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En Inde, l’État du Bihar informatise les transferts monétaires pour améliorer la santé des femmes

08 décembre 2015


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Bénéficiaires des programmes de santé, Bihar, Inde.

Photo: Groupe Banque mondiale

LES POINTS MARQUANTS
  • Le module santé du programme de gestion des finances publiques (PFMS) a débouché sur l’automatisation du système de paiement des prestations sur une plateforme numérique
  • Le module santé du programme de gestion des finances publiques (PFMS) permet de verser les fonds directement sur le compte bancaire des bénéficiaires en réduisant le temps d'attente, la corruption et en favorisant l'inclusion financière
  • En 2016, le projet permettra d’économiser 36 millions de dollars par an de « déperditions » et de coûts de fonctionnement

Assurer la santé des mères pour garantir la santé des nouveau-nés est un impératif au cœur des efforts de développement qui cherchent à rendre la vie meilleure.

Pourtant, il n’est pas toujours facile d’inciter les femmes enceintes originaires de milieux ruraux défavorisés à effectuer régulièrement des visites médicales et à accoucher en milieu hospitalier. Un programme du gouvernement indien forme des femmes, les « ASHA » (acronyme pour « Accredited Social Health Activist »), pour prendre en charge les futures mères de leur quartier, les convaincre d’accoucher dans un centre médical et, ensuite, les pousser à faire vacciner leurs enfants.

Les initiatives de réduction de la mortalité maternelle et infantile et de transferts monétaires aux pauvres font partie des approches de développement éprouvées pour aider ces populations à bénéficier de meilleures conditions de vie.

Parfaits sur le papier, les programmes publics d’allocations sociales peuvent se révéler lents et inefficaces quand il s’agit de transférer effectivement les fonds. Ils peuvent aussi alimenter la corruption quand l’argent ne « disparaît » pas tout bonnement.

Avec le soutien de la Société financière internationale (IFC) (a), le module santé du programme novateur de gestion des finances publiques a débouché sur l’automatisation du processus : transféré sur une plateforme numérique, le dispositif de prestations sociales permet désormais de verser les fonds directement sur le compte bancaire des bénéficiaires et d’automatiser le calcul, l’authentification et l’enregistrement des paiements. Il a été testé à titre pilote dans cinq districts du Bihar, un État de 110 millions d’habitants qui fait partie des plus pauvres de l’Inde.


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« Grâce à ce système, l’argent arrive directement sur mon compte. Personne ne peut me le voler  »

Madhu

(ASHA)

Auparavant, les ASHA devaient attendre en moyenne 191 jours pour être payées, contre 58 jours pour les femmes bénéficiaires des prestations. Un quart d’entre elles indiquaient également devoir verser une « prime de facilitation » pour toucher leur dû. Avec l’introduction du nouveau système, les ASHA sont payées dans un délai d’un mois et les bénéficiaires en deux jours. Les pots-de-vin (les fameuses « primes ») ont par ailleurs nettement diminué.

L’informatisation a également permis de réduire le nombre de documents à fournir et à traiter, ce qui permet au personnel de santé de se consacrer davantage aux soins et moins à des tâches administratives. Le délai de traitement des paiements a été réduit de 2,5 à 9 heures par mois. Avant, les agents sanitaires passaient jusqu’à 30 % de leur temps (entre 15 et 54 heures par mois) à gérer le dispositif.

« Nous avons du temps pour le suivi des patients, les soins et le travail de terrain », explique Archana Kumari, cadre de santé dans un dispensaire du Bihar.

Le nouveau système de paiement est devenu opérationnel en avril 2014. En juin 2015, il avait traité l’équivalent de 11 millions de roupies. En 2016, le projet permettra d’économiser 36 millions de dollars par an de « déperditions » et de coûts de fonctionnement, soit 18 % des flux de paiement de l’État du Bihar.

L’automatisation des paiements a également eu des effets positifs imprévus sur le plan économique et social, en renforçant par exemple l’indépendance des femmes.

Pour toucher leur argent, celles-ci doivent obtenir une carte d’identification et ouvrir un compte en banque, dont la majorité était dépourvue. Dans les villages du Bihar, moins de 20 % des femmes avaient un compte bancaire. En devenant titulaires d’un compte, elles ont gagné en autonomie et peuvent désormais accéder à d’autres services financiers pour mieux gérer et planifier leurs vies.

« Je viens de recevoir ma carte et Madhu va m’aider à ouvrir un compte », raconte Sangeeta, une jeune femme qui vient d’accoucher dans un dispensaire local. « Une fois que j’aurai mon compte, je mettrai de l’argent de côté pour l’éducation et les médicaments de mes enfants. »

À ce jour et dans le cadre du projet, 7 500 ASHA ont été formées aux rudiments de la finance. Par ailleurs, 450 spectacles de rue ont été organisés dans 259 villages pour sensibiliser les bénéficiaires du programme aux questions financières. En 2016, les 88 000 ASHA de l’État auront suivi cette formation. Le programme forme par ailleurs plus de 2 000 cadres de santé au nouveau système, dont un tiers environ n’avaient jamais travaillé sur un ordinateur auparavant.

Les nouveaux Objectifs de développement durable mettent fortement l’accent sur l’accès aux financements et l’inclusion financière, indispensables pour la réalisation de sept des 17 ODD, notamment ceux relatifs à la santé et à l’égalité hommes-femmes.

L’inclusion financière figure également en bonne place dans le programme de développement de l’Inde, sachant que près de 53 % de la population du pays (a) n’ont pas accès au système financier formel et réglementé. L’Inde fait aussi partie des 25 pays prioritaires couverts par l’initiative d’universalisation de l’accès aux services financiers (a) du Groupe de la Banque mondiale dont le but est de permettre aux adultes du monde entier d’être titulaires d’un compte courant d’ici 2020.

Les autorités du Bihar envisagent d’étendre à tout l’État le dispositif de paiements pour la santé d’ici 2016 ; par ailleurs, celui-ci sera bientôt introduit dans un autre État, l’Uttar Pradesh, où il devrait être généralisé à l’horizon 2019. Le système traitera alors près de 6 millions de bénéficiaires et d’ASHA dans ces deux États indiens pour quelque 500 millions de dollars par an.


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