Un projet aux résultats inattendus : quand la construction de l’avenir met au jour un passé enseveli en Croatie

16 janvier 2014


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À Pula, un projet de gestion des eaux usées entrepris le long de la côte Adriatique a permis de mettre au jour un bateau romain vieux de 2 000 ans.

Haut-lieu archéologique, la ville de Pula est située sur la côte Adriatique, en Croatie. Amphithéâtre romain datant du Ier s. apr. J-.C., « portes jumelles » du IIe s., monastère franciscain du XIIIe s. : les vestiges ne manquent pas, qui témoignent d’une histoire longue et riche et qui n’ont sans doute d’égal que les trésors encore enfouis dans le sous-sol de la cité...

Il n’est pas rare en effet, qu’à l’occasion d’un projet d’infrastructure, une nouvelle découverte archéologique soit mise au jour à Pula. Aussi les équipes en charge des travaux de construction ont-elles pris l’habitude d’intégrer dans leurs opérations des éléments de sauvegarde et de préservation du patrimoine. Et, même si elle n’a rien de rarissime, chacune de ces découvertes est accueillie avec enthousiasme car elle porte en elle la promesse d’autres trouvailles.

Cette expérience, une équipe travaillant avec la Banque mondiale l’a vécue, alors qu’elle creusait des tranchées pour créer un nouveau système de collecte des eaux usées à proximité du centre-ville. Une opération qui s’inscrit dans le cadre du deuxième projet de lutte contre les inondations dans les villes côtières (a), dont l’objectif est de moderniser le réseau d’assainissement le long du littoral croate, afin de réduire la pollution marine et d’améliorer la gestion des eaux usées.

« Nous avons attaqué le projet en 2007, rue Flacius », raconte Vedrana Rakovac, responsable du projet au sein de l’entreprise de service public Pula Herkulanea. « Comme nous avions déjà effectué des travaux dans cette rue, nous ne pensions pas qu’elle nous réserverait des surprises. Un événement imprévisible s’est pourtant produit, auquel nous ne nous attendions guère, pas plus que nos collègues archéologues. »

Vidéo : Pour en savoir plus sur cette découverte (a)


« Nous avons attaqué le projet en 2007, rue Flacius. Comme nous avions déjà effectué des travaux dans cette rue, nous ne pensions pas qu’elle nous réserverait des surprises. Un événement imprévisible s’est pourtant produit, auquel nous ne nous attendions guère, pas plus que nos collègues archéologues. »
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Vedrana Rakovac

Responsable du projet au sein de l’entreprise de service public Pula Herkulanea.

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Dès le début du projet, après avoir procédé à des excavations sur un petit rempart, Vedrana et ses collègues découvrent un petit bateau en bois qui, comme ils l’apprendront plus tard, était enseveli là depuis près de deux mille ans.

L’importance archéologique de cette découverte n’échappe pas à Vedrana, qui se tourne vers l’équipe en charge du projet à la Banque mondiale. Celle-ci fournira alors les ressources supplémentaires nécessaires à l’exhumation et à la conservation du bateau romain.

 « Nous avons été agréablement surpris d’apprendre que la Banque mondiale allait soutenir nos travaux », confie Vedrana, en expliquant qu’« il est peu fréquent de parvenir à financer un projet d’égouts et un projet archéologique avec des fonds provenant de la même source ».

Les ressources additionnelles ont servi à constituer une équipe d’experts locaux et internationaux chargés de déterrer le bateau, baptisé « Pula 2 », et d’initier le long travail que nécessite la conservation d’une telle pièce d’Antiquité. Ce processus, qui durera plus de deux années, réunit une équipe de spécialistes venue de France aux côtés de multiples intervenants locaux : archéologues, ingénieurs, historiens, etc.


« Nous avons été agréablement surpris d’apprendre que la Banque mondiale allait soutenir nos travaux, est peu fréquent de parvenir à financer un projet d’égouts et un projet archéologique avec des fonds provenant de la même source »
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Vedrana Rakovac

Responsable du projet au sein de l’entreprise de service public Pula Herkulanea.

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Une équipe d'experts déterre le bateau romain baptisé « Pula 2 »


Vidéo : Pour en savoir plus sur les fouilles (a)

Mais la découverte suscite déjà un grand émoi. Première embarcation de ce type découverte en Croatie sur la terre ferme, Pula 2 viendrait confirmer l’hypothèse selon laquelle les Romains auraient emprunté des techniques de construction navale aux habitants de l’Istrie — c’est sur cette péninsule qu’est située Pula et l’histoire de la ville remonte à quelque trois mille ans.

« Le système d’assemblage utilisé pour la fabrication de [Pula 2] est spécifique au nord de l’Adriatique et renvoie à une tradition préromaine », indique Marko Uhač, qui dirige les recherches archéologiques au ministère croate de la Culture. « Les habitants de l’Istrie ont transmis ce savoir-faire aux Romains, qui l’ont à leur tour utilisé pour construire leurs bateaux. »


« Le système d’assemblage utilisé pour la fabrication de [Pula 2] est spécifique au nord de l’Adriatique et renvoie à une tradition préromaine. Les habitants de l’Istrie ont transmis ce savoir-faire aux Romains, qui l’ont à leur tour utilisé pour construire leurs bateaux.  »
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Marko Uhač

Qui dirige les recherches archéologiques au ministère croate de la Culture

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Vidéo : Pour en savoir plus sur Pula 2 (a)

Toujours à Pula, l’embarcation repose actuellement dans une cuve pour y subir une opération de dessalement qui pourra prendre de quelques mois à deux ans. Puis il faudra extraire l’eau restée dans ses composants en bois et lui substituer de la cire. Au terme de ce processus, le bateau sera exposé au public ; il serait même envisagé de le reconstruire et d’exhiber sa réplique dans le port de Pula.

Vidéo : Pour en savoir plus sur le processus de conservation (a)

La morale de cette histoire ? En finançant le développement de l’infrastructure municipale à Pula, un projet soutenu par la Banque mondiale a contribué aussi à mettre au jour et préserver le patrimoine culturel de la ville, montrant ainsi que les résultats inattendus d’un projet peuvent être tout aussi gratifiants que ceux visés à l’origine... 

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