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Briser le cycle de la fragilité et des conflits en République centrafricaine

23 octobre 2016


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LES POINTS MARQUANTS
  • Petit pays enclavé de 4,7 millions d’habitants, la Centrafrique (RCA) se remet à peine d’une des plus graves crises de son histoire.
  • Le soutien de la communauté internationale est indispensable pour stabiliser la situation et entamer le processus de redressement et de développement du pays.
  • La Banque mondiale va financer un programme ambitieux de 250 millions de dollars pour aider le pays à se reconstruire.

BANGUI, le 21 octobre 2016 Après une guerre civile sans précédent, le processus de reconstruction en République centrafricaine prendra du temps, du courage et de la persévérance et nécessitera une forte volonté politique. L’heure est toutefois à l’optimisme, les dernières élections présidentielles ayant débouché sur un processus de paix fragile après trois années de violences et de troubles.

Aujourd’hui, pour la première fois, les Centrafricains ont pu élire démocratiquement leur président et leurs députés. Une mission importante de maintien de la paix a déployé 12 000 soldats sur tout le territoire afin de protéger la population contre les milices armées. Malgré une pauvreté persistante et une situation économique et sociale précaire, l’État est parvenu à améliorer ses finances publiques après une grave crise. Au niveau régional, les premiers signes d’un regain de confiance sont perceptibles avec le rétablissement des vols internationaux vers le Kenya et la réouverture de l’axe routier vers Douala au Cameroun.

Les Centrafricains, leurs dirigeants et les partenaires au développement doivent saisir cette opportunité pour améliorer la vie de la population meurtrie par trois années d’affrontements.

Comme l’a dit récemment le président de la RCA, Faustin Archange Touadéra, le pays revient de loin. « Au cours des trois dernières années, il a traversé une crise profonde. Il y a eu des crimes odieux, des violences, le tissu économique est complétement délabré et la cohésion sociale mise à mal. Les fondamentaux de l’État ne sont plus en place et c’est donc une situation qu’il faut redresser. Et il y a aussi des groupes armés qui sont encore en possession d’armes. Notre défi est avant tout de rétablir la paix, l’unité nationale et la cohésion sociale »,  a-t-il confié dans un entretien lors de sa visite à Washington D.C. « Nous voulons montrer notre engagement, notre détermination, aidés par des réformes courageuses, à sortir de cette situation ; notre plus grand soutien, aujourd’hui, c’est la volonté du peuple centrafricain de tourner la page. »

L’aide de la communauté internationale a permis de stabiliser la situation, de rétablir la sécurité et de fournir des services humanitaires essentiels. Cela a également réduit le nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur du pays, même si l’on en recense encore 900 000 à ce jour. La Centrafrique n’en demeure pas moins un pays fragile et il faudra s’attendre à des périodes de rechute comme l’ont démontré les récents déchaînements de violence de ces deux derniers mois à Bangui et plus récemment à Kaga Bandoro, à 300 km à l’est de la capitale. 


« Il faut remettre nos agriculteurs au travail. 80 % de la population vit dans l’arrière-pays où l’agriculture est l’activité principale. Donc agir sur l’agriculture, c’est agir sur 80 % de la population 80%. »

Faustin Archange Touadéra

Président de la Central République centrafricaine

Bâtir un meilleur avenir

Près de 2,3 millions de personnes, soit environ la moitié de la population du pays, ont toujours besoin d’aide humanitaire. Le pays possède pourtant de nombreuses ressources naturelles. S’ils disposaient de suffisamment d’eau et de terres cultivables, les Centrafricains pourraient nourrir leurs familles. La diversification de l’industrie extractive et le développement du secteur agricole pourraient servir de levier à l’économie centrafricaine. Mais cela ne pourra se faire sans l’engagement de la communauté internationale. Un engagement qui dépasse les efforts de stabilisation et l’aide humanitaire.  

« Il faut remettre nos agriculteurs au travail », a insisté le président Touadéra dans son entretien récent. « Il y a eu beaucoup de personnes déplacées à cause de cette crise. Les gens ne peuvent plus aller aux champs ; je pense qu’après le programme de désarmement la paix va revenir et nos agriculteurs vont pouvoir retourner à leurs activités  (…) vous savez, 80 % de la population vit dans l’arrière-pays où l’agriculture est l’activité principale. Donc agir sur l’agriculture, c’est agir sur 80 % des Centrafricains. »  

Le Groupe de la Banque mondiale collabore étroitement avec ses partenaires pour pérenniser cette stabilité durement obtenue et encore fragile. « L’organisation d’élections crédibles, la volonté du gouvernement de mettre en œuvre des réformes importantes et la fin du conflit ouvert donnent une occasion unique au pays d’échapper au piège de la fragilité », a souligné Paul Noumba Um, directeur des opérations de la Banque mondiale en Centrafrique, au Mali, au Niger, au Tchad et en Guinée.

La Banque mondiale vient d’approuver un programme ambitieux financé par l’IDA à hauteur de 250 millions de dollars pour accompagner le redressement du pays. Échelonné sur les trois prochaines années, il regroupe 11 projets visant à soutenir à la fois les efforts de stabilisation et de redressement.

« Ce financement est cinq fois plus important que les montants traditionnellement alloués à la RCA par l’Association internationale de développement (IDA), nous avons travaillé en étroite collaboration avec les autorités et les autres bailleurs de fonds pour le mettre en place », a  précisé Jean-Christophe Carret, responsable des opérations de la Banque mondiale en République centrafricaine. « Nos trois principales priorités sont la gestion des finances publiques, la réinsertion des anciens combattants et des populations déplacées ainsi que la création d’emplois grâce à la réouverture d’un axe routier important et à un programme en faveur de l’agriculture. »

Par ailleurs, la Banque mondiale mène conjointement avec l’ONU et l’Union européenne, une évaluation du redressement et du rétablissement de la paix, afin de définir les priorités du pays à court et moyen termes. Ces trois institutions organisent également la Conférence internationale des bailleurs sur la RCA qui se tiendra à Bruxelles le 17novembre 2016. Cette évaluation chiffre les besoins de l’aide humanitaire d’urgence à 120 dollars par habitant et par an, soit plus du double de l’aide apportée en 2012.  

 « Avec notre soutien et une coordination efficace entre les différents partenaires, la République centrafricaine peut gagner le pari de la reconstruction post-conflit et servir d’exemple aux autres pays. Cela demandera un effort constant pour garantir la paix et la stabilité, mais ça en vaut la peine », a insisté Pour Paul Noumba Um.



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