ARTICLE

Questions/réponses à Abha Joshi Ghani, responsable du développement urbain de la Banque mondiale

12 mai 2010


Le style de vie urbain est un facteur clé du réchauffement climatique. En revanche, les villes offrent également le meilleur moyen de le ralentir, d'après le Little Green Data Book 2009 (pdf) (a), publié le mois dernier lors de la 17ème séance de la Commission des Nations Unies sur le développement durable.La responsable du développement urbain de la Banque mondiale Abha Joshi Ghani passe en revue certains défis que doit relever notre monde dont l’urbanisation est rapide, et offre une vision de la ville modèle du futur.

Quelle est l’importance du problème de pollution posé par les villes ?

Les villes consomment 70 % de l’énergie et des ressources de la planète, à l’image du charbon, du pétrole et du gaz naturel, qui sont les principales causes d’émissions de gaz à effet de serre. Elles consomment également plus de 80 % des produits agricoles et du bois cultivés en zones rurales. Mais il s’agit du style de vie consumériste des résidents, et non les villes elles-mêmes, qui contribue à la pollution. À noter que les personnes qui vivent dans les centres urbains ont tendance à utiliser moins de ressources et génèrent moins de déchets que leurs voisins suburbains. À titre d’exemple, un résident de la ville de New York produit environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre des émissions d’un résident d’une ville plus étalée telle que Denver.

Est-ce une option de décourager la croissance des villes ?

Non. Avec plus de la moitié du PIB généré par les villes, l'avenir économique de la plupart des pays en voie de développement sera déterminé par la productivité de ces populations urbaines en croissance. On constate également une reconnaissance croissante de l’impact de l’urbanisation sur la réduction de la pauvreté. Par ailleurs, les villes peuvent contribuer à un style de vie qui conjugue qualité de vie élevée et consommation minimale de ressources. Avec leur forme compacte, les villes sont beaucoup plus efficaces à proposer leurs services tels que l’eau, le système sanitaire et l’hébergement. En outre, il n’est pas vraiment possible de décourager la croissance des villes. Les gens souhaitent déménager vers les villes. Les pays qui ont essayé de ralentir ce mouvement ont rarement réussi.

Dans la manière actuelle dont fonctionnent les villes, qu'est-ce qui dysfonctionne ?

Les pratiques actuelles de conception et d’aménagement des villes sont ancrées dans le 19ème siècle. Ces modèles du 19ème siècle, extrêmement efficaces à leur époque, ne sont plus la meilleure solution, et font même aujourd'hui partie du problème. Le monde est aujourd’hui beaucoup plus peuplé et complexe et nécessite des solutions plus efficaces, de plus long terme afin de desservir les zones urbaines.

Quelle est la ville idéale du futur ?

La ville idéale du futur offre un style de vie concis et très compact. Il s’agit d’une ville qui optimise son potentiel de croissance en créant des emplois. En parallèle, elle offre une bonne qualité de vie, de bons niveaux de vie et des services tels que l'eau, les systèmes sanitaires, l'assainissement et le transport. Il s’agit également d’une ville moins consumériste, bien gérée, financièrement solide, et une ville respectueuse de l’environnement, inclusive et bien gérée. En bref, une ville durable.

Comment les villes peuvent-elles devenir plus écologiques et durables, tout en jouant un rôle vital de moteur de la croissance économique et un facteur clé de la réduction de la pauvreté ?

Beaucoup de choses dépendent du type de systèmes de transport public en place, des mesures d’efficacité énergétique entreprises, des politiques appliquées, du type de logement mis à la disposition des citoyens, notamment les pauvres. Est-elle favorable aux piétons ? Les gens doivent-ils parcourir une longue distance pour se rendre à leur travail ?

Certaines villes construisent actuellement des artères principales. Un système de transport important est comme un système squelette qui peut durer plus de 100 ans. Si vous n’avez pas conscience du type de transport public que vous mettez en place, plus la ville s'étend, plus l’encombrement des routes sera important. Plus les gens sont riches, plus ils souhaitent conduire. Dans ce contexte, il est difficile pour une ville de devenir une ville plus durable.

Cela dit, de nombreuses options s’offrent aux villes. Si la plupart d’entre elles sont spécifiques à chacune, leur point commun est de préparer l’avenir. L’avenir réservera de nombreux changements, et les villes qui résistent seront capables de mieux réagir aux défis de demain. Cela passe notamment par des communications efficaces et respectueuses entre les fonctionnaires de la ville et la communauté. Privilégier la redondance des infrastructures clés est également important. Les niveaux de pollution doivent être suffisamment faibles et la pollution bien gérée pour que l'écosystème local et mondial s'en accommode. Le développement durable a généralement pour objectif d'offrir un environnement sain à l'ensemble des résidents, notamment les plus vulnérables.

Certaines villes sont-elles trop bien établies pour changer ?

Je pense qu’il est difficile pour une ville de se réinventer d’elle-même, car certains maillons de la chaîne ADN d'une ville la manière dont elle s'est développée au cours des 60, 70 dernières années demeureront toujours à la même place. Mais elles peuvent déterminer la manière dont elles se développent à mesure de l’arrivée de nouveaux habitants, et la manière dont elles souhaitent réhabiliter les zones qui nécessitent une revitalisation. En outre, les villes sont organiques, elles évoluent constamment et se renouvellent.

Quel est le programme Eco2 de la Banque mondiale et quel est son intérêt ?

« Eco2 Cities : Villes écologiques et villes économiques » est un nouveau programme qui permet d’aider les villes des pays en voie de développement à atteindre la durabilité écologique et économique. Le programme offrira aux villes un support pratique et évolutif, analytique et opérationnel. Le programme a également pour objectif de construire un partenariat entre les villes prévisionnelles des pays en voie de développement, les villes mondiales qui adoptent les meilleures pratiques, le monde universitaire, les communautés de développement international.

Quelques exemples de succès

Certaines des villes que nous examinons sont Yokohama au Japon, Curitiba au Brésil, Barcelone en Espagne, Bogota en Colombie, et la vieille ville de Stockholm baptisée Hammarby.

Ces villes ont mis en place des transports publics plus efficaces métro et bus rapides et des espaces verts. Elles sont parvenues à réduire leur consommation d’énergie par un éclairage plus efficace des rues et des immeubles et une gestion plus efficace des services aux collectivités. Elles ont mis en place des pistes cyclables et encouragé les gens à circuler à vélo. Il existe presque toujours quelques quartiers au sein des grandes villes qui sont un peu plus avancés que le reste de la ville. On trouve de bons exemples quasiment partout. Plus important encore, certaines villes commencent juste à se développer et elles ont le potentiel de se développer de manière durable en gérant prudemment leurs ressources.

 

 


Api
Api

Bienvenue