DISCOURS ET TRANSCRIPTIONS

Forum arabe pour le développement et l’emploi

24 février 2014


Inger Andersen, Vice-présidente, Moyen-Orient et Afrique du Nord Riyad, Arabie saoudite

Tel que préparé pour l'allocution

Monsieur Eng. Adel Faqih, Ministre du Travail du Royaume d’Arabie saoudite,

Monsieur Ahmed Luqman, Directeur général de l’Organisation arabe du travail,

Monsieur Guy Ryder, Directeur général de l’Organisation internationale du travail,

Monsieur le Président de la Banque islamique de développement,

Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Représentants de syndicats et d’organisations patronales,
Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d’abord d’adresser mes sincères remerciements au Gouvernement et au peuple de l’Arabie saoudite et à la ville de Riyad, qui ont bien voulu accueillir cet important forum, pour leur gracieuse hospitalité et l’accueil chaleureux qu’ils nous ont réservés.

C’est un honneur pour moi d’être parmi vous aujourd’hui pour partager quelques réflexions sur la façon dont nous pouvons concrétiser la promesse d’un avenir radieux pour la prochaine génération : un avenir fait d’emplois et d’opportunités pour tous.

L’emploi et l’accès au marché du travail continuent d’être un enjeu crucial pour le monde. Les emplois représentent une forme élémentaire de participation à la vie sociale et une source essentielle d’épanouissement personnel et d’estime de soi. Il est donc important de cerner les différents facteurs d’exclusion qui peuvent être à l’origine du chômage afin de mieux définir les politiques qui favorisent l’inclusion sociale.

Les pays arabes ont la chance d’avoir une population jeune, qui représente un atout majeur et l’espoir dans l’avenir. Toutefois, cette chance pose également des défis à la société et aux gouvernements. L’incapacité des économies à créer suffisamment d’emplois pour la multitude de nouveaux arrivants sur le marché du travail est à l’origine du chômage et de l’oisiveté accrus.

Voici ce que disent quelques ressortissants de pays arabes sur Twitter :

« Il n’y a pas d’emploi pour les femmes diplômées du secondaire. Aucune université ne nous admettra et aucun employeur ne veut de nous. Qu’est-ce que c’est que cette malédiction ? », a tweeté une jeune femme ce mois-ci.

« Je ne demande pas l’impossible et je ne veux pas prendre ce qui ne m’appartient pas. Je demande le plus simple de mes droits, c’est-à-dire un emploi qui correspond à mes qualifications », peut-on lire dans un autre tweet.

Ces voix s’élèvent des quatre coins de la région, à travers les médias sociaux, sur les campus universitaires, dans les cafés et lors de dîners dans les familles.

Les chiffres du chômage sont ahurissants. Et dans ce domaine, la région arabe surclasse constamment toutes les autres régions, et les jeunes et les femmes sont de très loin les plus touchés. Le taux de chômage s’élève à 54 %, et il englobe les personnes inactives et sans emploi âgées de 15 à 64 ans. Trois femmes en âge de travailler sur quatre ne participent pas à la vie active et représentent 80 % de la population inactive de la région.

Il ressort d’une étude de la Banque mondiale sur l’emploi et la prospérité partagée que les règles et les mesures d’incitation qui régissent les marchés du travail dans les pays arabes ont été inefficaces et inéquitables au regard des résultats.

Simplement dit, le problème comporte deux volets. Le premier : l’EMPLOI. Les économies de la région ne créent pas suffisamment d’emplois. Le deuxième : les COMPÉTENCES. Les qualifications d’un grand nombre de chercheurs d’emplois ne correspondent pas aux compétences recherchées sur le marché du travail.

Je voudrais maintenant parler de quatre aspects stratégiques qui permettent de s’attaquer aux questions de l’emploi dans la région MENA.

1.      Politiques encourageant la concurrence et les investissements du secteur privé dans la création d’emplois

La création d’une société ou d’une petite entreprise n’est pas une sinécure dans de nombreux pays arabes. Les règles, les formalités administratives, les règlementations, la bureaucratie et autres lourdeurs en font plutôt le parcours du combattant pour tout entrepreneur, surtout lorsque celui-ci est un jeune débutant. Souvent, ce n’est pas ce qu’on connaît, mais qui on connaît qui fait toute la différence.

