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Forum mondial : développement durable et innovation scientifique

25 janvier 2010


LES POINTS MARQUANTS
  • Des scientifiques et des responsables politiques échangent leurs points de vue sur l’adaptation des solutions technologiques aux besoins locaux.
  • Afin de pouvoir atteindre les objectifs de développement pour le Millénaire (ODM) d’ici 2015, le renforcement des capacités scientifiques est indispensable.
  • Dans les prochains mois, la Banque mondiale va développer une stratégie de partenariats mondiaux dans le domaine de la science, de la technologie et de l'innovation.

25 janvier 2010 – De toute évidence, l’homme, originaire de Jaipur, n’en était pas à son coup d’essai. Alors qu’une petite foule était rassemblée pour le regarder, il a montré son pied artificiel à la caméra et s'est ensuite mis à grimper sur un arbre avec une agilité étonnante pour un homme qui a perdu son pied dans l’explosion d’une mine. Puis il a bondi de l’arbre par-dessus une barrière, avant de disparaître à toute vitesse dans une rue voisine et, finalement, de réapparaître.

D’après ses amis, il est capable de courir un kilomètre en moins de cinq minutes.

La prothèse qui a permi à cet homme de retrouver une vie normale est le résultat de la recherche et de l’innovation de deux inventeurs indiens de la région. Elle ne coûte que 28 dollars (US) et figure, selon le magazine Time, parmi les 50 meilleures inventions de l'année 2009. Dans les pays occidentaux, l'équivalent de cette prothèse coûterait entre 20 000 et 30 000 dollars.

La vidéo, tournée à Jaipur, démontre la capacité des pays pauvres à s’approprier des technologies nouvelles ou existantes afin de résoudre les problèmes auxquels leur région doit faire face. Ceci sans avoir à importer des solutions occidentales coûteuses. Elle a également fait ressortir l’esprit d’innovation présent lors du récent Forum mondial sur la Science, la Technologie et l’Innovation (STI) organisé par la Banque mondiale. Des dizaines de scientifiques, d’innovateurs et de responsables politiques, parmi les meilleurs du monde, se sont réunis à Washington (États-Unis) et ont réfléchi aux possibilités de mieux adapter les solutions scientifiques et technologiques aux besoins du développement local.

Ces solutions concernent aussi bien des prothèses, peu coûteuses mais efficaces, que des vaccins ou des panneaux solaires. Les possibilités sont innombrables.

Le développement des capacités scientifiques est indispensable pour atteindre les ODM

Alors qu’il ne reste plus que cinq ans pour atteindre les objectifs de développement pour le Millénaire (ODM), les responsables politiques sont parfaitement conscients que, sans capacités scientifiques, professionnelles ou technologiques et sans capacités d'ingénierie pour prendre en main les questions urgentes de développement (telles que la sécurité alimentaire, les énergies propres, l'adaptation au changement climatique, l'amélioration des systèmes de santé, l'accès aux services d'eau et d’assainissement, la création de richesses et d'emplois et la réduction de l’extrême pauvreté), peu de pays peuvent espérer atteindre les objectifs qu'ils se sont fixés.

Il ne peut y avoir de solutions durables à aucun de ces problèmes, à moins que les pays ne renforcent leurs capacités pour concevoir et développer des technologies appropriées et les adapter à leurs propres besoins.

« Les pays en développement ne peuvent espérer prospérer au sein d’une économie mondiale de plus en plus compétitive et d’un système commercial ouvert, s’ils ne renforcent pas de manière appropriée leurs capacités scientifiques, technologiques, techniques et professionnelles, comme leurs capacités d’ingénierie et d’innovation en entreprenariat, afin d’augmenter la valeur ajoutée des biens et des services qu’ils produisent » affirme Al Watkins, coordinateur STI à la Banque mondiale.

Les pays contournent les agences de développement

Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’une meilleure utilisation de la science et de la technologie est essentielle, mais comme Al Watkins et l’équipe de la Banque mondiale l’ont fait remarquer au Forum mondial, quel devrait être le rôle de la Banque à cet égard ? La Banque ne dispose pas de bataillons d’ingénieurs et de scientifiques formés et prêts à constituer des équipes pour aider les pays à renforcer leurs propres capacités.

