DISCOURS ET TRANSCRIPTIONS

« Guinea is Back »

24 novembre 2013

Makhtar Diop, Vice President for Africa Conférence des Partenaires et des Investisseurs Privés de la Guinée Abu Dhabi, Émirats arabes unis

Tel que préparé pour l'allocution

Excellence Monsieur le Président de la République de Guinée

Excellence Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères des Emirats Arabes Unis

Mesdames et Messieurs Distingués Invités et Participants en vos rangs et qualités

C’est un plaisir d'être ici, à Abu Dhabi, pour prendre part, au côté d’éminentes personnalités, à cette importante conférence des partenaires pour le développement de la Guinée. Le thème de cette conférence « Guinea is back » est révélateur, Monsieur le Président, de votre volonté à la fois de surmonter des années de mauvaise gouvernance et paupérisation de la Guinée, et de situer votre pays sur une trajectoire de prospérité partagée et développement durable.  Je veux ici vous assurer du soutien du Groupe de la Banque mondiale pour la réalisation de ce dessein.

Cette Conférence se tient à un moment crucial pour l’Afrique et à une période charnière pour la Guinée.  C’est pourquoi je suis heureux de pouvoir partager avec vous, ma vision pour l’Afrique et l’objectif du soutien de notre institution à la Guinée dans les secteurs porteurs de croissance, notamment l’énergie, l’agriculture et le renforcement des capacités.

Nous le savons tous, les économies africaines connaissent une période de croissance sans précédent.  En 2012, le taux de croissance du Produit Intérieur Brut en Afrique subsaharienne, hormis l’Afrique du Sud, a été de près de 6 pour cent, confirmant la tendance observée les années antérieures.

Même s’il est indéniable que les matières premières, principal produit d’exportation des pays africains, ont joué un rôle moteur dans cette performance, les améliorations observées ces dernières années en matière de gouvernance et de gestion macroéconomique à travers le continent, ont été, elles aussi, essentielles.  Différentes hypothèses soutiennent en effet que le renforcement de la gestion macroéconomique du continent a été un facteur clé pour la forte croissance économique.  En 2011, 13 pays ont enregistré une augmentation significative selon l’indice de la Banque mondiale notant la performance des politiques et institutions du pays (CPIA), contre seulement cinq pays qui ont malheureusement régressé.   Notre analyse soutient que chaque hausse de 0,1 point se traduit en moyenne, selon l’indice du CPIA d’un pays, par une augmentation de la croissance d'un quart de point, ce qui est loin d’être négligeable.

Aussi forte qu’elle soit, cette croissance doit être soutenue, renforcée, redistribuée de façon équitable, et diversifiée pour être plus résiliente aux chocs divers, qu’ils soient dû à la volatilité des prix des matières premières ou aux effets du changement climatique. Aussi, à travers des programmes transformateurs et l’accès à des financements innovants, mon ambition est-elle de soutenir les pays africains à réaliser un accroissement significatif des produits manufacturiers et des services, pour créer plus d’emplois et lutter contre la pauvreté.  L’amélioration de la productivité agricole jouera, à cet égard, un rôle essentiel. Pour 2021, 15 pays, au lieu de 8 actuellement, devraient pouvoir enregistrer un taux de croissance moyen d’au moins 5 pour cent de leur PIB agricole.

Mon objectif est aussi d’accompagner l’Afrique sub-saharienne à doubler sa part dans le commerce mondial pour atteindre 8 pour cent, en concentrant nos efforts sur la mise en place d’une infrastructure régionale intégrée offrant des services à des coûts compétitifs.

Tous ces efforts seront cependant vains, si nous ne réglons pas la question énergétique. Vous comprendrez alors que je place cette problématique au cœur de ma vision pour l’Afrique.  Accroitre l'accès de nos populations et nos économies  à des services énergétiques modernes, efficaces et à moindre coût sera, de facto, l’indicateur clé de performance des politiques publiques et des programmes que nous soutiendrons.

En ce qui concerne la Guinée, je voudrais tout d’abord saluer les progrès considérables enregistrés ces deux dernières années en matière de stabilisation économique. Votre pays, Monsieur le Président, a réussi à émerger de l'isolement politique, de l'instabilité et de la gestion militaire par un processus politique qui a permis l’adoption d’une nouvelle constitution, l’élection d’un Président et, tout récemment, d’un parlement. La Guinée a aujourd’hui pleinement réintégré la communauté internationale, et a entrepris des réformes courageuses  notamment dans le secteur de la sécurité. La stabilité macro-économique a été rétablie, et la viabilité de la dette s’est considérablement améliorée, avec l’atteinte du point d’achèvement de l’Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) en septembre 2012.  En mai 2013, le gouvernement a approuvé un troisième document de stratégie de réduction de la pauvreté pour la période 2013-2015 autour de quatre grandes priorités qui sont: (i) la restauration de l’Etat de droit et la réforme de l’administration publique; (ii) l’accélération et la diversification de la croissance ; (iii) le développement des secteurs sociaux ; et (iv) la réduction des disparités régionales à travers la promotion du développement à la base et la décentralisation.

« Guinea is back », mais, et pour rester dans l’anglicisme, quels sont les « game changers »  pour donner un contenu et assurer la durabilité de ce programme?

Le scénario de croissance accélérée envisagé dans la politique économique du gouvernement à moyen terme (2013-2015) expose les politiques que doit mettre en œuvre la Guinée pour réaliser son ambition d’émergence économique à l’horizon 2035. C’est le scénario d’une croissance forte et durable à 7,1% par an en moyenne, soutenue, entre autres, par des politiques ambitieuses de modernisation agricole et de mise en valeur des potentiels miniers et hydrologiques du pays.

