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ARTICLE 14 novembre 2017

Transferts monétaires au Bénin : une riposte à la traite des enfants

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LES POINTS MARQUANTS

  • A Za-Kpota, une des 77 communes du Bénin, le programme pilote de filets sociaux financé par la Banque mondiale a permis de réduire la traite des enfants en direction du Nigéria.
  • Environ 13 000 ménages béninois dans 125 villages du pays ont bénéficié de ce programme destiné à lutter contre l’extrême pauvreté.
  • Le versement d’allocations et d’une rémunération en échange de travaux d’intérêt collectif ont permis de réintégrer socialement et économiquement des ménages exclus.

ZA-KPOTA, le 14 novembre 2017‒La commune de Za-Kpota, au centre du Bénin, a longtemps eu la triste réputation de servir de base-arrière à la traite des enfants en direction du Nigéria pour être exploités comme main-d’œuvre très bon marché dans les carrières de pierre d’Abéokuta et apporter un maigre revenu à leurs familles pauvres. Mais depuis deux ans, les allocations familiales, instaurées par un programme pilote de filets sociaux, apportent un revenu stable aux parents qui n'ont plus besoin d’envoyer leurs enfants travailler au Nigéria.

Une transformation que nous avons pu observer le 16 octobre 2017, la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, lorsque nous nous sommes rendus dans le village de Lontonkpa, l’une des zones de concentration de la traite, avec des organisations de la société civile et des journalistes pour évaluer l’impact de ce programme.

L’allocation mensuelle de 3500 francs CFA versée à chaque ménage pauvre et un salaire mensuel supplémentaire de 9600 francs CFA pour chaque personne engagée dans des travaux mobilisateurs d’intérêt collectifs (TMIC) durant les quatre mois de la période de soudure, ont radicalement changé la vie de cette communauté.

« Avant, il y avait beaucoup de souffrance dans notre village, c’est à contre cœur et pour avoir de quoi manger, que nous envoyions nos enfants travailler au Nigéria. Aujourd’hui, l’argent que je perçois à la fin de chaque mois me permet d’envoyer facilement mes enfants à l’école au lieu de les faire travailler. Les jeunes palmiers de Lontonkpa ont aussi retrouvé la paix, depuis qu’on n’abat plus leurs branchages pour fabriquer des balais et gagner un peu d’argent », témoigne Yvette Adangnonhou, qui bénéficie de ce programme d’allocation.

A côté d’elle, Léonie Kanhou Tougan, une autre bénéficiaire, nous explique qu’elle a pu se lancer dans une activité génératrice de revenu et économiser suffisamment d’argent pour changer la toiture de sa maison. « Nous avons institué une caisse commune mensuelle de 2000 francs CFA par tête. J’ai travaillé aussi sur le chantier d’aménagement de pistes, ce qui m’a permis de démarrer un élevage de porcs. Aujourd’hui, même si le projet prend fin, je n’aurai pas à me plaindre, j’ai de quoi vivre », confie-t-elle.

Le programme pilote de filets sociaux est mis en œuvre par le Projet de services décentralisés conduits par les communautés (PSDCC) financé par la Banque mondiale. Il a permis à 13 000 ménages béninois extrêmement pauvres dans 125 villages de bénéficier pendant deux ans de transferts monétaires réguliers pour un montant total de près de 2,3 milliards de francs CFA (soit environ quatre millions de dollars).

« Dans de nombreux villages du Bénin, il y a encore des personnes qui n’arrivent pas à manger à leur faim sans aide. Ces transferts ont pu leur rendre leur dignité et les intégrer socialement », explique Germain Ouin-Ouro, secrétaire exécutif du PSDCC.

Dans la commune de Za-Kpota, le programme pilote de filets sociaux a été mis en œuvre dans 12 villages au profit de 1492 ménages extrêmement pauvres. À Lontonkpa, les travaux mobilisateurs d’intérêt collectif (TMIC) ont permis d’aménager la piste principale qui dessert le village. « Avant, il était quasi-impossible de circuler à bicyclette sur cette piste qui était en réalité un sentier. Aujourd’hui, cet ouvrage est une fierté pour la communauté qui a le mérite de l’avoir construit de ses propres mains », souligne fièrement Cyprien Djiholissè, l’un des bénéficiaires des transferts conditionnels.

Au-delà des transferts et de l’aménagement de la piste rurale, le projet a creusé trois puits pour permettre aux habitants d’avoir accès à de l’eau potable. Une amélioration qui soulage Antoine Affokpofi, maire de la commune de Za-Kpota : « Nous n’arrivons pas à faire le minimum pour nos communautés. Notre engagement, c’est de faire en sorte que la relève des divers projets soit assurée. Tant qu’il y aura des pauvres, nous ne pourrons pas nous enorgueillir de notre mandat », insiste-t-il. Pour lui, les différentes actions du projet sont primordiales car elles visent à réduire l’extrême pauvreté et l’exclusion sociale.

Le PSDCC, dont le montant total s’élève à 76 millions de dollars, soit plus de 37 milliards de francs CFA a démarré en 2013 et couvre toutes les 77 communes du Bénin. Il a pour but de renforcer le capital humain et contribue à doter les communes et communautés bénéficiaires de capacités suffisantes pour réussir à prendre en charge leur propre développement en identifiant elles-mêmes les sous-projets nécessaires et en s’impliquant activement dans leur réalisation.

Au 30 septembre 2017, le projet avait mis en œuvre 813 sous-projets communautaires et 231 sous-projets communaux profitant directement à 310 349 bénéficiaires, dont 48,18 % de femmes. 1404 salles de classes ont ainsi été construites et réhabilitées pour offrir de meilleures conditions d’apprentissage à 59 918 élèves du cours primaire. Diverses infrastructures socio communautaires ont également été construites, notamment 251 points d’eau potable (servant à près de 62 750 personnes), 62 centres de santé (bénéficiant à 6000 personnes) et des travaux d’intérêt collectif qui ont généré plus 1,5 million d’emplois.   



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