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Un risque à prendre pour éviter d’en courir de plus graves : concourir à la stabilité et à l’économie en Irak

17 décembre 2015


Vue aérienne de Bagdad en Irak - Shutterstock l rasoulali

Photo aérienne de la ville de Bagdad, en Irak

Shutterstock l rasoulali

LES POINTS MARQUANTS
  • L’Irak subit les effets de la chute des cours du pétrole, du déplacement de quatre millions de personnes à l’intérieur du pays et de l’afflux de 250 000 réfugiés syriens.
  • La nouvelle stratégie de la Banque mondiale consiste à s’attaquer aux racines mêmes de l’instabilité de pays tels que l’Irak.
  • La multiplicité des frontières de l’Irak fait que tout ce qui se passe dans ce pays a des répercussions sur l’ensemble du Moyen-Orient.

L’Irak est confronté à une flambée des dépenses publiques à un moment où le cours du pétrole, dont le pays tire 90 % de ses revenus, a baissé de moitié en deux ans. L’économie irakienne subit le contrecoup du déplacement de quelque quatre millions de citoyens à l’intérieur du pays du fait du conflit, du combat contre la rébellion de l’État islamique (EI) et de l’afflux problématique de près de 250 000 réfugiés syriens.

Le Groupe de la Banque mondiale a adopté une nouvelle stratégie pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord en s’efforçant de s’attaquer aux racines mêmes de l’instabilité de pays tels que l’Irak. La Banque internationale pour la reconstruction et le développement, l’une des institutions du Groupe, a octroyé un financement à l’appui de la politique de développement – ou appui budgétaire – pour aider le pays à sortir de cette crise. C’est la deuxième fois en 2015 que la Banque décide d’apporter son soutien à l’Irak. En juillet, la Banque lui avait accordé un prêt de 350 millions de dollars pour une intervention d’urgence visant à restaurer les infrastructures de base et les services publics au profit des citoyens irakiens des municipalités libérées du soi-disant État islamique et désormais sous le contrôle du gouvernement.

L’Irak est l’une des plus grandes économies du Moyen-Orient, avec un PIB de près de 200 milliards de dollars. Sa position centrale et ses multiples frontières lui confèrent aussi une importance stratégique ; ce qui se passe en Irak a des répercussions dans l’ensemble de la région. « Nous prenons un risque mûrement réfléchi en menant cette opération. Mais les risques seraient bien plus graves si nous n’aidions pas le gouvernement irakien à ce moment précis, » déclare Ferid Belhaj, Directeur de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient.

« L’économie traverse une période extrêmement difficile, et la population connaît une situation quasiment insupportable. Nous pensons que le soutien apporté à l’Irak pour rétablir rapidement son économie et se stabiliser profitera non seulement à la population irakienne, mais à la région tout entière, » estime M. Belhaj.

« L’Irak est fortement tributaire de l’économie pétrolière. Lorsque le cours des produits pétroliers baisse, cela se sent. Cette année, la croissance économique sera proche de zéro, et le revenu par habitant a chuté depuis 2013, » indique Auguste Kouame, Directeur du pôle Gestion macroéconomique et budgétaire à la Banque mondiale. « Les cours du pétrole vont probablement rester à un niveau peu élevé et, vu l’insécurité actuelle, si nous n’aidons pas le pays maintenant, la situation en Irak pourrait se dégrader au point que le coût de l’aide serait supérieur à ce qu’il est aujourd’hui. »

Ce financement à l’appui de la politique de développement poursuit un triple objectif. Le premier est l’amélioration de la gestion des dépenses publiques. En novembre, le gouvernement a réduit les salaires des fonctionnaires les mieux payés et augmenté ceux des moins payés ; cette démarche, financièrement neutre, agissait sur la redistribution et atténuait les tensions sociales. L’Irak a pris des dispositions pour empêcher que 30 000 pensions de fonctionnaires ne soient versées à des bénéficiaires qui ne les avaient pas gagnées. Le gouvernement a en outre mis en place un service de gestion de la dette publique, et il gère mieux les programmes d’investissement public, grâce à un examen approfondi des projets choisis et des études de faisabilité.

Le deuxième objectif du financement consiste à faciliter un approvisionnement énergétique plus durable et de meilleure qualité. L’Irak prend des mesures pour réduire le torchage des gaz de ses puits de pétrole, et envisage d’investir dans la maîtrise du gaz naturel et son exploitation à des fins de production d’électricité. Cette réforme aura d’importantes retombées positives sur les finances publiques, la position extérieure du pays et l’environnement. À l’heure actuelle, l’Irak importe du charbon et du pétrole pour alimenter ses centrales électriques. Les subventions accordées aux gros consommateurs d’électricité – par exemple les industries et entreprises qui utilisent du courant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 –  pour recevoir de l’énergie seront réduites afin d’assainir les finances publiques.

En troisième lieu, le prêt vise à promouvoir la transparence des entreprises publiques. Une base de données des entreprises publiques doit être créée. Souvent inexistantes ou peu performantes, nombre d’entre elles ont été utilisées auparavant comme programmes d’emploi. Le gouvernement a aussi indiqué qu’il permettrait à des banques privées de faire des affaires avec lui, en concurrence avec les deux grandes banques publiques irakiennes. Le secteur bancaire irakien devra respecter les règlementations internationales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. Si elles sont menées à bien, ces réformes, facilitées par le financement consenti, contribueront à stabiliser l’économie et jetteront les bases d’une croissance inclusive pour tous les Irakiens.


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