En fait, de nombreux pays en développement contournent les agences de développement officielles et développent leurs capacités de recherche en science, technologie et innovation, en s’associant directement avec des universités, des entreprises privées, des groupes de réflexion et des instituts de recherche. Les agences de développement peuvent jouer un rôle de soutien, en facilitant et en finançant certains de ces partenariats, mais à ce jour, elles n'y ont pas directement participé, en tout cas pour la plupart.

« Il a fallu 40 ans à la radio pour conquérir un marché de 50 millions de personnes. La télévision en a eu besoin de 13, Internet de 5 et Facebook a conquis son public en seulement 2 ans », a expliqué Graeme Wheeler, Directeur général de la Banque mondiale pour le développement humain, en soulignant devant les participants du Forum mondial la nature bouillonnante des flux d’idées et d’informations et leur lien avec la prospérité croissante.

« Notre impact sur le développement dépend de notre capacité à laisser jaillir les bulles d'innovation partout dans le monde, afin de trouver de meilleurs moyens d’exercer les activités économiques, par exemple, en améliorant les prêts et les produits de gestion du risque, ainsi qu’en proposant une assistance technique plus adaptée et des connaissances de pointe », a ajouté Graeme Wheeler.

Des idées prometteuses concernant le rôle futur de la Banque dans le domaine de la science, de la technologie et du développement ont surgies de part et d'autres. Ce qui n’est pas surprenant, étant donné le niveau d'expertise de plusieurs participants au Forum mondial, comme Peter Msolla, ministre des Communications, de la Science et de la Technologie de Tanzanie, Harold Varmus, lauréat du prix Nobel de médecine et conseiller scientifique de la Maison Blanche, le Professeur Kiyoshi Kurokawa, ancien conseiller scientifique du gouvernement japonais ou encore Ramesh Mashelkar, président de l’Alliance mondiale de la recherche.

La constitution d'un Corps mondial de la science est proposée

Par exemple, Harold Varmus a suggéré que la Banque pourrait apporter son soutien à la création d’un Corps mondial de la science, en s'inspirant du modèle du Corps de la paix. Cet organisme permettrait de déployer, pour une période d’un an ou plus, un grand nombre de professeurs de science et d’ingénierie ainsi que des chercheurs provenant de pays à forte capacité scientifique vers des pays en développement.

Les membres de ce Corps travailleraient en collaboration avec des scientifiques du pays afin de mener des recherches pertinentes pour le pays hôte. Ils permettraient également d’augmenter le nombre de professeurs qualifiés en science et en ingénierie dans ces pays.

Parmi les autres idées figure la création d’un Fonds d’aide au transfert de technologie, dont le but serait d’aider les pays en développement à accéder à des technologies produites à l'étranger, de les breveter ou bien de les importer dans le pays concerné. Les pays développés pourraient mettre à disposition des chercheurs des pays en développement des nouvelles technologies, qui seraient ensuite modifiées pour une utilisation locale, puis transférées à des petites et moyennes entreprises du pays.

La mise en place d’un partenariat entre la Banque mondiale, la Société financière internationale (IFC) et des groupes de technologie américains et européens serait très utile pour aider les pays en développement clients à renforcer les institutions et les compétences nécessaires à l'organisation et à la gestion de ces transferts de technologie.

Une autre proposition concerne la création d’un Fonds régional pour la science, destiné à promouvoir la technologie dans les pays pauvres et à renforcer la collaboration et la recherche scientifique Sud-Sud, afin de mettre en œuvre des solutions techniques à même de résoudre des problèmes de première importance et grâce à des méthodes jugées acceptables par les communautés locales.

Le Directeur général, Graeme Wheeler, a promis aux participants du Forum que la Banque mondiale proposerait un Plan d’action dans les prochains mois, en collaboration avec les autres partenaires. Selon lui, une stratégie globale, des accords de partenariat et un mécanisme financier dédié devraient permettre d'optimiser l’impact sur le développement des nouvelles initiatives de partenariat STI.

« Devant l’enthousiasme et la diversité des organisations rassemblées ici […] la Banque se trouve face à une occasion sans précédent, lui permettant d’initier un nouveau partenariat fort, avec pour but de soutenir le développement fondé sur le savoir » a conclu Phillip Griffiths, président du Groupe d’initiatives en faveur de la science, une équipe internationale de responsables scientifiques et de militants, qui se consacre à la promotion des sciences dans les pays en développement.


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