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ARTICLE 08 février 2022

Tout savoir sur les océans et le changement climatique

Enjeux climatiques : décryptage

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Les océans jouent un rôle essentiel dans la régulation du climat, mais où en est leur santé et en quoi sont-ils affectés par les dérèglements climatiques ? Pour le savoir, nous avons rencontré Charlotte de Fontaubert, experte mondiale de l’économie bleue à la Banque mondiale, qui détaille le travail de l’institution pour préserver la santé et la productivité des océans.

En quoi le changement climatique affecte-t-il les océans ?

Les changements climatiques menacent lourdement la santé des océans dans le monde. Ce danger s’ajoute à d’autres pressions anthropiques, à savoir les atteintes à l’environnement dues à l’activité humaine. Nous commençons à mieux comprendre ces impacts, tout comme l’ampleur des enjeux. Les dérèglements du climat déséquilibrent les océans, notamment par la hausse des températures, l’élévation du niveau de la mer et l’acidification. La circulation des courants marins est également perturbée. Tous ces facteurs nuisent à la santé des océans et des espèces marines. C’est le cas des récifs coralliens, qui constituent de précieux écosystèmes, menacés par la triple action de l’acidification, du réchauffement des océans et de leur élévation. Le problème de l’acidification est en outre plus large, car il perturbe aussi les capacités d’absorption du CO2 par d’autres espèces, comme les mollusques et les crustacés. La modification des courants marins menace le recrutement des ressources halieutiques (à savoir le nombre de poissons nés dans une période donnée qui atteignent le stade juvénile), un phénomène aux répercussions très concrètes et immédiates sur les populations côtières qui dépendent de ces ressources. Les effets du changement climatique sur les océans sont donc multiples, complexes et corrélés.

Quel rôle jouent les océans dans l’atténuation du changement climatique ?

Les océans constituent le plus grand puits de chaleur de la planète, absorbant 90 % de l’excès de chaleur dû au changement climatique[1]. Puits de carbone très efficaces, ils emprisonnent également 23 % des émissions de CO2 d’origine humaine[2]. Les mangroves, qui se développent dans les zones côtières, mais dont les racines plongent dans l’eau de mer, les marais salés et les herbiers marins forment des écosystèmes qui captent et stockent plus de carbone par unité de surface que les forêts. Nous savons également que la séquestration de certaines particules de carbone dans les sédiments des fonds marins s’est effectuée sur des milliers d’années, même si ce mécanisme, qui demeure mal connu, n’a jamais été mesuré.

Cependant, l’incidence des dérèglements du climat sur la santé des océans nuit à leur régulation du carbone, créant un cercle vicieux. Alors que nous commençons tout juste à comprendre l’importance des fonctions écologiques des océans, le changement climatique les altère déjà.

[1] Augmentation du contenu thermique des océans (a)

[2] Journée mondiale des océans : vie et moyens de subsistance (a)


« Les effets du changement climatique sur les océans sont donc multiples, complexes et corrélés.  »
Charlotte De Fontaubert
Experte mondiale de l’économie bleue à la Banque mondiale

Quel rôle jouent les océans dans l’adaptation aux changements climatiques ?

Les littoraux concentrent une très haute énergie (songez aux marées ou à l’action des vagues) : pour protéger les populations côtières, ces forces incessantes doivent être maîtrisées, en érigeant des infrastructures bétonnées (jetées ou digues), en favorisant les infrastructures vertes (mangroves) ou en panachant ces deux solutions. D’après de nouvelles études au Bangladesh (a), les mangroves réduiraient l’élévation du niveau de l’eau de mer de 4 à 16,5 cm et la vitesse d’arrivée d’eau de 29 à 92 % lors d’un épisode cyclonique puissant, apportant une réelle protection aux communautés. 

Comment la Banque mondiale promeut-elle la santé des océans ?

La Banque mondiale poursuit une démarche dite de l’« économie bleue », qui privilégie une gestion durable et intégrée des zones côtières et marines dans des océans en bonne santé. Notre fonds fiduciaire multidonateurs PROBLUE (a) accompagne les États dans leur volonté d’améliorer le secteur de la pêche, lutter contre la pollution marine, maîtriser les ressources côtières et limiter l’impact de secteurs clés (tourisme, transport maritime, énergies renouvelables offshore…) sur la santé des océans. Pour la Banque mondiale, ces questions sont primordiales., un chiffre qui devrait doubler à l’horizon 2030[1]. Nous aidons, par exemple, nos pays clients à mettre sur pied de nouvelles approches plus durables du tourisme côtier en lien avec les aires marines protégées. Plus de 105 millions d’hectares d’aires marines protégées bénéficient ainsi de notre soutien[2], avec un fort encadrement des activités humaines, voire leur restriction dans les zones sanctuaires, en particulier.

Nous nous attachons également à décarboner le transport maritime. De nombreux navires consomment du combustible de soute, le combustible fossile le plus polluant utilisé à ce jour. La restauration de la santé des océans s'accompagne de la nécessité de trouver d’autres moyens de subsistance pour les communautés touchées. Ce à quoi nous nous employons, tout en les aidant à s’adapter aux évolutions actuelles et futures induites par le climat.

Dernier point, et non des moindres, nous consacrons une large partie de notre travail à la réduction et la gestion de la pollution marine par les plastiques, autre facteur de dégradation de la santé des océans et l’un des plus visibles. La pollution plastique s’explique en partie par un traitement inadéquat des déchets solides, mais nous traitons ce problème sur toute la chaîne de valeur du plastique, de la production à la mise en place d’une économie circulaire, mais aussi, en dernier recours, en appuyant le nettoyage des plages. La lutte contre la pollution plastique est un chantier colossal : il faut y associer de nombreux services au sein du Groupe de la Banque mondiale et il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine. Mais si la question des déchets plastiques marins n’est pas résolue, les océans ne pourront en aucun cas jouer ce rôle vital qui est le leur dans l’atténuation des changements climatiques.

Comment parvenir à restaurer la santé des océans et faire en sorte qu’ils contribuent demain à notre combat contre les dérèglements du climat ?

L’action de la Banque mondiale n’est pas isolée : la mobilisation s’accroît dans le monde. Plusieurs pays se sont fixé des objectifs en matière de santé des océans dans le cadre de leurs contributions nationales à l’accord de Paris — et de nombreux autres devraient leur emboîter le pas. Certains pays adoptent des plans d'aménagement qui prévoient un développement intégré et durable de divers secteurs océaniques. Il nous faut rompre avec le statu quo : il n’est plus possible de suivre la voie qui nous a menés à cette extrémité. Lors de la COP26 à Glasgow, les négociateurs ont convenu de nouvelles règles pour les marchés du carbone, susceptibles de mieux valoriser les puits de carbone océaniques que constituent les mangroves ou les récifs coralliens et de déboucher sur des incitations destinées à préserver ces écosystèmes. Nous ne détenons pas la panacée contre ces problèmes, mais nous pouvons et devons continuer d’œuvrer ensemble à réhabiliter la santé des océans.

[1] L'économie de la mer en 2030 (a)

[2] Biodiversité (a)



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