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Vers un État palestinien : des réformes pour renforcer la politique budgétaire

13 avril 2010


Avril 2010 - La viabilité d’un État repose sur des institutions publiques capables de créer un environnement favorable à la croissance du secteur privé, de gérer les finances publiques de façon efficiente et de fournir des services efficaces à la population. L’Autorité palestinienne (AP) réalise de solides progrès dans l'application de son programme de réformes et dans la création des institutions nécessaires à un futur État : elle a renforcé ses systèmes de gestion des finances publiques, amélioré les services de base et adopté des réformes importantes visant à accroître la sécurité et consolider sa position budgétaire. Pourtant, seul un secteur privé dynamique peut générer les emplois dont une population jeune et grandissante a besoin et fournir les ressources nécessaires pour assurer des services de base aux citoyens. Si la récente reprise économique donne lieu à un certain optimisme – la croissance du produit intérieur brut (PIB) atteignant 6,8 % en 2009 après avoir atteint près de 6 % en 2008 – la situation demeure précaire. La plus forte croissance a eu lieu en Cisjordanie, tandis que le PIB par habitant continue de chuter à Gaza. De plus, cette croissance repose à la fois sur d’importants flux d’aide des donateurs, sur des réformes de l’Autorité palestinienne qui ont permis de renforcer la confiance des investisseurs et sur l’allègement de certaines restrictions en matière de sécurité par Israël. Étant donné sa dépendance à l’égard de l’aide des donateurs, on ne peut que s’inquiéter de la pérennité de la croissance.

Une croissance durable du secteur privé nécessite moins d’investissements menés par le secteur public, mais un réel essor des investissements du secteur privé. Ce changement de cap peut en partie être réalisé si l’Autorité palestinienne continue d’accélérer ses réformes. Cependant, l’obstacle le plus important aux investissements du secteur privé en Cisjordanie et dans Gaza demeure les restrictions de circulation et d’accès aux ressources et aux marchés imposées par le gouvernement d’Israël. Pour que la croissance progresse durablement, le gouvernement d'Israël doit poursuivre les mesures d’allègement des restrictions déjà entamées – notamment en accroissant l’accès des Palestiniens aux terres et ressources de la zone C, ainsi qu’aux marchés de Jérusalem-Est et d’Israël, et en créant un plus haut niveau de prévisibilité de la circulation et de l’accès.

L’Autorité palestinienne continuera pendant un certain temps d’être dépendante des donateurs pour le financement de son budget opérationnel, alors qu’elle met en œuvre un programme ambitieux de réformes. La communauté internationale doit s’engager à continuer de soutenir ce programme, y compris à travers des flux de financements plus prévisibles. En 2009, le déficit récurrent du budget de l'AP se montait à près de 1,6 milliard de dollars, comparé à 1,3 milliard en 2008. Ce déficit était dû principalement au besoin de répondre à la situation d’urgence dans Gaza. L’AP reconnaît qu’elle ne peut pas maintenir un tel déficit et que si l'aide des donateurs a été généreuse, elle ne restera pas à un niveau si élevé. Le budget 2010 de l’AP s’engage à réduire le déficit récurrent à environ 1,2 milliard de dollars, tout en augmentant les dépenses liées au développement à 670 millions de dollars. Sur ces dépenses, près de 350 millions de dollars seront consacrés à des projets de développement communautaires qui constituent le noyau central de la stratégie de l’AP pour encourager le développement et répondre aux besoins de la population. L’AP rapporte avoir déjà réalisé 1 000 projets basés sur la demande et vise la réalisation d’un autre millier de projets d’ici la fin 2010. Le manque de prévisibilité du financement extérieur compromet la capacité de l’AP à gérer efficacement ses dépenses et à consolider les progrès réalisés à ce jour.

Des éléments essentiels de la réforme et du programme de développement institutionnel de l'AP portent sur l'amélioration de la gestion des finances publiques et sur le renforcement de sa position budgétaire. Le ministère des Finances continue de renforcer durablement son système de gestion des finances publiques : tous les ministères ont ainsi été reliés au nouveau système de comptabilité informatisé, les réconciliations bancaires ont été résolues et de nouvelles méthodes de contrôle des dépenses ont été mises en place. Les états financiers de 2008 ont été compilés et soumis à un auditeur externe. La passation des marchés publics reste une question importante sur laquelle le gouvernement travaille actuellement grâce à un nouveau projet de loi. L’AP compte réviser le projet de loi actuel et l’adopter en 2010, ce qui permettra l’établissement d’un nouveau système de passation de marchés publics basé sur les meilleures pratiques internationales.

Pour renforcer sa politique budgétaire, l’AP met l’accent sur les retraites, les prêts nets, la distribution d’électricité et les finances municipales, qui ont un impact substantiel sur le budget. L’AP s’est engagée à réformer le système public de retraites et planifie actuellement la poursuite des réformes, mais le rythme de ces dernières doit être accéléré. En termes de prêts nets, les résultats sont encourageants : l’AP à réussi à réduire les prêts nets de plus de 30 % entre 2007 et 2009, les quelque 80 % du montant restant concernant Gaza où l’AP dispose de peu de marge de manœuvre. Des progrès ont été enregistrés dans le domaine de l’électricité : un nouvel organisme de contrôle de l’électricité est opérationnel et les systèmes pour la Northern Electricity Distribution Company sont actuellement mis en place. Néanmoins, des efforts plus soutenus sont nécessaires pour gérer plus efficacement cet enjeu en Cisjordanie, où la distribution d’électricité doit être transférée des gouvernements locaux à des sociétés de distribution commerciales tel que requis par la Loi sur l’électricité.

Les réformes du système de distribution de l’électricité sont étroitement liées au programme plus vaste des finances municipales. Au sein d’un système largement décentralisé, les administrations locales sont responsables de la fourniture de services étendus et comptent pour une large part dans la position budgétaire de l’AP, en raison notamment des prêts nets et autres transferts. Améliorer la viabilité et le rendement fiscal de la fourniture de services des administrations locales s’avère donc une priorité. Pour aborder la question des prêts nets, l’AP a analysé les opérations budgétaires des administrations locales et met actuellement en place des plans visant à surmonter les contraintes qui ont été identifiées. Des mesures importantes ont été adoptées, telles que l’augmentation et l’élargissement des prélèvements de taxes foncières et la création de mesures incitatives pour améliorer les systèmes de comptabilité. À long terme, l’AP compte remédier au manque d'efficacité d'un grand nombre de petites administrations en adoptant une structure plus viable.

À de nombreux égards, l’Autorité palestinienne est en passe de tenir sa promesse de créer un État palestinien capable d’assurer les services de base et la prospérité économique à sa population. Néanmoins, il ne s’agit pas de relâcher les efforts. Une action concertée doit être menée pour créer un environnement favorable à la croissance du secteur privé. Cette action implique que le gouvernement d’Israël continue d'alléger ses restrictions sur la circulation des personnes et l'accès aux marchés, que l’AP persévère dans son programme de réformes et que la communauté internationale apporte un soutien prévisible et durable. Le moment est venu pour toutes les parties – Palestiniens, Israël et la communauté internationale – de relever ce défi et d’assurer que les fondations d’un futur État palestinien soient aussi solides que possible.

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