L'économie congolaise a maintenu une expansion modérée en 2024, avec une croissance du PIB réel de 2,6 %, portant le revenu réel par habitant à la hausse pour la première fois depuis 2016. Toutefois, cette amélioration ne s'est pas encore traduite par une réduction significative du taux de pauvreté. L'agriculture a progressé grâce à des politiques de contenu local promouvant les intrants agricoles nationaux pour les industries agroalimentaires, tandis que l'industrie manufacturière a bénéficié de l'augmentation des exportations en raison de la hausse de la demande sur les marchés régionaux. Pourtant, la production pétrolière a chuté en raison de problèmes techniques et de la baisse des prix, soulignant la fragilité de la croissance liée aux hydrocarbures et le besoin urgent de diversification.
Cette diversification embryonnaire ne s'est pas encore traduite par un emploi généralisé. Les entreprises non pétrolières ont affiché une forte croissance moyenne de leurs revenus de 11 %, mais l'emploi n'a progressé que de 3 %. La faible élasticité de l'emploi reflète des défis structurels liés à un environnement des affaires peu fiable, en particulier à une alimentation électrique peu fiable et à un accès limité aux financements, qui alourdissent les coûts, freinent la croissance des entreprises et freinent la création d'emplois.
Sur le front budgétaire, l'État a amélioré la mobilisation des recettes malgré la baisse des recettes pétrolières. Les recettes totales ont atteint 25,1 % du PIB en 2024 (contre 24,3 % en 2023), soutenues par des gains fiscaux non pétroliers, une application plus stricte (notamment des droits de douane et de la TVA pour les importations de carburant), des droits d'accise plus élevés et les premières entrées de fonds provenant des ventes de gaz. Cependant, les dépenses ont grimpé à 22,4 % du PIB (contre 20,7 % en 2023), sous l'effet de l'augmentation des paiements d'intérêts intérieurs et des transferts sociaux, ce qui a réduit l'excédent budgétaire.
Bien que la dette du Congo diminue, l'augmentation des risques de liquidité appelle à une gestion plus rigoureuse de la dette et de la trésorerie. Le ratio dette/PIB est passé de 103,6 % en 2020 à 93,6 % en 2024, mais la part intérieure a augmenté, accentuant les pressions sur le refinancement et les liquidités. Le service de la dette sur le marché régional a absorbé environ la moitié des recettes budgétaires à la fin de 2024, ce qui a entraîné des arriérés, des coupes dans les dépenses et le lancement par le gouvernement d'un plan de reprofilage de la dette (PNOT).
La croissance devrait s'établir à 2,8 % en 2025, avec une légère reprise en 2026-2027. Un environnement mondial incertain, des conditions financières plus restrictives et une baisse séculaire de la demande et des prix du pétrole mettront à l'épreuve la résilience budgétaire et extérieure. Le maintien d'un excédent budgétaire de 3 % nécessitera un assainissement substantiel des dépenses parallèlement à la poursuite des gains de recettes non pétrolières. La dette devrait diminuer progressivement, sous réserve de la rigueur des emprunts et de l'amélioration de la gestion de la trésorerie et des risques.
Si ces tendances à court terme sont importantes, il est tout aussi essentiel de préserver et de diversifier la richesse nationale du Congo sur le long terme, c'est-à-dire comment sa population, sa nature et ses infrastructures contribuent à des progrès durables. La richesse totale du Congo a presque doublé entre 1995 et 2020, ancrée dans le capital humain (39 %) et le capital naturel (38 %), le capital produit (23 %) étant stimulé par d'importants investissements pendant la période de boom pétrolier. Mais la richesse par habitant a diminué en raison de l'insuffisance des investissements dans le capital humain, de la dégradation du capital naturel, conjuguée à une croissance démographique rapide.
Les forêts, qui couvrent plus de 69 % de la superficie du pays, stockent environ 16 milliards de tonnes de carbone et fournissent des services écosystémiques essentiels. Pourtant, ces forêts sont menacées : le pays a perdu 1,9 % de son couvert forestier entre 2000 et 2020, et la biodiversité a diminué. Le renforcement de la gouvernance forestière, la mise en œuvre de la traçabilité numérique des produits forestiers, l'augmentation de la transformation locale du bois et le renforcement des capacités d'accès aux marchés du carbone pourraient créer des emplois, débloquer des financements climatiques et promouvoir la conservation.
Enfin, le capital humain reste essentiel à la prospérité à long terme. Les dépenses de santé et d'éducation ont fluctué avec les cycles pétroliers, ce qui a limité l'amélioration des résultats d'apprentissage et de santé ainsi que la productivité globale. La stabilisation et la hiérarchisation des dépenses sociales, l'amélioration de la qualité de l'éducation et l'élargissement de l'accès à l'éducation (y compris l'EFTP aligné sur la demande de main-d'œuvre) sont essentiels pour renforcer la résilience, réduire la pauvreté et faire en sorte que la croissance non pétrolière se traduise par de meilleurs moyens de subsistance.
Recommandations principales :
- Renforcer la viabilité budgétaire et la gouvernance de la dette en stimulant la mobilisation des recettes non pétrolières, en rationalisant les dépenses non essentielles, en renforçant la capacité du Fonds d'amortissement congolais et en améliorant la transparence de la dette des entreprises publiques.
- Promouvoir la participation du secteur privé dans les infrastructures grâce à des PPP bien structurés afin d'accroître les capacités de financement et de prestation.
- Donner la priorité au capital humain en augmentant et en ciblant mieux les budgets consacrés à la santé et à l'éducation, en définissant des stratégies d'investissement à long terme, en associant le secteur privé et en canalisant efficacement les ressources vers l'enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) et l'enseignement supérieur en fonction des besoins du marché du travail.
- Améliorer la gestion des ressources non renouvelables en actualisant les données géologiques et les cadres juridiques afin d'attirer les investissements miniers, en développant les marchés gaziers nationaux et régionaux, en redevenant membre de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) et en adoptant des cadres budgétaires et cadres de surveillance transparents pour le pétrole et le gaz.
- Maximiser le capital naturel renouvelable en renforçant la gouvernance des forêts et des terres (y compris la traçabilité numérique), en déployant des incitations (par exemple, bonus-malus) pour encourager les pratiques durables, en augmentant la productivité agricole, en promouvant l'écotourisme, en élargissant l'accès à l'énergie en milieu rural et en préparant les institutions et les cadres juridiques aux marchés du carbone et au financement de l'action climatique.
- Le soutien international est essentiel pour compléter les efforts déployés par le Congo pour préserver ses forêts, notamment par le biais de mécanismes de compensation équitable et de cadres renforcés de la REDD+, du financement climatique et d'une coopération renforcée, ainsi que d'instruments innovants de financement fondés sur la nature (par exemple, les obligations indexées sur la durabilité).