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Une maladie oubliée tue des dizaines de personnes en Haïti

01 décembre 2015


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Un chien dans la rue à Port-au-Prince. / ISABELLE SCHAEFER  (Banque mondiale)


Le pays en appelle à l’aide internationale pour vacciner un demi-million de chiens.

Le jour de son douzième anniversaire, à Sierva, María de Todos los Ángeles a été mordue par un chien enragé. Ainsi débute l’un des plus beaux romans du prix Nobel de littérature, Gabriel García Márquez, « De l’amour et autres démons ». Il décrit comment la pauvre jeune fille, assaillie par la douleur et victime de l’intolérance de Carthagène des Indes, voit son avenir s’assombrir à une époque où personne ne savait soigner sa maladie qui était vue comme une « possession diabolique ».

Plusieurs siècles plus tard et, alors qu’on la pensait éradiquée, la rage qui terrorisait jadis les populations d’Amérique latine est toujours présente dans la région. Haïti lui paie un lourd tribut avec 70 % des décès causés par la rage dans la région, parmi d’autres pays affectés comme la Bolivie, la République Dominicaine, le Guatemala et le Brésil.

Depuis les années 1980, la maladie a été quasiment éradiquée du reste du continent américain. Les régions du monde les plus touchées sont l’Afrique et l’Asie où, selon l’Organisation mondiale de la santé, on comptabilise 95 % des décès humains dus à la rage transmise par des morsures de chiens et d’autres animaux.

La maîtrise de cette maladie a été rendue possible grâce à ce que les spécialistes considèrent comme le moyen le plus efficace : la vaccination des chiens. Même si d’autres animaux peuvent la transmettre, la proximité des chiens et des humains en fait les principaux vecteurs de la rage.

Un demi-million de chiens

« La rage est un problème de santé publique majeur en Haïti », souligne Caroline Plante, spécialiste de la Banque mondiale. Elle ajoute que, dans le pays, tous les décès dus à la rage transmise par des chiens ne sont pas répertoriés et qu’on estime que ce nombre s’élève à environ 200 morts par an.

Il ne fait pas de doute que les chiens représentent le plus grand problème. C’est pourquoi le gouvernement haïtien a lancé une campagne de vaccination de ces animaux, soutenue par la Banque mondiale, et dont l’objectif est de vacciner 500 000 chiens. En effet, vacciner au moins 70 % de la population canine serait suffisant pour réduire le nombre de cas de rage, comme cela s’est déjà produit dans d’autres pays.

« De nombreux facteurs sociaux, culturels et économiques ont contribué à la propagation de la rage en Haïti, notamment les difficultés financières liées à la reconstruction après le tremblement de terre et l’épidémie de choléra qui s’est déclarée ensuite », affirme Caroline Plante. Néanmoins, la spécialiste estime que l’initiative du gouvernement pourrait sauver des vies, en particulier parmi les jeunes enfants.

Rage et pauvreté

« En Amérique latine et dans les Caraïbes, la rage est souvent associée à la pauvreté et c’est une maladie négligée », poursuit Caroline. L’Organisation mondiale de la santé animale affirme que « la rage est un grave problème de santé publique qui touche de façon disproportionnée les communautés rurales et pauvres ».

L’Organisation mondiale de la santé identifie deux symptômes de la manifestation de la rage chez l’homme : la forme « furieuse » quand le malade est hyperactif et meurt souvent d’un arrêt cardiaque, et la forme « paralytique », quand les muscles de la personne sont progressivement paralysés et qui peut déboucher sur un coma.

Une bonne nouvelle toutefois : la vaccination des chiens peut contribuer à prévenir la contagion. Et des vies humaines peuvent aussi être sauvées par un traitement rapide des blessures et l’administration de doses de vaccin antirabique.

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