise en Développement social, urbain et rural, et résilience, Groupe Banque mondiale.

Depuis 2000, les prêts alloués par la Banque mondiale à des projets de gestion des déchets solides ont totalisé 4,5 milliards de dollars et ont appuyé 329 programmes dans le monde. Ces projets combinent un financement de l’infrastructure et des activités de conseil pour répondre à divers objectifs, allant de la mise en place de simples systèmes de collecte et d’évacuation des ordures à des dispositifs de revalorisation et de recyclage sophistiqués, destinés à faire évoluer les comportements.

Des solutions nouvelles à des problèmes anciens

Les spécialistes des questions urbaines, sociales et environnementales au sein du Groupe de la Banque mondiale cherchent des solutions pour remédier à certains des problèmes posés par les ordures ménagères.   

  • La gestion de ces déchets est onéreuse : dans nombre de pays en développement, elle représente entre 20 et 50 % du budget d’une ville. Ce coût est particulièrement élevé pour les pays qui deviennent des pays à revenu intermédiaire. En effet, ces pays n’ont pas de système de taxes ou de redevances qui leur permettrait de financer des programmes de gestion des déchets solides, et leur population se débarrasse généralement de ses ordures dans des décharges sauvages, à ciel ouvert. La Colombie, où 96 % des déchets sont mis en décharge, s’est attelée au problème en lançant un programme national (a) de redevances dont le montant dépend de la capacité de paiement des utilisateurs. 
  • Si vous demandez à la population de payer un service, vous devez être à même de fournir ce service. Les citoyens ne sont pas disposés à payer pour un mauvais système d’enlèvement des ordures, mais, si les recettes sont insuffisantes, il n’est pas possible de financer un programme de collecte des déchets. Le Groupe de la Banque mondiale travaille sur des programmes innovants (a), qui visent à accroître les flux de recettes et, dans les pays disposant d’institutions solides, à encourager les partenariats public-privé qui amélioreront l’efficience.
  • L’économie informelle joue un rôle important dans la plupart des pays en développement, où entre 15 et 20 % des déchets produits sont collectés, triés, recyclés et valorisés par des personnes ou des microentreprises qui ne sont pas officiellement enregistrées ou reconnues. « Nous avons élaboré des modèles (a) très prometteurs pour offrir des opportunités d’emploi formel à ces travailleurs informels », indique Frank Van Woerden, ingénieur spécialiste de l’environnement à la Banque mondiale. 

La Banque définit et expérimente diverses approches dans différentes régions :

  • Afrique : Au Libéria, après une guerre civile qui a duré plusieurs décennies, la capitale, Monrovia, est une décharge à ciel ouvert. Les ordures envahissent les routes, les canaux et les cours d’eau. La Banque mondiale a commencé en 2010 à aider cette ville à gérer ses déchets solides, dans le cadre d’une intervention d’urgence qui avait pour objectif principal d’améliorer la gestion financière, les marchés publics, la gestion des contrats et le recouvrement des coûts. Une décharge contrôlée et deux centres de transfert des ordures ont été construits, les décharges illégales ont été détruites et le taux d’enlèvement des déchets a été porté de 13 % à 50 %.
  • Asie de l’Est et Pacifique : En Chine, le volume des déchets solides collecté dans les villes a considérablement augmenté, passant de 31 millions de tonnes en 1980 à 157 millions en 2009, et devrait atteindre 585 millions de tonnes en 2030 en raison d’une urbanisation effrénée et d’une expansion démographique sans précédent. La Banque mondiale finance un nouveau projet de gestion des déchets solides à Ningbo (a). Il s’agit de mettre en place un système de séparation des ordures ménagères produites par plus de 2 millions d’habitants et de constituer un partenariat public-privé pour financer la construction d’une usine qui traitera les déchets alimentaires produits par les ménages et dans les lieux publics.
  • Europe et Asie centrale : Des pays comme l’Azerbaïdjan (a) déploient des programmes pour récupérer les produits recyclables et pour réduire l’utilisation de matières premières. En outre, certains pays passent de dispositifs centrés sur les villes à des dispositifs régionaux pour l’évacuation et le traitement des déchets, ce qui leur permet de bénéficier d’économies d’échelle.
  • Amérique latine et Caraïbes : Dans trois villes d’Argentine (Mar del Plata, Rosario et Salta), 15 à 30 % des déchets mis en décharge sont d’origine alimentaire. Des stratégies destinées à réduire ce type de déchets (a) ont été élaborées pour ces municipalités : des partenariats visent à sensibiliser l’industrie agroalimentaire au problème, des actions sont menées en coopération avec les réseaux de banques alimentaires afin d’encourager les dons alimentaires, et des programmes d’amélioration du tri et du traitement des déchets alimentaires permettent de produire un compost de qualité.
  • Moyen-Orient et Afrique du Nord : Des initiatives récentes ont permis de créer de nouvelles décharges, de lancer des programmes de recyclage et d’améliorer significativement la situation des ramasseurs d’ordures. Deux grandes décharges ont été construites en Cisjordanie et accueillent aujourd’hui les ordures de 1,5 million de personnes. Un troisième projet, dans la bande de Gaza, permettra à près de la moitié de la population de bénéficier de services de collecte durables. Le Maroc encourage les initiatives de valorisation des déchets, dans l’optique d’accroître le taux de recyclage, d’exploiter l’énergie issue des déchets et d’offrir aux ramasseurs d’ordures des opportunités d’emploi formel non précaire.
  • Asie du Sud : Au Népal, le Partenariat mondial pour l’aide basée sur les résultats (GPOBA), mis en place par la Banque mondiale, finance un projet innovant (a) qui comble l’écart entre les recettes recouvrées et le coût des services de gestion des déchets solides. En Inde, un projet portant sur l’ensemble de la chaîne de valeur des déchets (collecte-traitement-évacuation) est en cours d’élaboration. Jusqu’à 3 millions de personnes devraient en bénéficier dans plusieurs villes de l’État de l’Uttar Pradesh.

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