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Les actions communautaires aident le Niger à faire face aux crises

14 juin 2010


LES POINTS MARQUANTS
  • Face aux inondations, aux sécheresses et à la crise alimentaire qui frappent les Nigériens, le programme d'action communautaire apporte une assistance immédiate aux populations.
  • Grâce à des petits dons en capital, les paysans achètent des engrais, les femmes créent des petits commerces, les communautés bâtissent des salles de classe et des dispensaires.
  • Dans un contexte d’insécurité alimentaire croissante, le programme a pour objectif la création de 136 banques céréalières sur l’ensemble du Niger.

Le 14 juin 2010 – Dans la nuit du 1er au 2 septembre 2009, un torrent d’eau s’est abattu sur la ville d'Agadez, au Niger. À l’origine de ce déluge, une pluie exceptionnelle dans cette zone désertique, en particulier durant la saison sèche, à laquelle se sont ajoutées les eaux de ruissellement se déversant des montagnes du nord. L‘inondation a dévasté les maisons en terre crue, emporté le bétail et submergé les jardins maraîchers.

Elle a surpris les habitants d'Agadez en pleine nuit. Comme Malassane Boungoudou, qui a dû empiler trois lits les uns sur les autres pour y mettre ses enfants à l’abri. Elle a fui sa maison lorsque les murs ont commencé à céder. Avec sa famille, elle a passé les deux mois qui ont suivi dans un garage prêté par un proche. Le traumatisme était trop grand pour qu’ils puissent rentrer chez eux.

Le programme d'action communautaire de la Banque mondiale (PAC), déjà actif à Agadez avant les inondations, a apporté aux villageois une assistance immédiate. Les responsables communaux se sont réunis pour évaluer les besoins et ont reçu, avec l’appui du PAC, des pompes, du bétail, des semences, des engrais et des outils.

Les habitants se sont bénévolement investis dans le projet en aidant à replanter, à rebâtir le système d'irrigation, à renforcer les digues et construire de nouvelles clôtures. Grâce au rétablissement de l'irrigation, les femmes ont pu créer des jardins communautaires et y cultiver des produits de base qu'elles se partagent pour nourrir leurs familles.

Parmi les autres actions mises en place, le groupe d'entraide féminin Alhéri Mai Yawa utilise des fonds autorenouvelables pour reconstituer les biens perdus lors du désastre. Ces fonds permettent aux femmes de vendre des épices et d’entreprendre des activités de couture, ce qui apporte des revenus réguliers à leurs familles.

Comme le résume le maire de l’une des communes rurales concernées, « ce programme a redonné courage et vie à notre communauté ».

Les communautés locales décident elles-mêmes de leurs priorités de développement

Lancé en 2003, le PAC couvre les deux-tiers des gouvernements locaux (communes) du Niger et renforce leurs capacités à concevoir et à mettre en œuvre des plans de développement grâce à des petits dons en capital. Il permet de développer les moyens de subsistance des populations et d’ « amorcer la pompe » de la décentralisation.

Cofinancé par le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et le Fonds international pour le développement agricole (FIDA), ce programme participe également à la lutte contre la dégradation des terres et promeut leur gestion durable.

Le principe du PAC est le suivant : ce sont les conseils communaux – qui comptent au minimum deux femmes dans leurs effectifs – qui définissent les plans de développement communaux (PDC) orientant les investissements. À partir des besoins et des priorités exprimés par les villageois eux-mêmes, les conseils brossent un cadre de travail et planifient les ressources ; celles-ci proviennent de sources variées, y compris les bénéficiaires eux-mêmes – sous la forme d’une contribution financière ou, le plus souvent, d’un travail gracieux.

« La tâche est rude, mais les populations n'hésitent pas à s’y investir, car elles savent que c'est pour leur propre bien », explique un responsable communal d'Agadez.

Selon ce processus d’appropriation, les villageois se mettent d'accord sur la liste de projets à mettre en œuvre, avec l'appui d'experts techniques locaux employés par les services décentralisés des ministères nationaux.

« Le PAC fonctionne bien car il tire le meilleur des compétences locales et qu’il repose sur la fierté que les populations ressentent à prendre elles-mêmes en charge leurs processus de développement », analyse Daniel Sellen, responsable pour la Banque mondiale de la coordination des projets du PAC à Abidjan, en Côte d'Ivoire.

« Ce sont les communautés locales elles-mêmes qui expriment leurs besoins, trouvent des solutions, gèrent l'argent, fournissent les services nécessaires et mettent en œuvre les microprojets. Elles n'avaient jamais fait cela auparavant, et elles s’en sortent remarquablement bien ».

Les communautés nigériennes ont utilisé les ressources du PAC pour de nombreux types de projets. La première phase a vu la construction de 322 salles de classe destinées à 15 000 élèves, la mise en place de 153 centres d'alphabétisation bénéficiant à 6 000 adultes et de dispensaires offrant des soins de base à une population de 300 000 personnes, ainsi que des puits assurant à 170 000 personnes un accès à l’eau potable.

De plus, le PAC a financé plus de 1 000 microprojets générateurs de revenus dans les secteurs de l'agriculture, de la pêche et de l’élevage. On estime que ces projets ont bénéficié à 100 000 personnes, dont 80 % de femmes.

Le prochain défi : la lutte contre les sècheresses

À travers le PAC, la Banque s'attaque également à la question des risques climatiques au Niger. En dépit l'inondation qui a frappé Agadez en 2009, les précipitations sont de plus en plus faibles dans toute la région du Sahel et le Sahara gagne du terrain. Le Niger est peut-être le pays du monde le plus exposé aux risques de désertification.

Le PAC bénéficie des financements du FEM afin de réduire la dégradation des sols et de promouvoir leur gestion durable. Grâce à ces financements, la productivité agricole, la couverture végétale et la séquestration du carbone ont progressé, alors que la sédimentation des cours d'eaux a, elle, baissé. Durant la première phase du projet, près de 9 000 hectares de terres agricoles ont été cultivées selon des technologies de gestion durable des sols, ce qui a permis de réduire l'érosion hydrique sur 88 % des sites.

Le Niger fait aujourd'hui face à une nouvelle sécheresse, et l'insécurité alimentaire atteint un niveau alarmant. La campagne agricole 2009 a été mauvaise et a entraîné un important déficit céréalier dans l'ensemble du pays, plaçant de nombreux ménages dans des conditions très critiques.

Les communes se sont tournées vers le PAC pour obtenir une assistance et des financements pour les banques de céréales. Le CAP et le Programme alimentaire mondial (PAM) ont récemment signé un accord permettant de mobiliser 1 million de dollars et de mettre en place 136 banques céréalières dans 48 communes. Avec ce financement, les banques ont pu acquérir 1 360 tonnes de millet et de riz, construire des entrepôts et former des responsables locaux.

« Le PAC a été conçu pour dynamiser le développement local mais, alors que ce projet décentralisé concernent presque deux tiers des communautés du Niger, nous nous sommes rendus compte que nous disposions d'une plateforme performante qui nous permettait de répondre rapidement aux situations d'urgence », explique Amadou Alassane, responsable de projets pour la Banque mondiale à Niamey, la capitale du Niger.

« Dans un environnement fragile comme le Niger, et comme nous avons pu le voir avec les inondations d'Agadez, les priorités des populations démunies peuvent changer d'un jour à l'autre. Ce projet permet de mobiliser rapidement des fonds et une assistance technique pour répondre aux priorités à mesure qu'elles se présentent. »


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