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Les jeunes ont besoin de grands programmes d’insertion au Moyen-Orient et Afrique du Nord

15 janvier 2011



Janvier 2011 – La région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord enregistre le taux de chômage des jeunes le plus élevé au monde (25 %). Une statistique qui à elle seule ne suffit pas à cerner le fond du problème.
Selon les chercheurs de la Banque mondiale, le nombre réel de chômeurs âgés de 15 à 29 ans pourrait s’avérer nettement plus élevé, de nombreux jeunes déscolarisés et sans activité professionnelle n’étant pas pris en compte dans les statistiques du fait qu’ils ne cherchent pas de travail.

Les jeunes hommes habitant les villes, notamment, sont très désavantagés sur le marché du travail, et nombre d’entre eux connaissent une situation de sous-emploi, travaillent au noir ou bien ne travaillent pas du tout.

« C’est un énorme problème qui n’a pas de solution simple », explique Gloria La Cava, chercheuse principale en sciences sociales et responsable des programmes jeunesse de la Banque mondiale pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), ainsi que du partenariat pour la jeunesse avec la Ligue des États arabes.

De nouvelles études sont en cours au Maroc, en Égypte et en Jordanie, qui s’efforcent de mettre au jour les grandes tendances de l’emploi et de l’intégration sociale chez les jeunes. Ce travail a nécessité la mise en œuvre d’approches pilotes, la collecte de données et le développement d’un nouvel instrument pour mesurer l’intégration des jeunes sur le marché du travail et dans la vie sociale.

Ces travaux de recherche ont montré que le chômage et le sous-emploi pénalisent fortement les jeunes, les contraignant souvent à attendre pendant plusieurs années avant d’obtenir un logement, pouvoir se marier et avoir des enfants. L’une des conséquences est un taux de mariage de seulement 50 % (le plus bas parmi les pays en développement) chez les jeunes hommes âgés de 25 à 29 ans.

La priorité : régler le problème du chômage

« Alors que le chômage a atteint des chiffres supérieurs à 10 % tout au long des dix dernières années ou presque, s’atteler à résoudre ce problème est le grand défi qui se pose aujourd’hui » : c’est dans ces termes que s’est exprimée Shamshad Akhtar, vice-présidente pour la Région MENA à la Banque mondiale, lors d’une conférence qui s’est tenue en Tunisie en octobre.

Et de mentionner les raisons expliquant la persistance de ce taux de chômage élevé : une croissance économique qui n’est pas à la hauteur du potentiel de la région, l’incapacité de la plupart des pays à saisir les nouvelles opportunités technologiques, une éducation de qualité médiocre en dépit des progrès remarquables accomplis dans les chiffres de la scolarisation primaire et secondaire, et l’inadéquation qui existe entre l’offre et la demande de compétences.

« Dans le monde actuel, la compétitivité repose sur l’existence d’entreprises qui emploient une main-d’œuvre formée et qualifiée sur le plan technique, capable d’adopter de nouvelles technologies et de vendre des articles sophistiqués – d’où l’importance cruciale de disposer de compétences cognitives de haut niveau, ainsi que de compétences non cognitives »,
a précisé Mme Akhtar.

Un intérêt grandissant pour les programmes jeunesse
 
Ce constat est l’une des raisons pour lesquelles le développement de programmes de services ou de volontariat pour les jeunes suscite un intérêt grandissant parmi les gouvernements de plusieurs pays de la région.

Comme l’explique Mme La Cava, les jeunes issus de milieux défavorisés et peu éduqués, tout particulièrement, auraient beaucoup à gagner de programmes qui favorisent la cohésion sociale et « qui leur permettent, en travaillant bénévolement et en se déplaçant dans d’autres régions du pays, d’améliorer leurs compétences professionnelles et leurs chances de trouver un emploi par la suite ».

De tels programmes, tout comme la formation professionnelle et les partenariats avec le secteur privé, pourraient aider à combler l’écart entre les compétences acquises à l’école et les besoins du marché du travail. Selon une étude récente, un tiers des entreprises estiment que leur croissance a été freinée par la pénurie de main d’œuvre adaptée.

