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Les partenariats comme approche privilégiée pour sauvegarder les éléphants du Mali

10 septembre 2010


LES POINTS MARQUANTS
  • La rareté de l’eau et la dégradation de l’environnement sont une menace pour les quelque 350 éléphants du Gourma malien, ultime sanctuaire de pachydermes à l’orée du Sahel
  • La Banque mondiale s’est alliée à d’autres partenaires pour former une vaste coalition qui s’attèle à inverser la tendance
  • À travers le Fonds pour l’environnement mondial, la Banque finance un projet visant à rétablir la biodiversité et créer des points d’eau dans les espaces de conservation

BAMAKO, 10 septembre 2010—La mort tragique de 21 éléphants en l’espace de deux semaines dans le Gourma, au Mali, a causé beaucoup de consternation dans cet État de l’Afrique de l’Ouest. Les décès ont été causés par un déficit pluviométrique auquel s’est ajoutée la concentration d’animaux domestiques provenant des communautés environnantes.

C’est le constat d’une mission conjointe de supervision technique de la Banque mondiale, qui s’est rendue du 22 juillet au 2 août 2010 dans la zone d’intervention du Projet de conservation et de valorisation de la Biodiversité du Gourma et des Eléphants.

La mort des éléphants est intervenue entre le 25 mai et le 5 juin 2010 suite à un manque d’eau dans la région. La rareté de l’eau a entraîné la concentration de plus de 50.000 têtes de bétail autour du lac Banzena, seul site de convergence des éléphants pendant la saison sèche. Cette conclusion est confortée par celle d’une mission d’investigation gouvernementale dépêchée sur les lieux en juin dernier. Selon elle, « On peut admettre que la compétition éléphants-bétail autour des mares est la cause de cette mortalité exceptionnelle ». Solution ? La mission a préconisé la sécurisation du parcours des éléphants par la création de points d’eau pour les éléphants dans les aires de conservation et des points d’eau à usage partagé dans l’espace entre les aires de conservation sur le parcours des éléphants.

Le Gourma est une vaste région qui s'étend sur quatre millions d'hectares le long du Sahel, à cheval entre le Mali et le Burkina Faso. Du côté malien, il touche trois régions administratives, à savoir Mopti, Tombouctou et Gao. Doté d’un paysage diversifié où l’on trouve à la fois lacs, dunes, plaines et petites montagnes, le Gourma est le sanctuaire d’éléphants le plus au nord en Afrique subsaharienne. En 2007, un comptage aérien a identifié 354 pachydermes dans la région. La recherche de l’eau et de nourriture oblige les éléphants à faire un mouvement migratoire d’environ 1000 kilomètres dans un chapelet de mares entre le Mali et le Burkina Faso.

Préserver un bien public mondial

Il existe un large consensus en faveur de mesures de conservation au Gourma. C'est pourquoi en plus de l'équipe de la Banque mondiale, d’autres partenaires au développement ont pris part à la mission technique qui s'est rendue sur les lieux fin juillet. Il s'agit notamment du Programme des Nations Unies pour le développement, l'Autorité du Liptako-Gourma, les ONG internationales Wild Foundation et Save the Elephants (sauver les éléphants), l'Ambassade des Etats Unis au Mali, et l'Union internationale pour la conservation de la nature.

La Banque mondiale a fait de la préservation des biens publics mondiaux, tels que l'environnement ou la biodiversité, l'un de ses six thèmes stratégiques. En septembre 2004 le Conseil d'administration de la Banque a approuvé un don de 5,5 millions de dollars pour le Projet de conservation de la biodiversité du Gourma et des éléphants. Le projet vise à stopper ou, le cas échéant, inverser la tendance à la dégradation de la biodiversité dans le Gourma. Pour y parvenir, il faut penser à définir un schéma d’occupation de l’espace qui permet aux animaux de demeurer dans leur habitat naturel tout en préservant pour les populations locales le droit de poursuivre leurs activités agro-pastorales dans la région. A cet égard, la démocratie participative et la dynamique d'une véritable décentralisation amorcée au Mali sont autant d'atouts majeurs qui favorisent l'atteinte des objectifs visés.

La mission de la Banque mondiale dans le Gourma avait pour but de mobiliser tous les principaux acteurs opérationnels dans la conservation de la biodiversité et d'avoir des discussions sur la situation récurrente de pénurie d'eau et de pâturages et prendre des décisions conjointes avec les représentants des populations pour les actions prioritaires de 2011. Il s’agissait aussi de faire le point des engagements de financement et du planning prévisionnel pour l’exécution des ouvrages hydrauliques et faire l’état d’exécution des activités du Projet depuis la dernière mission de décembre 2009.

Ces différents partenaires se sont engagés pour une solution à court et moyen terme au problème d’eau et de pâturage sur le parcours des éléphants et singulièrement autour de la mare de Banzena désormais dédiée aux seuls éléphants. Des points d’eaux (forages équipés de système d’exhaure solaire, surcreusement de mares) seront créés et aménagés sur des sites appropriés. Il s’agira également d’actualiser les Plans de Développement Economique, Social, et Culturel des communes concernées par tous les ouvrages à réaliser afin d'assurer la mobilisation sociale autour des ouvrages en établissant des règles de gestion communautaire propre à chaque ouvrage.

Mobiliser les populations

Dans un schéma de répartition des tâches et rôles, le gouvernement du Mali s’est engagé à réaliser un point d’eau pastoral (forage équipé de système d’exhaure solaire et aménagements accessoires), pour décongestionner la mare de Banzena et deux autres ouvrages pour la sécurisation du parcours des éléphants. La Banque mondiale, à travers le Fonds pour l’environnement mondial, va creuser trois mares pour la sécurisation du parcours des éléphants, tandis que la coopération militaire de l’ambassade des Etats-Unis au Mali fera trois puits-citerne couplés à des actions d’accompagnement. L’Autorité du Liptako-Gourma va creuser deux mares. La mobilisation sociale, le plan pour le décongestionnement de Banzena, les Conventions intercommunales de gestion des parcours de migration des éléphants, les conventions locales afin d’inclure les éléphants dans les plans de gestion des ressources naturelles, seront l’œuvre de Wild Foundation, en partenariat avec le Projet. Quant à Save The Elephants, cette ONG s’occupe déjà des études et des analyses des données recueillies par les colliers placés au cou des éléphants.

Le soutien des populations locales en faveur du Projet de conservation de la biodiversité du Gourma est manifeste. « La décision de dédier la mare de Banzena aux éléphants, tout comme leur participation effective aux propositions d’infrastructures et leurs localisations appropriées pour une gestion durable et équitable des ressources naturelles du Gourma sont des preuves tangibles de leur engagement pour le projet », a souligné Emmanuel Nikiema, chef de projet pour le compte de la Banque mondiale. « Il y a lieu d'espérer que dans un avenir pas si lointain, ces efforts se traduiront par des gains appréciables lorsque le Mali se lancera de plain-pied dans l'écotourisme, conformément au cadre de réduction de la pauvreté et la croissance ».

Le projet est également financé par le Fonds Français pour l'Environnement Mondial (1,6 millions d’euros), le gouvernement du Mali (945 millions de FCFA en fonds de contrepartie) et les communautés bénéficiaires (60.000 dollars), à travers les communes.


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