WASHINGTON, 11 avril 2014 – La vitesse avec laquelle l’Afrique évolue est extraordinaire. Un parcours qui a certes permis d’améliorer le quotidien et le niveau de vie des Africains mais qui a également mis en évidence la fragilité potentielle de tous les pays.
« Les États fragiles n’appartiennent pas à un ghetto ou une catégorie spéciale de pays isolés. La fragilité fait partie des risques inhérents au processus même de développement », a affirmé le président de la Banque africaine de développement (BAD), devant une salle comble, ce 10 avril, au siège de la Banque mondiale à Washington.
Donald Kaberuka participait à un événement organisé en marge des Réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI et consacré aux conclusions d’un rapport intitulé Mettre fin aux conflits et consolider la paix en Afrique : un appel à l’action. Publié sous les auspices de la BAD et lancé en janvier dernier lors du sommet de l’Union africaine, ce rapport est le fruit du travail d’un groupe d’experts de haut niveau dirigé par la présidente du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf.
« L’argent ne parviendra pas à résoudre tous les problèmes », a déclaré M. Kaberuka en rappelant que les organismes de développement comme la BAD risquent de « naviguer à l’aveuglette » faute de bien comprendre l’économie politique de leurs pays membres. « Comment expliquer que nous n’ayons rien vu venir ? », s’est-il étonné à propos du conflit armé au Soudan du Sud, qui s’est déclenché le jour même où la BAD approuvait un prêt de 25 millions de dollars en faveur de ce pays pour financer un projet énergétique. Il a aussi questionné l’incapacité de la BAD à prédire la descente aux enfers de la République centrafricaine (RCA).
« Certains pays d’Afrique ont prouvé que l’on pouvait s’extirper de la fragilité pour renouer avec la croissance et les bons résultats », a déclaré le vice-président de la Banque mondiale pour la Région Afrique, Makhtar Diop, également membre du panel. Il a cité le cas du Rwanda pour souligner que la résolution de la fragilité « est d’autant plus efficace que les dirigeants sont de qualité » et que les responsables ne sous-estiment pas certains aspects qui ont un impact sur la fragilité et les conflits : le changement climatique, l’égalité hommes-femmes ou encore les dimensions régionales.
« Les approches purement technocratiques » de lutte contre la fragilité ont échoué, a poursuivi le vice-président, rappelant qu’en général, les solutions émergent lorsque le « processus politique s’aligne sur le processus économique » et lorsque les responsables comprennent que la promotion de la paix relève « de l’art et non de la science ».
Pour Jan Eliasson, secrétaire général adjoint des Nations Unies, « nous devons améliorer nos interventions préventives ». Et de presser les partenaires au développement « de travailler et de réfléchir horizontalement », en favorisant dans le même temps « la paix, la sécurité, le développement, la justice et les droits humains » dans le cadre d’une démarche en faveur des « droits avant tout ».