Ainsi, l’analyse de l’ensemble des secteurs productifs montre  des opportunités considérables qui doivent être exploitées judicieusement.  A cet égard, trois domaines me paraissent mériter une attention particulière. Nous devons nous concentrer sur le sous-secteur de l'hydroélectricité qui constitue un levier important pour la modernisation de la Guinée, du fait de son impact sur le développement des autres secteurs et sur les ressources de l’Etat.  Avec plus de 6000 mégawatts, le potentiel hydroélectrique de la Guinée doit en faire un important exportateur d'énergie vers les pays voisins.  À terme donc, la Guinée devrait passer progressivement de la production d'énergie thermique à l'hydroélectricité comme source principale de production (y compris pour le marché minier) et devenir une «power house » énergétique.

 Le Groupe de la Banque mondiale est fermement engagé à soutenir la Guinée dans le développement de son important potentiel hydroélectrique, notamment à travers la poursuite de son appui au plan de redressement de l’Électricité de Guinée (EDG) et le développement du barrage hydroélectrique de Souapiti. 

Nous devons aussi porter une attention soutenue à l’agriculture pourvoyeuse d’emplois et dont la contribution à la croissance et à la réduction de la pauvreté est essentielle. Ceci est particulièrement vrai pour un pays dont 70% de la population vit dans les zones rurales qui concentrent aussi 90% des personnes les plus pauvres. La mise en valeur de cet énorme potentiel pose un défi considérable.  Le secteur est marqué par une très faible productivité, une prépondérance de l'agriculture de subsistance et des petites exploitations familiales. Les technologies et les capitaux nécessaires à l’agriculture intensive demeurent inaccessibles. 

Aussi, est-il impérieux de mettre en place des politiques courageuses et favorables à l’investissement privé, tant national qu’international, et de promouvoir un cadre propice au partenariat public - privé.  Un tel modèle pourrait aussi être appliqué aux autres sous-secteurs du développement rural que sont l’élevage et la pêche, deux créneaux importants pour la diversification économique. 

Le Groupe de la Banque mondiale appuie déjà le secteur agricole à travers deux projets financés en partenariat, l’un avec l’Espagne et le second avec le Japon. Nous envisageons aussi la mise en œuvre de trois programmes supplémentaires dans le cadre de notre nouvelle stratégie 2014-2017.

L’agenda de transformation des deux secteurs que je viens de présenter, à savoir l’énergie et l’agriculture, doit reposer sur le socle du renforcement de son capital humain et s’inscrire dans une perspective sous régionale.

Le système éducatif national doit équiper les jeunes guinéens avec les compétences qui leur permettront de répondre aux besoins d’une économie dont les principales sources de croissance  sont l’agriculture, les mines et le tourisme.  À cet égard, la Banque mondiale intensifiera ses efforts pour promouvoir non seulement une expansion du système d’éducation et de formation, mais aussi, et surtout, pour en renforcer la qualité et la pertinence.

 Nous  venons de conduire, conjointement avec la Guinée, une évaluation globale des compétences  ainsi qu’une revue de l’offre éducative. Les conclusions de ce travail servent actuellement à la préparation d’un projet de développement des compétences pour l’employabilité des jeunes,  financé par la Banque mondiale.

Enfin, les synergies sous régionales doivent être le troisième domaine de concentration car elles sont tout aussi primordiales pour lever les obstacles à la croissance de la Guinée. La Guinée a la possibilité d’optimiser sa position stratégique et ses ressources pour se positionner comme un acteur majeur en Afrique de l’Ouest, et transformer ainsi son potentiel au profit de tous les Guinéens et des populations de la sous-région.  Cette approche ambitieuse exige des investissements adaptés dans l'infrastructure et un partenariat gagnant-gagnant  avec le secteur privé. Le Groupe de la Banque mondiale dispose de moyens pour fédérer d’autres partenaires publics et privés, pour permettre à la Guinée de devenir un acteur incontournable de l’intégration ouest-africaine.

Avant de terminer, je voudrais revenir sur l’impératif de la poursuite des réformes, de la bonne gouvernance et de la transparence budgétaire.  La consolidation des acquis récents en matière de stabilité macroéconomique  contribuera à renforcer les progrès réalisés et réduire le fossé des inégalités, toujours sources de tensions sociales.  La Guinée ne peut pas faire l’économie d’une telle exigence si elle veut éviter d’intégrer le lot des pays africains, riches en ressources naturelles mais fortement endettés et avec des populations très pauvres.

Une année après l’atteinte du Point d’achèvement du PPTE, je souhaite que l’espace budgétaire qui en a résulté, combiné aux revenus du secteur minier et des autres secteurs productifs, puissent se traduire, pour la Guinée,  par un relèvement significatif du niveau de vie des populations et par l’accélération du processus de développement économique et social du pays.  Une analyse récente de la Banque mondiale a montré que huit des pays africains qui ont bénéficié de l’initiative PPTE, ont vu le ratio de leur dette publique par rapport au PIB atteindre un tiers du niveau d’endettement d'avant le PPTE en quatre ans. D'autres ont fait mieux et j’espère que la Guinée sera parmi eux.  Le principal défi ici est de construire des institutions fortes, crédibles et responsables pour éviter les pièges d’une dépense publique sous-productive.

En conclusion, permettez- moi de féliciter de nouveau les autorités guinéennes pour cette initiative et souhaiter plein succès à la conférence.

Je vous remercie.


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Phil Hay
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