Moroni, le 25 juin 2025 — L'économie des Comores montre des signes de reprise, dépassant les niveaux d'avant la COVID-19. La croissance est passée de 3 % en 2023 à 3,4 % en 2024, portée par une hausse de la consommation des ménages. Cette dynamique s’explique notamment par une augmentation de 5,4 % des envois de fonds et la bonne performance du secteur des services. L'inflation annuelle moyenne a ralenti, passant de 8,5 % à 5,0 % en 2024, grâce à la stabilisation des prix mondiaux des matières premières et à la baisse de l'inflation dans la zone euro. D’ici 2027, la croissance pourrait atteindre 4 %, soutenue par la consommation et les investissements prévus. Cependant, la pauvreté ne devrait reculer que légèrement, en raison de la croissance modeste du PIB, d’importantes inégalités et d’une protection sociale limitée. En 2024, le taux de pauvreté est estimé à 38,1 % (sur la base du seuil de pauvreté à revenu intermédiaire inférieur de 3,65 dollars par jour) et devrait légèrement diminuer à 37,2 % en 2025.
« La pauvreté persistante et les fortes inégalités aux Comores reflètent de profondes disparités régionales et des défis structurels. La faible participation au marché du travail, le sous-emploi et l'accès limité à une éducation de qualité continuent de freiner la productivité et les revenus. Les envois de fonds apportent un soutien précieux à court terme, mais ils ne peuvent remplacer une économie forte et autonome », a déclaré Boubacar-Sid Barry, Représentant résident de la Banque mondiale aux Comores. « Sans réformes ambitieuses, la pauvreté risque de s'aggraver. La Banque mondiale reste pleinement engagée aux côtés des Comores pour accompagner une croissance plus inclusive et durable. »
Cette édition de la note de conjoncture économique de la Banque mondiale aux Comores, intitulée Un Océan d’opportunités - L’économie Bleue Comme Moteur de Croissance Durable souligne que, sans réformes structurelles pour lever les obstacles à l’investissement et améliorer la compétitivité à l’international, la croissance économique des Comores restera fragile. Cela limiterait la création d’emplois et la hausse des revenus nécessaires pour réduire la pauvreté et mieux faire face aux chocs futurs. Le rapport alerte également sur des risques importants. Le pays reste très exposé aux catastrophes climatiques, tandis que les pressions budgétaires, les passifs éventuels des entreprises publiques et la fragilité du secteur bancaire accentuent les vulnérabilités macroéconomiques. Le déficit de la balance courante devrait se creuser à moyen terme, en raison de déséquilibres commerciaux persistants et de l’augmentation des importations liées aux infrastructures. Il est donc essentiel de diversifier les exportations, de renforcer les réserves extérieures et d’adopter des stratégies de financement durables.
La note de conjoncture économique met en avant l’économie bleue comme une opportunité majeure pour une croissance plus inclusive et durable. Avec des réformes ciblées et des investissements stratégiques, les Comores pourraient aspirer à devenir un pays à revenu intermédiaire supérieur d’ici 2050, à condition de maintenir une croissance annuelle du PIB de 6,1 %. Le secteur de la pêche affiche déjà de bonnes performances, représentant en moyenne 11,4 % du PIB entre 2018 et 2024. Sa modernisation pourrait porter cette part à 16 % d’ici 2035. Le tourisme maritime offre également un fort potentiel : il pourrait quadrupler le nombre de visiteurs d’ici 2030 et contribuer à plus de 6 % du PIB à l’horizon 2050.
Un développement intégré de la pêche durable, de l’écotourisme et de la conservation marine pourrait générer une croissance inclusive tout en protégeant les écosystèmes naturels. La réussite de cette transition dépendra toutefois de la restauration du capital naturel, de l’expansion des énergies renouvelables, de la modernisation des infrastructures et du renforcement des mesures de protection de l'environnement.
« Les Comores sont à un moment charnière de leur développement. La transition vers les services et l’économie bleue offre une réelle opportunité pour positionner le pays comme un acteur régional de premier plan en matière de durabilité. D’ici 2040, les services pourraient représenter près des deux tiers du PIB, avec le tourisme et la pêche comme moteurs d’une croissance plus inclusive. Pour concrétiser ce potentiel, il faudra une gouvernance efficace et des investissements soutenus dans ces secteurs clés. Cela permettra de créer des opportunités durables pour les populations tout en préservant les ressources naturelles du pays », a déclaré Patrick John McCartney, économiste principal à la Banque mondiale aux Comores et auteur du rapport.
Une stratégie d'économie bleue bien mise en œuvre peut positionner les Comores comme un leader régional en matière de gestion durable des ressources marines, tout en favorisant la diversification économique, la création d'emplois et la résilience face aux chocs. Pour en tirer pleinement parti, il sera essentiel de mieux coordonner les secteurs de la pêche, du tourisme et de la protection de l’environnement, afin de maximiser les bénéfices économiques tout en préservant les richesses naturelles du pays. Des investissements ciblés dans la gouvernance, les infrastructures, l’accès aux marchés et la durabilité environnementale permettront de faire de l’économie bleue un véritable pilier du développement national. Cette ambition s’inscrit dans la vision du Plan Comores Émergent 2030 (PCE 2030). En valorisant pleinement leur potentiel marin, les Comores peuvent ouvrir la voie à un avenir plus prospère et durable, et viser le statut de pays à revenu intermédiaire supérieur d’ici 2050.