Ces dernières années, l’appui fourni par la Banque mondiale au développement communautaire a de plus en plus privilégié la création de plateformes nationales pour améliorer l’offre de services publics et lutter contre la pauvreté. La plupart des programmes, au départ limités à des opérations autonomes à petite échelle, se sont progressivement élargis à un périmètre plus vaste, souvent national. Ils s’inscrivent désormais dans le cadre de véritables stratégies de décentralisation et ont contribué à lever des obstacles multisectoriels.
Indonésie : lancé en 2018 et tirant parti de dispositifs efficaces créés dans le cadre de programmes communautaires précédents, le projet d’investissement dans la nutrition et la petite enfance (a) est une initiative phare du gouvernement indonésien pour prévenir le retard de croissance chez les enfants et investir dans le capital humain. Cette initiative intersectorielle sert la mise en œuvre d’une stratégie nationale visant à accélérer la prévention des retards de croissance. Le vice-président indonésien a donné le coup d’envoi de cette stratégie en août 2017. Elle implique 23 ministères, 514 gouvernements régionaux et 75 000 villages afin de combiner des interventions prioritaires en faveur des familles comptant des femmes enceintes et des enfants âgés de moins de deux ans, dans les secteurs de la santé, de l’eau et de l’assainissement, de l’éducation de la petite enfance, de la protection sociale, de l’agriculture et de la sécurité alimentaire.
Afghanistan : le projet de charte du citoyen (a) prévoit dans sa première phase d’offrir à dix millions de personnes l’accès à des services de base pour l’eau, les routes, l’irrigation, l’électricité et le suivi des services de l’éducation et de la santé. Le projet s’appuie sur une approche participative de développement piloté par les communautés afin de mieux satisfaire les citoyens et accroître leur confiance dans l’État. Il a déjà bénéficié à 13,6 millions de personnes et 7 172 autres projets sont en cours dans les secteurs de l’eau, de l’irrigation, de l’électricité, des transports, de l’école et autres. Les taux de participation aux élections des conseils locaux de développement sont élevés (77 % dans l’ensemble) et encore plus chez les femmes (78 %), les personnes handicapées, les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les rapatriés (83 %). Un financement supplémentaire a été approuvé pour soutenir une réponse d’urgence à la crise des déplacements régionaux à laquelle l’Afghanistan doit faire face en raison de l’afflux prévisible de plus d’un million de rapatriés en provenance du Pakistan et d’autres pays.
Le projet s’inscrit dans la continuité du programme de solidarité nationale (a), principale initiative publique de développement piloté par les communautés, dont le financement avoisine les 2,5 milliards de dollars. Le programme a concerné plus de 33 000 conseils locaux de développement élus par la communauté dans 34 provinces du pays et il a permis de financer plus de 81 000 projets d’infrastructures de proximité dans les secteurs de l’accès à l’eau et l’assainissement, les routes en milieu rural, l’irrigation, l’énergie, la santé et l’éducation. De 2003 à 2016, le programme a contribué à l’obtention des résultats suivants : construction ou remise en état de près de 53 600 kilomètres de routes ; accès à une source d’eau améliorée pour plus de 11,7 millions de personnes grâce à la construction d’environ 86 300 points d’eau collectifs, ce qui a permis de réduire de 5 % le temps passé par les familles, et surtout par les femmes, à l’approvisionnement en eau ; production de 32 mégawatts d’électricité ; irrigation de plus de 524 000 hectares de terres ; construction de 2 000 salles de classe. Ces travaux essentiels d’infrastructures rurales ont créé des emplois temporaires représentant plus de 52 millions de jours de travail.
Ce programme a fait l’objet d’une évaluation d’impact indépendante qui a mis en évidence une hausse de la fréquentation scolaire, une meilleure qualité de l’éducation des filles, une augmentation de 15 % de l’utilisation des sources d’eau protégées, une réduction de 5 % du temps passé par les familles à s’approvisionner en eau, une progression de 26 % de la consommation électrique et un meilleur accès des femmes à l’éducation, aux soins et aux services d’assistance.
L’Afghanistan utilise actuellement le projet de charte du citoyen (a) afin de mobiliser les habitants autour de campagnes de sensibilisation sur la COVID-19. Les chefs de village diffusent des informations d'importance vitale lors de petits rassemblements pendant lesquels les participants observent une stricte distanciation sociale et d'autres mesures de prévention. Le gouvernement étend actuellement le périmètre de ce programme, de même que celui d'un autre projet de développement communautaire baptisé REACH (a), pour couvrir 90 % du pays, soit 34 millions de personnes.
