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Climat : Les ministres africains se préparent aux négociations de Durban

17 septembre 2011


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Kandeh Yumkella (ONUDI), Dipuo Peters (ministre de l’Énergie, Afrique du Sud), Elham Ibrahim (commissaire, Commission de l’Union africaine) et Jamal Saghir (directeur pour le développement durable, Région Afrique, Banque mondiale), lors de la cérémonie de clôture.


LES POINTS MARQUANTS
  • Les premières discussions portent sur l’« agriculture climato-intelligente » et ses promesses de triple dividende pour les agriculteurs africains
  • Les énergies renouvelables sont elles aussi vitales pour le développement du continent africain
  • Le concours « Connect4Climate » cherche à mobiliser la jeunesse africaine autour de la recherche de solutions au changement climatique

PRÉTORIA, le 17 septembre 2011 — Renforcer la sécurité alimentaire malgré le changement climatique. Garantir la protection de l’environnement. Promouvoir l’accès aux énergies renouvelables. La résolution de ce triple défi, fondamentale pour le développement de l’Afrique, était au cœur d’un nouveau cycle d’échanges lancé la semaine dernière à Johannesburg (Afrique du Sud).

L’agriculture climato-intelligente au centre des discussions

Que recouvre le concept d’« agriculture climato-intelligente » ? Il s’agit à la fois d’augmenter durablement les rendements des cultures vivrières, d’améliorer la résilience des systèmes de production alimentaire, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et, au final, de renforcer la capacité des pays à assurer leur sécurité alimentaire et atteindre leurs objectifs de développement. Autrement dit, dans un monde qui fait face au changement climatique, l’agriculture climato-intelligente concerne des techniques et des stratégies éprouvées à même de procurer un triple dividende : la sécurité alimentaire, l’adaptation et l’atténuation.

Cette série de rencontres, la première menée à l’échelle du continent sur ce sujet, a démarré par une réunion des ministres africains de l’Agriculture et un appel à l’action de la ministre sud-africaine Tina Joemat-Pettersson, pour qui « la sécurité alimentaire, en particulier en Afrique, est déterminée par le conditions climatiques locales ».

Selon elle, « tout changement, à court ou long terme, a un impact immense sur nos capacités à nourrir nos pays », soulignant que « la sécurité est importante pour l’économie africaine, puisqu’elle a de profondes répercussions sur la réduction de la pauvreté et les plans de développement durable ».

Cette rencontre arrive à point nommé : en novembre, l’Afrique du Sud accueillera à Durban la 17e réunion de la Conférence des parties (COP 17) de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC). Cette « COP de l’Afrique », comme l’appellent certains, suscite d’immenses espoirs et la série de consultations engagées sous l’égide du gouvernement sud-africain et des partenaires au développement devrait conduire à un consensus sur les enjeux fondamentaux, notamment le rôle de l’agriculture dans le changement climatique.

Oratrice principale de la conférence, la ministre sud-africaine des Relations internationales et de la Coopération Maite Nkoana-Mashabane a accueilli les participants en rappelant que l’agriculture climato-intelligente offrait un triple dividende pour la lutte contre le changement climatique. Alors que l’Afrique du Sud sera le pays hôte de la COP 17, c’est elle qui présidera les discussions de Durban.

L’aptitude de l’Afrique à nourrir ses populations soulève toujours plus d’inquiétudes. Le continent est passé à côté de la révolution verte qui, dans les années 1970 et 1980, a métamorphosé l’agriculture tropicale. Les agriculteurs africains obtiennent des rendements nettement inférieurs à ceux de leurs homologues asiatiques ou latino-américains. Alors que le changement climatique devrait avoir des répercussions profondes — et négatives — sur l’agriculture de zone tropicale en Afrique, entraînant une baisse des rendements de 28 % dans les 50 prochaines années, les participants à cette première concertation ont appelé à des mesures de relance pour redonner à l’agriculture la place qui lui revient dans les stratégies de développement des pays africains.

Le communiqué publié à l’issue de cette rencontre rappelle que le moment est venu pour des initiatives concertées plaçant l’agriculture intelligente face au climat au cœur des stratégies d’adaptation et d’atténuation. Ce texte appelle en particulier les participants de la COP 17 à adopter un programme de travail pour l’agriculture qui abordera ces questions d’adaptation et d’atténuation au changement climatique et presse les négociateurs africains de se rapprocher des représentants du secteur agricole.

Andrew Steer, l’envoyé spécial de la Banque mondiale pour le changement climatique, s’est félicité du succès de la conférence, notant que le « communiqué de Johannesburg montre bien la gravité de la menace que le changement climatique fait peser sur le développement durable de l’Afrique ».

Il a formulé l’espoir « qu’à Durban et au-delà, l’agriculture climato-intelligente soit reconnue comme faisant partie des solutions à opposer au changement climatique ».

