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Jim Yong Kim et Christine Lagarde parlent réformes et pertinence des institutions

22 mai 2014


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Le président du Groupe de la Banque mondial, Jim Yong Kim, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde et l’ancien président de la Réserve fédérale américaine Paul Volcker, à la réunion du Comité de Bretton Woods

Simone McCourtie/Banque mondiale

LES POINTS MARQUANTS
  • Le Groupe de la Banque mondiale peut aider les pays à « effacer des décennies d’erreurs », notamment dans le domaine de la santé et de l’éducation, au service des populations pauvres et vulnérables.
  • Le président du Groupe, Jim Yong Kim, a admis lors d’une réunion du Comité de Bretton Woods que la réforme de l’institution était délicate mais relevait du « b.a.-ba de la gestion ».
  • Le Groupe de la Banque mondiale et le Fonds monétaire international cherchent à introduire un peu plus de tolérance au risque dans leur fonctionnement.

Lors de la réunion annuelle du Comité de Bretton Woods, organisée au siège de la Banque mondiale mercredi dernier, le président Jim Yong Kim a affirmé que l’institution pouvait aider les pays à « effacer des décennies d’erreurs », notamment dans le domaine de la santé et de l’éducation, au service des populations pauvres et vulnérables.

Le Comité de Bretton Woods est un réseau, basé aux États-Unis, qui réunit des personnalités du monde entier dans le but de conforter le rôle des institutions de Bretton Woods et de les rendre plus efficaces.

Dans le cadre d’une session animée par Paul Volcker, l’ancien président de la Réserve fédérale américaine (Fed), et intitulée « Quelles priorités pour les institutions de Bretton Woods », le président Kim et la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, ont abordé différents sujets, des inégalités de revenus à la politique de recul progressif des achats d’actifs par la Fed en passant par les solutions pour préserver la pertinence des deux institutions dans les années à venir.

Évoquant le processus de réforme en cours au sein du Groupe, Jim Yong Kim a rappelé la mission des nouvelles Pratiques mondiales, censées repérer les « innovations les plus intéressantes » dans la santé, l’éducation, les transports, le commerce et d’autres secteurs pour les diffuser ensuite aux autres pays et aux entreprises.

Jim Yong Kim a souligné les deux principales forces qui, selon Thomas Piketty — l’auteur de l’ouvrage à succès Le Capital au 21e siècle — ont conduit le monde vers plus de convergence : la diffusion des connaissances et l’investissement dans les qualifications et la formation. Il a indiqué que le Groupe de la Banque mondiale réfléchissait à des solutions pour appuyer des initiatives adaptées au contexte et porteuses à la fois de croissance et de convergence.

Dans ses remarques liminaires, Mme Lagarde a évoqué l’importance des réformes, déclarant que si elle devait décrire en un mot ses trois années à la tête du FMI, ce serait l’« adaptation ». Alors que son prédécesseur avait été chargé de « dégraisser » le Fonds juste avant l’éclatement de la crise financière, l’institution a dû s’adapter et accorder pour près de 700 milliards de dollars de prêts. À l’heure actuelle, le FMI gère des missions d’assistance technique dans 150 de ses 188 pays membres.

Jim Yong Kim a loué les qualités de leadership de son prédécesseur, Robert Zoellick, pendant la crise financière : « Bob a beaucoup contribué à stabiliser la situation de sorte que, lorsque la crise financière a éclaté, nous avons pu intervenir de manière efficace ». De 2008 à 2011, « il a fallu jouer avant tout le rôle de pompier et allouer l’argent rapidement ».

Le président a rappelé comment, à son arrivée à la tête de la Banque, en 2012, il a dû faire face à des interrogations sur la pertinence même de l’institution : quelle est la place de la Banque mondiale à l’heure où les pays africains peuvent se tourner vers la Chine pour obtenir une aide financière et le Nigéria s’adjoindre les services de cabinets de consultants ?

Il a aussi déploré le fréquent manque de diffusion des connaissances d’une division régionale à l’autre, sauf au prix d’un effort individuel du personnel.

Conscient de la réticence au changement, Jim Yong Kim a rappelé que si, pour certains, cela s’apparentait à un « processus exotique », le principe relevait en fait du « b.a.-ba de la gestion », y compris pour les arbitrages budgétaires qui doivent être effectués non pas en fonction du budget de l’exercice précédent mais bien des priorités du Groupe.

« Chacun peut s’exprimer sur le budget, tant qu’il ne s’agit pas de celui de son service », a déclaré le président à propos du processus de négociation engagé récemment à titre pilote dans l’organisation. « Et nous votons pour définir nos priorités — une première pour notre institution ».

Le président a affirmé que le Groupe n’hésitait pas à tout remettre à plat, pour comprendre par exemple pourquoi le coût d’une intervention peut être du simple au triple selon les pays. Enfin, les réformes permettent à la BIRD de pratiquement doubler le montant de ses prêts et d’introduire plus de flexibilité.

Interrogée par Paul Volcker sur la situation du FMI avant la crise, Christine Lagarde est revenue sur l’incapacité de l’institution à repérer les signaux avant-coureurs. Elle a cité un rapport publié avant la crise par l’économiste en chef d’alors, qui pointait un certain nombre de risques mais n’avait pas été jugé d’une « importance capitale ».

« Le FMI est frileux par rapport aux risques, c’est dans sa culture », a expliqué la directrice générale, ajoutant que cela entraînait un manque de tolérance vis-à-vis des formes de pensée latérale et des idées non conventionnelles. Mme Lagarde a rappelé que le FMI avait lui aussi engagé des réformes et que la nomination du prochain directeur général adjoint, en remplacement de Nemat Shafik, ne se déroulerait pas « à huis clos ».

Jim Yong Kim a indiqué que la Banque avait, elle aussi, été critiquée pour son aversion au risque, une attitude qui se manifeste par les empilements bureaucratiques et une tendance à renvoyer la décision aux échelons supérieurs.

Interpellé sur le rôle du secteur privé par Nicolas Mombrial, chef du bureau d’Oxfam à Washington, Jim Yong Kim a déclaré que « face aux besoins d’infrastructures de l’Afrique et des BRICS réunis — environ 1 000 milliards de dollars par an — il ne peut être question de se passer du secteur privé ».




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