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Journée internationale de la femme : 2015, « l’année de l’action »

05 mars 2015

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Des progrès significatifs, notamment dans la scolarisation des filles, doivent se poursuivre pour que filles et garçons bénéficient d'opportunités égales à salaires égaux.

Scott Wallace / Banque mondiale


WASHINGTON, 6 mars 2015 – Selon la directrice principale du pôle Genre et égalité des sexes du Groupe de la Banque mondiale, 2015 sera « l’année de l’action » sur ce front, une année charnière marquée par l’entrée en vigueur de nouveaux objectifs mondiaux contre la pauvreté et par le 20e anniversaire de l’adoption d’un programme d’action historique pour la promotion de la femme.

« Nous avons accompli de grandes avancées dans certains domaines, comme par exemple l’élimination des disparités entre filles et garçons dans l’accès à l’éducation primaire », rappelle Caren Grown, qui signale également « des progrès sur le plan de la scolarisation au cycle secondaire et de l’achèvement des études », de même qu’un recul significatif de la mortalité maternelle dans un certain nombre de pays.

Mais, souligne-t-elle, « il existe des domaines importants où les progrès n’ont pas été au rendez-vous, en dépit d’un contexte de croissance économique soutenue et malgré l’introduction de réformes stratégiques. C’est en particulier le cas de la participation des femmes à la vie économique, qu’il s’agisse de leur situation sur les marchés du travail ou des droits de propriété et de contrôle exercés sur des actifs productifs tels que la terre et le logement ».

Il est temps à présent de transformer les cibles et les promesses des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et du Programme d’action de Beijing « en résultats qui aboutissent effectivement à autonomiser les femmes et à résorber les écarts qui les séparent des hommes » à travers le monde.

« Pour ceux d’entre nous qui travaillent sur ces questions, 2015 est l’année de l’action », assure Mme Grown. « Je souhaite que nous changions de perspective : il n’est plus temps de dire pourquoi l’enjeu est important, il faut aujourd’hui se demander comment on va y arriver. »

Alors que les États du monde entier vont se réunir cette année pour adopter les nouveaux « objectifs de développement durable » qui succèderont aux OMD, force est de constater que les cibles concernant la santé et la promotion des femmes figurent parmi les indicateurs les plus à la traîne.

Cette année marquera également le 20e anniversaire de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, qui a débouché sur un programme d’action historique. Le 27 février dernier, à l’occasion d’un voyage officiel au Chili, le secrétaire général des Nations Unies est revenu sur le Programme d'action de Beijing, en affirmant qu’il constituait à ce jour le principal « cadre international en matière d'égalité des sexes et d'autonomisation des femmes ». Vingt ans plus tard, constate Ban Ki-Moon, « des progrès importants ont été accomplis mais ils restent néanmoins lents et inégaux ».

Les victoires considérables obtenues sur le front de la scolarisation des femmes ne se reflètent pas encore sur d’autres plans, comme l’égalité des salaires et des chances économiques, et la liberté de prendre des décisions qui concernent leur propre existence, leur santé, leur activité professionnelle. Dans le monde entier, les filles et les femmes sont assujetties à des lois et des coutumes discriminatoires qui les entravent (a) et ont pour conséquence de brider leur productivité. Ces contraintes se payent cher, puisqu’elles se chiffrent en coûts d’opportunité pour les femmes elles-mêmes mais aussi pour leur famille et pour l’économie de leur pays.

Mme Grown a rejoint le Groupe de la Banque mondiale en septembre dernier, afin de devenir la directrice principale du nouveau pôle Genre et égalité des sexes, et après avoir été en résidence à l’American University, où elle a codirigé un programme axé sur l’analyse de genre en économie. Elle a signé ou dirigé la publication de six ouvrages, et travaillé pour l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) en tant que conseillère sur les questions de genre et coordinatrice par intérim des travaux sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.



« Pour ceux d’entre nous qui travaillent sur ces questions, 2015 est l’année de l’action. Je souhaite que nous changions de perspective : il n’est plus temps de dire pourquoi l’enjeu est important, il faut aujourd’hui se demander comment on va y arriver.  »
Caren Grown

Caren Grown

Directrice du pôle Genre et égalité des sexes, Groupe de la Banque mondiale


Pour pouvoir lutter efficacement contre les inégalités hommes-femmes et venir à bout des disparités tenaces, il faut, selon elle, actionner plusieurs leviers de transformation : créer des emplois pour les femmes, en plus grand nombre et de meilleure qualité ; garantir leurs droits à la propriété (foncier, logement, actifs, entreprises) ; s’attaquer aux violences dont elles sont victimes ; élargir leur accès aux services bancaires et financiers ; et, enfin, mesurer et prendre en compte le travail non rémunéré associé à l’économie domestique, dans laquelle les femmes, dans le monde entier, occupent une place prépondérante.

« Les écarts de salaire selon le sexe sont un fait économique, au même titre que les impôts ou la dette publique. Et nous n’arrivons pas à les résorber », analyse Mme Grown, en expliquant que l’une des raisons de cette situation tient au fait que les femmes et les hommes sont orientés vers des types d’emplois différents, selon un processus de ségrégation : « Nous devons vraiment nous pencher sur le fait que les femmes sont cantonnées au bas de l’échelle des emplois. »

Et de souligner qu’il est également indispensable d’impliquer les hommes dans cette lutte, sachant que l’égalité des sexes « leur profite aussi ».

Le rôle clé des données et des quantifications

La « chercheuse » Caren Grown s’intéresse aussi à la mise au point de nouvelles méthodes pour mesurer la pauvreté, non pas au niveau des ménages, mais à l’échelon plus fin des individus, ce qui permettrait de savoir plus précisément combien de femmes dans le monde sont pauvres et pourquoi.

Celle qui a été parmi les premiers à défendre la nécessité d’accroître la quantité et la qualité des statistiques sur les femmes et les filles s’emploie aujourd’hui à développer les partenariats noués par la Banque dans ce domaine. L’enjeu de cette collaboration est de combler les lacunes de données sur le travail des femmes, leur emploi du temps, leur possession d’actifs, leur accès à des ressources comme les technologies ou les engrais, ainsi que sur leur état civil, soit autant de connaissances qui pourront aider à mettre en évidence des amorces de piste pour lutter contre la pauvreté.

« Sur ce sujet des statistiques et de la nécessité de rendre visible tout le travail des femmes, nous avons un chantier immense devant nous ! », affirme Mme Grown.

« Nous devons d’abord augmenter la quantité de données disponibles sur le travail non rémunéré accompli par les femmes et procéder pour cela à des enquêtes sur l’emploi du temps et sur la population active. Un autre axe de travail nécessaire consistera à mesurer la production de subsistance, l’entrepreneuriat, ainsi que les actifs physiques et financiers possédés par les femmes et les hommes au sein des ménages ».

Et de conclure : « Je pense qu’à partir du moment où nous disposerons de données sur le temps consacré par les hommes et les femmes à des occupations diverses et, surtout, que nous serons en mesure de le valoriser, cela nous poussera à en faire plus ».



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