Bolivie : doté d’un financement de 40 millions de dollars, le projet d’investissement communautaire dans les zones rurales (a) a pour objectif de lutter contre l’extrême pauvreté des petits agriculteurs, en particulier parmi les populations autochtones. Lancé fin 2011, ce projet a abouti à un transfert de prérogatives et de ressources au profit de 362 620 habitants de 656 communautés rurales particulièrement vulnérables (30 % de plus que l’objectif initial de 500 communautés) et soutenu 880 sous-projets d’amélioration de l’accès des ménages ruraux à des infrastructures productives et essentielles. À ce jour, le projet a élargi l’accès aux infrastructures routières au profit de 29 866 personnes et accru ou amélioré les capacités d’irrigation pour 73 638 bénéficiaires. En 2015, le gouvernement bolivien a reçu un crédit additionnel de 60 millions de dollars (a) pour étendre et renforcer la réussite du projet, qui bénéficiera à 200 000 personnes supplémentaires.
Maroc : l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) a été lancée en 2005 pour améliorer les conditions de vie des populations pauvres et vulnérables, en leur assurant de meilleures possibilités de développement économique, un accès plus facile à des services sociaux et essentiels et une gouvernance améliorée. La phase 2 de l’INDH (2011-2015) a étendu la couverture démographique et géographique à 1 234 localités (contre 667 initialement), et porté le budget de 1,2 à 2,1 milliards de dollars en l’espace de cinq ans.
La Banque mondiale a appuyé la seconde phase de l’INDH dans le cadre de sa première opération de prêt-programme pour les résultats (a), en mettant l’accent sur l’élargissement de l’accès aux services et l’amélioration de la qualité, le renforcement d’une gouvernance locale participative et de la responsabilité sociale, une plus grande inclusion économique et un soutien au développement des capacités et des systèmes. Entre 2005 et 2015, le financement de plus de 45 000 sous-projets pilotés par les communautés a permis à plus de dix millions de bénéficiaires d’accéder à des infrastructures et des services sociaux et économiques essentiels, mais aussi de bénéficier de formations.
L’évaluation d’impact de l’INDH a révélé une augmentation de 86 % du nombre de ménages ayant accès à un meilleur approvisionnement en eau, un taux de passage dans la classe supérieure de 84 % chez les filles scolarisées dans des internats soutenus par le projet, une progression de 21 % du revenu moyen des ménages et une hausse de 62 % de l’accès aux infrastructures de base telles que les routes, l’électricité, l’assainissement, les écoles et les centres de santé locaux.
Nigéria : le projet de développement communautaire et social (a) a apporté son concours à plus de 15 111 microprojets pilotés par des communautés, bénéficiant directement à au moins 9,3 millions d’habitants répartis dans 30 États. L’évaluation d’impact de cette opération montre qu’elle a eu les effets suivants : réduction de la mortalité maternelle et infantile ; hausse de la scolarisation et de l’assiduité des élèves ; diminution de la distance à parcourir, donc du coût et des délais nécessaires pour accéder à l’eau, aux services de santé et à l’électricité ; accroissement des revenus des agriculteurs. La réussite du projet a conduit certains États et autorités locales à adopter l’approche de développement communautaire et à augmenter leurs dotations budgétaires aux activités pilotées par les communautés. La Banque mondiale a approuvé un prêt additionnel de 75 millions de dollars pour élargir et améliorer l’offre de services sociaux, notamment en faveur des populations déplacées fuyant le conflit qui sévit dans le nord-est du pays.
Il est désormais établi que la mise en œuvre de projets de développement communautaire est positive dans les pays fragiles et touchés par des conflits ainsi qu’à la suite de catastrophes naturelles, car elle permet de rétablir rapidement, efficacement et de façon modulable des services essentiels, y compris dans des zones peu sûres ou très difficiles d’accès. Des programmes de ce type ont notamment été mis en œuvre dans plusieurs États fragiles et touchés par un conflit en Afrique (a) — par exemple en Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, Guinée-Bissau, Libéria (a), Mali et Soudan du Sud (a) — ainsi qu’en Afghanistan, au Myanmar (a) et dans les Îles Salomon (a).
Dernière mise à jour: mars 19, 2021