C’est dans ce contexte que la Banque mondiale travaille aux côtés de la Ligue des États arabes, l’un des chefs de file régionaux de l’action en faveur de la jeunesse, pour initier des programmes en direction des jeunes, notamment dans le cadre du volontariat. L’octroi d’un don destiné à aider la Ligue et une série de pays à mettre en place ces programmes est en cours d’examen.

Une action qui s’inscrit dans le cadre de l’Initiative du monde arabe

Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une vaste opération menée par la Banque mondiale afin de mobiliser, dans l’ensemble de la Région MENA, les connaissances et les bonnes pratiques internationales et régionales. L’Initiative du monde arabe vise notamment à soutenir les jeunes, stimuler la création d’emplois et plus généralement aider ceux qui ont quitté l’école et sont sans emploi à trouver un travail et à devenir des membres de la société utiles et reconnus.

Si le taux de chômage moyen chez les jeunes s’élève aujourd’hui à environ 25 % au niveau régional (et jusqu’à 40 % dans certains pays), le problème pourrait s’aggraver considérablement dans les dix prochaines années, lorsque des millions de jeunes auront atteint leur majorité.

Pour pouvoir absorber l’arrivée de ces jeunes en âge de travailler, on estime que la région devra créer 50 millions d’emplois d’ici 2020. Aujourd’hui, déjà, on compte 100 millions de personnes âgées de 15 à 29 ans, soit environ un tiers de la population.

Viser des résultats à grande échelle
 
De plus en plus, les pays du monde arabe s’efforcent de trouver des solutions pour améliorer la qualité de l’éducation, stimuler l’innovation, et fournir aux jeunes des compétences adaptées aux besoins du marché.

C’est ce qu’illustre notamment la signature, en octobre 2010, de la Déclaration de Doha sur la qualité de l’éducation, par laquelle dix-huit États arabes se sont engagés à mettre en place un système qui permette d’évaluer les performances des écoles, des enseignants et des élèves, et de rendre les résultats publics.

Il peut s’agir aussi de trouver des moyens de réintégrer les jeunes démotivés dans le système scolaire et de renforcer leur participation dans la vie communautaire et sociale. L’Initiative nationale pour le développement humain mise en place au Maroc, par exemple, finance des programmes qui viennent en aide aux orphelins, aux enfants des rues et aux plus défavorisés.

Le Groupe de la Banque mondiale, y compris la SFI (Société fiancière internationale) et MIGA (L’Agence multilatérale de garantie des investissements), apporte son appui à un grand nombre de ces initiatives nationales sous la forme de financements, de conseils stratégiques et de travaux d’analyse. L’institution expérimente aussi des approches prometteuses – programme de formation professionnelle au Yémen ou Initiative pour les adolescentes récemment mise en place en Jordanie, par exemple – et vouées à être déployées pour en étendre la portée.

Au niveau régional, l’Initiative du monde arabe vise à réaliser les objectifs de développement sur une plus grande échelle en mobilisant les connaissances et les bonnes pratiques dans l’ensemble des pays de la région. L’un des aspects essentiels du programme consiste à promouvoir la coopération régionale grâce à des projets axés sur le commerce et les infrastructures (portant sur les routes et les énergies renouvelables, par exemple), afin d’augmenter les performances économiques de toute la région.

La Banque mondiale coopère avec la Ligue des États arabes en vue de favoriser le développement des infrastructures régionales, l’accès aux financements pour les micro, petites et moyennes entreprises qui créent des emplois et contribuent à la croissance économique, ainsi que le développement humain et la qualité de l’éducation (formation professionnelle incluse).

En visite au Yémen en décembre dernier, le directeur général de la Banque mondiale Mahmoud Mohieldin a exprimé sa conviction que « les pays arabes détenaient atouts et solutions dans leur sagesse collective et leurs efforts conjugués  ».

« Ensemble, nous pouvons nous y engager, et notre rôle à la Banque mondiale consiste à déterminer, en collaboration avec les nations arabes, comment nous pouvons être utiles, notamment dans les domaines du développement humain et des infrastructures, ainsi que de la finance et du secteur privé ».


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