Qui plus est, lorsque la concurrence est lente et faible, lorsque les nouvelles technologies ne sont pas adoptées rapidement, on constate que le démarrage des sociétés et des entreprises nouvellement établies est encore plus lent. L’innovation et la créativité s’en trouvent étouffées. Les entreprises deviennent moins agiles, lourdes, lentes dans l’action et obsolescentes. Pour optimiser la création d’emplois, les entreprises devraient être vives, dynamiques et rapides. Mais cela suppose un changement du cadre dans lequel elles opèrent.

Toutefois, je dois dire que certains pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord ont pris des mesures peu onéreuses pour améliorer la transparence et éliminer certains obstacles à l’entrée.  

2.      Harmoniser les conditions d’emploi pour que les secteurs public et privé puissent rivaliser sur un pied d’égalité

 Ici, nous notons que le mouvement de la main-d’œuvre qualifiée vers les secteurs productifs continue d’être limité. Le secteur public dans la région continue d’offrir de meilleures conditions d’emploi. Les restrictions imposées à l’entrée dans le secteur privé formel ont contribué à accroître les taux d’emploi informel et de chômage, en particulier parmi les jeunes et les femmes.

 Par conséquent, l’évolution vers des réglementations moins restrictives régissant le marché du travail serait plus bénéfique et plus facile à assurer. Conjuguée à une réforme des conditions d’emploi dans le secteur public, cette évolution donnerait lieu à des gains encore plus importants sur le plan de l’emploi.

3.      Pallier le déficit d’information par la méritocratie, des choix professionnels et l’offre d’une seconde chance

Bien connu dans le monde arabe, le terme « wasta » renvoie à un problème structurel dans les recrutements et le processus consistant à pourvoir des postes. Malheureusement, le mérite et la compétence continuent d’importer peu dans l’obtention d’un emploi. Une plus grande place faite à la méritocratie pour accéder aux possibilités d’éducation et de recrutement, la disponibilité de formations techniques et professionnelles de qualité, et l’offre d’une deuxième chance sont des éléments clés du développement d’une main-d’œuvre productive. Ces éléments aident également à créer la demande des compétences « qu’il faut » dans les domaines « indiqués ». Ils contribuent aussi à réduire l’inadéquation entre l’éducation et les besoins du marché du travail.

4.      Rompre le cercle vicieux pour les couches défavorisées

Il est important de comprendre et de reconnaître que les opportunités qui se présentent aux personnes sont souvent fonction du lieu de naissance de ces dernières, de leur statut social, de leur sexe, de leur handicap ou du niveau d’éducation de leurs parents. La justice sociale a donc son importance. Aujourd’hui, dans bien de pays arabes, les perspectives d’avenir d’un individu sont déterminées par des facteurs qui échappent à son contrôle.

Il est donc nécessaire que les pays de la région favorisent l’évolution vers des programmes ciblés de protection sociale afin que tous les citoyens aient une chance de progresser dans la vie, quelles que soient les circonstances de leur naissance. De tels programmes de réformes pourraient inclure le réexamen des politiques d’octroi de subventions universelles, et l’affectation des ressources qui en seraient dégagées à la protection des pauvres à travers des programmes de protection et de sécurité sociales.

En conclusion,

La population est le plus important atout de toute économie. Et le monde arabe a la chance d’avoir une population jeune, dynamique, déterminée et mobilisée, qui veut contribuer à l’édification de la société de demain en participant activement au marché du travail et à l’activité économique. Il s’agit là d’un énorme avantage, car nous savons que l’imagination, l’audace, le courage et l’esprit d’aventure caractérisent les jeunes. Si une petite chance leur est donnée, avec la grâce de Dieu, ils créeront une entreprise, feront leur entrée sur le marché du travail, innoveront et créeront. Et, ce faisant, ils pourront aider à créer une économie dynamique qui offre des emplois et des chances à tous.

Nous avons la responsabilité, nous gouvernements, syndicats, employeurs et organisations internationales, de ne ménager aucun effort pour accompagner la région en œuvrant à la réalisation de la promesse de l’avenir.

Des manifestations telles que le présent forum représentent l’occasion idoine de mener une réflexion et d’élaborer des stratégies concernant les meilleures politiques à appliquer. Ensemble, nous pouvons définir les enjeux de l’heure et convenir de la marche à suivre.

Je vous remercie de votre très aimable attention.



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