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publication 16 mars 2022

Sécurité hydrique au Sénégal : défis et recommandations


Points essentiels concernant la sécurité hydrique au Sénégal

  • Alors que le pays est déjà confronté à un stress hydrique, on prévoit une augmentation de 30 % à 60 % des prélèvements d’eau d’ici 2035. Les événements extrêmes liés à l’eau ainsi qu’à sa pollution coûtent déjà au Sénégal plus de 10 % de son PIB chaque année.
  • La région de Dakar est particulièrement exposée, alors qu’elle concentre déjà la moitié de la production du PIB et de la population du pays, il apparaît donc essentiel de diversifier les sources d’eau et d’améliorer la coordination entre secteurs.
  • La sécurité hydrique doit s’imposer comme une priorité au Sénégal pour permettre au pays d’atteindre et de maintenir ses objectifs de développement (avec le Plan Sénégal émergent).

La sécurité hydrique est au cœur du développement du Sénégal et notamment de ses objectifs de développement socio-économiques. Cependant la détérioration de ses ressources en eau et le manque de cadre institutionnel menacent à la fois la sécurité hydrique du pays et sa croissance économique. Alors que le plan de développement socioéconomique national (le Plan Sénégal émergent – PSE) vise à mobiliser « une eau abondante et de bonne qualité pour tous, partout et pour tous les usages, dans un environnement sain et durable » d’ici 2035, il ne prend pas en compte les contraintes liées à la disponibilité ou la gestion des ressources en eau.

C’est dans ce contexte que le gouvernement sénégalais a sollicité l’appui de la Banque mondiale, par l’intermédiaire du ministère de l’Eau et de l’Assainissement (MEA), pour conduire une enquête sur la sécurité hydrique. Le rapport Défis et recommandations en matière de sécurité hydrique au Sénégal, au niveau national et dans le triangle Dakar-Mbour-Thiès évalue le niveau d’attention accordé à la gestion des ressources en eau et identifie les obstacles à l’atteinte de la sécurité hydrique. L’enquête se concentre aussi sur la région du Grand Dakar, où la sécurité hydrique apparaît cruciale pour le développement.  

Au Sénégal, les eaux de surface constituent la principale source d’eau pour l’agriculture, mais durant les périodes de faibles précipitations, elles ne suffisent pas à répondre aux besoins, particulièrement pour l’irrigation dans le bassin du fleuve Sénégal. Les eaux souterraines fournissent 85 % de l’eau potable et couvrent la plupart des besoins dans l’industrie. Cependant, ces ressources sont menacées par la surexploitation et la pollution. Le niveau des prélèvements actuels devrait augmenter de 30 % à 60 % d’ici 2035, renforçant le stress hydrique et mettant à l’épreuve la capacité de répondre à la demande d’une population en pleine urbanisation. Les phénomènes extrêmes liés à l’eau et sa pollution coûtent déjà au Sénégal plus de 10 % de son PIB chaque année, et la crise de la COVID-19 a encore intensifié le problème.

Les défis liés à la sécurité hydrique sont particulièrement nombreux dans le triangle Dakar-Mbour-Thiès, une région qui abrite plus de la moitié de la population sénégalaise. Cette région produit par ailleurs 50 % du PIB du Sénégal et a connu un taux de croissance de 4 % par an au cours de la dernière décennie. Cependant depuis 2011, la région est confrontée à un déficit en eau et à des risques de sécurité hydrique importants, notamment en matière de surexploitation des ressources, de pollution des nappes phréatiques et de menaces sur les zones humides et leurs écosystèmes. Le lac de Guiers, qui fournit environ 40 % de l’eau de la région, est menacé par la pollution et les fortes demandes pour cette ressource limitée.  

L’enquête souligne qu’en raison d’une demande qui excède déjà les ressources disponibles au Sénégal, la diversification de l’approvisionnement est essentielle. Une économie circulaire de la sécurité hydrique offrirait de très importants bénéfices, en permettant au pays de développer la réutilisation des eaux usées, pour permettre la reconstitution des nappes phréatiques et l’irrigation, tout en s’appuyant sur les zones marécageuses et l’infrastructure verte en vue d’améliorer la gestion et la capture des eaux pluviales. Le rapport recommande également des mesures de réduction du gaspillage et d’efficience, une allocation adaptée aux usages et le développement de ressources non-conventionnelles comme la désalinisation de l’eau de mer et le traitement des eaux usées. Dans le triangle Dakar-Mbour-Thiès, une plateforme de collaboration multisectorielle et multi-acteurs est nécessaire à l’amélioration de la gestion de l’eau, pour restaurer et entretenir l’équilibre entre l’utilisation actuelle des ressources hydriques et leur protection afin de garantir les besoins à venir. 

L’économie sénégalaise figure parmi les économies les plus dynamiques du continent et le pays est en passe de devenir un carrefour commercial essentiel, doté d’un important secteur technologique. Cependant, ce développement ne sera pas possible si la question des défis hydriques n’est pas traitée. Atteindre la sécurité hydrique exigera des investissements en faveur d’une croissance résiliente ainsi que des réformes clés au niveau des institutions, notamment une refonte du cadre juridique et organisationnel des services d’eau et d’assainissement. La Banque mondiale reste engagée aux côtés du Sénégal pour développer des stratégies de long-terme et permettre une gestion durable des ressources en eau.