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La révolution budgétaire de la Tunisie : de l’opacité à la transparence totale

23 décembre 2015



LES POINTS MARQUANTS
  • Un nouveau portail en ligne facilite le contrôle des dépenses publiques par les Tunisiens.
  • Il permet aux citoyens d’accéder directement aux données budgétaires du ministère des Finances.
  • Les Tunisiens peuvent ainsi s’assurer que leurs gouvernants dépensent judicieusement l’argent des impôts.

Avec la révolution politique de 2011, globalement pacifique, la Tunisie ne parlait plus que de « transparence », « bonne gouvernance », « accès à l’information », « engagement citoyen » et « inclusion ». Les organisations de la société civile (OSC) s’efforcent depuis de mettre ces concepts en pratique, en s’appuyant en autres sur une nouvelle loi garantissant l’accès à l’information mais aussi en sollicitant l’aide de la communauté des bailleurs de fonds.

La Banque mondiale a réagi en défendant des politiques et des instruments visant à créer un partenariat entre l’administration tunisienne et la société civile. Il s’agissait de permettre au pays d’atteindre plus facilement les normes du Partenariat pour un gouvernement ouvert, une initiative de la Banque mondiale qui incite les pouvoirs publics, partout dans le monde, à devenir plus transparents, responsables et attentifs aux attentes de leurs concitoyens dans l’objectif ultime d’améliorer la qualité de la gouvernance et des services à la population.

Même si l’idée de départ consistait à rendre publiques (ou « ouvertes ») les données financières sur les dépenses du gouvernement, le simple fait de les publier sur Internet n’a pas suffi à provoquer de véritable changement. Notamment parce que la plupart de ces données étaient difficiles à trouver ou à comprendre, exploiter et récupérer.

Et c’est là où la Tunisie se distingue des autres pays de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) : son portail pour la transparence budgétaire, baptisé « Mizaniatouna » (« Notre budget »), est l’un des acquis les plus précieux d’un processus de travail qui aura duré toute une année. Il sert en effet de point d’entrée unique à toutes les informations financières produites par le gouvernement tunisien depuis 2008, avec des données ventilées complètes, faciles à comprendre et totalement accessibles.

Le portail, consultable en arabe et en français, donne accès à des documents et des graphiques. Il permet aux gens de comprendre où va l’argent et comment le gouvernement dépense leurs impôts, de suivre l’évolution du déficit budgétaire et de la dette publique et de voir ce que coûtent concrètement les subventions publiques. La plateforme tourne grâce à BOOST, un outil conçu par la Banque mondiale, et est alimentée en grande partie grâce au système d’information ADEB (aide à la décision budgétaire) du ministère des Finances.

L’initiative BOOST, un effort collaboratif de la Banque mondiale lancé en 2010, vise à faciliter l’accès aux données budgétaires et favoriser leur utilisation pour améliorer la prise de décisions et la reddition de comptes. Une quarantaine de pays se sont convertis à cet outil qui permet de créer des plateformes conviviales où chercheurs, agents de l’État et citoyens peuvent trouver et consolider toutes les données sur les dépenses publiques. Ce faisant, la population sait comment les gouvernements financent les services publics.

Grâce au portail tunisien, les responsables gouvernementaux, les techniciens, les OSC et les équipes de la Banque mondiale ont pu satisfaire une demande grandissante parmi la population pour plus d’accès et de responsabilités. Le ministère des Finances et la Banque mondiale ont également intégré dans le projet un plan de communication et de formation en direction des médias, des OSC et des parlementaires. Grâce au soutien de l’Initiative mondiale sur la transparence des finances publiques (GIFT), les OSC ont bénéficié d’un accompagnement pour exploiter les données. Et pour susciter la curiosité du public et faire connaître l’initiative, une vidéo avec infographie a été conçue avec le ministère des Finances parallèlement à un tutoriel pour toutes les personnes intéressées.

« Voir la Tunisie passer d’un régime parmi les plus opaques de la région à un statut de pionnier en matière de transparence budgétaire est une expérience particulièrement gratifiante », souligne Fabian Seiderer, spécialiste senior de la gestion du secteur public à la Banque mondiale. « C’est l’occasion pour les citoyens de s’impliquer davantage afin d’améliorer la transparence et la responsabilité des principaux programmes et services publics. »

Dans la Tunisie d’après la révolution, les concepts de « transparence », « bonne gouvernance », « accès à l’information », « engagement citoyen », « responsabilité » et « inclusion » sont plus que des slogans. Ils évoquent des mécanismes concrets au service des citoyens qui, espérons-le, renforceront progressivement la confiance vis-à-vis du gouvernement.



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