Quelques jours plus tard, M. Steer a relayé ce message devant les ministres africains de l’Environnement réunis à Bamako, au Mali, pour la Conférence ministérielle africaine sur l’environnement (CMAE). Il a exhorté chacun à œuvrer pour que des progrès concrets soient obtenus à Durban et à s’attaquer de front au problème des capacités de l’agriculture africaine et de l’accès insuffisant à l’énergie. Il a souligné les acquis positifs des réunions ministérielles en Afrique du Sud et souligné la nécessité d’appuyer les voix, les inquiétudes et les initiatives des Africains face au changement climatique.

Promouvoir l’accès aux énergies renouvelables en Afrique

Le deuxième rendez-vous  de cette série d’échanges était organisé par le ministère sud-africain de l’Énergie et la Commission de l’Union africaine, en partenariat avec ONU-Énergie et la Banque mondiale. Des ministres africains de l’Énergie, des décideurs et des experts des énergies renouvelables se sont rencontrés pour faire progresser le dialogue et trouver un consensus sur la vision africaine de l’énergie du futur, dans la perspective de la COP 17.

Évoquant l’importance de l’enjeu énergétique pour l’Afrique, Dipuo Peters, ministre sud-africain de l’Énergie, a rappelé que « l’absence d’électricité aggravait la pauvreté et contribuait à l’entretenir en interdisant pratiquement toute activité industrielle et, partant, toute création d’emplois ».

Face à l’ampleur des défis, il est indispensable selon lui de « diversifier le bouquet énergétique [de l’Afrique] et notamment faire davantage appel aux énergies renouvelables et aux techniques à haut rendement ».

Les chiffres relatifs au déficit énergétique de l’Afrique parlent d’eux-mêmes :

  • 31 % seulement des Africains ont accès à l’énergie ;
  • la consommation du continent, hors Afrique du Sud, représente environ 1 % de celle des pays industrialisés (soit de quoi alimenter une ampoule par habitant trois heures par jour) ;
  • l’Afrique devrait installer 7 000 MW de nouvelles capacités de production par an mais le taux actuel tourne plutôt autour de 1 000 MW ;
  • au rythme actuel d’électrification des pays, la plupart ne parviendront même pas à assurer un accès universel d’ici 2050.

Dans son discours liminaire, Jamal Saghir, directeur pour le développement durable au sein de la Région Afrique de la Banque mondiale, a confirmé l’ampleur des défis et souligné les marges de manœuvre pour attaquer frontalement ce problème de l’accès à l’énergie en Afrique.

« L’Afrique est riche en énergie mais pauvre en électricité », a-t-il déclaré en faisant allusion aux immenses sources d’énergie, comme l’hydroélectricité, encore inexploitées. Avant d’exhorter les participants à faire en sorte que la situation énergétique de l’Afrique soit au centre des priorités de Durban.

Une exposition spéciale sur les solutions d’énergie verte pour les particuliers était également organisée dans le cadre de la réunion.  Après l’allocution initiale de Dan Kammen, spécialiste en chef des énergies renouvelables à la Banque mondiale, une visite guidée a permis de découvrir les toutes dernières technologies disponibles en matière d’énergies renouvelables et d’éco-énergie. Quantité d’experts étaient présents au centre des congrès de Sandton pour cette exposition.

Le partage des connaissances et la mise à contribution des leçons tirées de l'expérience sont aussi importants que la technologie et le financement. C'est pourquoi l'Institut de la Banque mondiale a organisé une formation sur la question du financement du climat, où les nombreuses délégations présentes ont échangé sur les leçons apprises de leurs succès respectifs en matière d'accès à l'énergie et la croissance écologique. Ces sujets occuperont une place importante lors des discussions de la COP-17 à Durban.

« La Banque mondiale est heureuse de participer à l’organisation de ces réunions cruciales avec les autorités sud-africaines, la Commission de l’Union africaine, ONU-Énergie et d’autres partenaires au développement », a souligné Ruth Kagia, directrice des opérations de la Banque mondiale pour l’Afrique du Sud. « La route vers Durban risque d’être longue mais en travaillant en concertation avec nos clients, nous faisons ce qu’il faut pour étayer les discussions et provoquer des décisions à la COP 17 ».

Ces rencontres ont déjà porté leurs fruits : le gouvernement sud-africain a généreusement accepté d’accueillir, avant la COP 17, une réunion spéciale des négociateurs sur le changement climatique, afin de les tenir au courant des progrès obtenus.

À l’occasion de la CMAE à Bamako, Andrew Steer a lancé la campagne « Connect4Climate », qui prévoit un concours vidéo et photo international pour réunir les communautés africaines mobilisées autour du changement climatique. Les Africains, et notamment les jeunes, sont invités à partager leurs expériences sur la manière dont le changement climatique affecte l’Afrique, mais aussi les pays, les communautés, les individus, leurs amis et leurs familles.

Le concours Connect4Climate s’adresse aux jeunes du monde entier de 13 à 30 ans, et plus particulièrement à la jeunesse africaine. Plus de 50 prix seront remis (trois catégories : les 13-17 ans, les 18-24 ans et les 25-30 ans) et les solutions retenues seront présentées lors d’une exposition de premier plan organisée pendant la COP 17. Les candidatures doivent être envoyées avant le 7 novembre 2011.


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