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Les entreprises publiques mauritaniennes à l’épreuve de la performance

16 juillet 2010


NOUAKCHOTT, 16 juillet 2010—La Mauritanie compte une trentaine d’entreprises étatiques qui fournissent des services vitaux comme l'électricité, l'eau et le gaz et constituent également une source d’emplois et des infrastructures dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

Mais ces entreprises sont confrontées à une faible rentabilité et drainent le budget national, selon les experts. Les raisons: le manque de financement durable, la politisation des postes de direction, défaillance des contrôles internes, et la lourdeur des procédures administratives.

Le 16 juin dernier, pour sa première dissémination auprès du grand public mauritanien, une étude portant sur la gouvernance des entreprises publiques en Mauritanie a suscité un vif intérêt chez la presse invitée pour en débattre au siège de la Banque mondiale à Nouakchott. Pour en situer le contexte, il s’agissait de présenter les résultats d’une étude réalisée entre 2007 et 2008 par une équipe du département Finances et Secteur Privé de la Banque mondiale.

L’étude, qui entre dans le cadre d’un projet de promotion en Afrique de la gouvernance améliorée des sociétés publiques, cherchait à « comparer l’expérience locale aux meilleurs pratiques, particulièrement suivant les normes de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et de faire des recommandations pour résorber les écarts », selon Haroune Sidatt, analyste des opérations à la banque mondiale.

A l’image d’autres pays francophones de la région ouest-africaine, l’équipe de la Banque mondiale a étudié le cas d’une dizaine de sociétés publiques locales.

En raison de la vitalité des services qu’elles fournissent, les sociétés publiques sont souvent directement contrôlées par l’Etat, ce qui les bureaucratise et en fait des entreprises peu rentables et, finalement, les transforme en un fardeau pour le budget national. Pressées de contribuer à des politiques sociales dont les objectifs sont peu définis et coûteux, surtout dans les pays en voie de développement où les financements sont rares, elles n’obéissent souvent pas à une logique économique, à cause du caractère vital des services qu’elles fournissent.

« Même si privatiser rime parfois avec plus d’efficacité, plus de pays adoptent des approches mixtes où le gouvernement signe des contrats de performance avec les SP qui peuvent alors se gérer comme des entreprises privées et améliorer leur gouvernance », souligne Sidatt.

Parmi les goulots d’étranglement qui empêchent les entreprises publiques de remplir correctement leur mission, le rapport souligne la nécessité d’améliorer le cadre juridique et réglementaire afin de garantir une concurrence loyale avec le secteur privé. Les auteurs mettent en cause le monopole étatique et les régimes fiscaux ou douaniers préférentiels accordés à certaines entreprises publiques au détriment d’autres. Tout comme la double vocation commerciale et sociale des sociétés publiques, qui conduit souvent les hautes autorités étatiques mauritaniennes à court-circuiter les conseils d’administration et les structures gouvernementales sur des politiques sociales et décisions opérationnelles, causant un grave préjudice à la performance des entreprises et à l’esprit de concurrence.

Globalement, l’étude recommande une série de mesures, dont :

  • Mettre fin au court-circuitage des conseils d’administration des sociétés étatiques et créer des institutions chargées de la régulation et de la supervision des entreprises publiques ;
  • Instituer la présentation au public et au parlement d’un rapport sur la performance des entreprises étatiques ;
  • Nommer les dirigeants sur la base de leurs qualifications et loin de toute interférence politique, respecter les procédures de prise de décisions ;
  • Soumettre les directeurs généraux à des évaluations de performance ;
  • Améliorer le contrôle citoyen en impliquant la société civile et en encourageant le débat public ;
  • Mettre à niveau les principales entreprises publiques pour être conformes aux normes internationales.

Outils nécessaires pour encourager une meilleure gouvernance d'entreprise, la communication et la transparence sont en voie de règlementation dans plusieurs pays, surtout dans les marchés où les sociétés ont des actionnaires actifs, une presse entreprenante, des associations de consommateurs fortes et des institutions régulatrices efficaces.

En Mauritanie, aucun préalable de la communication publique n'est rempli. Le rapport note que l'accès aux informations et la production de rapports exhaustifs sont peu réguliers en Mauritanie, où le dernier rapport sur les sociétés publiques date de 2005. Or les directives de l’OCDE préconisent la publication annuelle d’un rapport qui couvre les indicateurs de performance financiers. En somme, le pays a encore du chemin à parcourir en matière de gouvernance des entreprises publiques.

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