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L'histoire édifiante de deux ports indonésiens

26 mai 2015


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Les grues imposantes du port de Tanjung Priok, le plus moderne et le plus performant d'Indonésie.


LES POINTS MARQUANTS
  • Alors que les liaisons maritimes sont vitales pour l'Indonésie, les ports du pays nécessitent d'importants efforts de modernisation pour réduire les coûts liés au transport des marchandises.
  • Le poids des coûts logistiques, qui figurent parmi les plus élevés d'Asie de l'Est, s’explique par des problèmes d'organisation et d'équipements, comme a pu le constater le président du Groupe de la Banque mondiale en visitant à Djakarta deux ports aux antipodes.
  • Le Groupe de la Banque mondiale intensifie actuellement son appui aux efforts engagés par l'Indonésie pour renforcer sa logistique maritime et améliorer ses infrastructures portuaires dans le but de réduire les coûts et de renforcer la compétitivité du pays.

Djakarta, Indonésie, 26 mai 2015 - À son apogée, il y a quelques siècles, le port de Sunda Kelapa était un centre d'échanges commerciaux très actif, et même l'un des principaux ports de l'archipel. Aujourd'hui, le port accueille les petites embarcations traditionnelles en bois qui font la navette entre Djakarta et la myriade de zones reculées du pays. Les installations y sont rudimentaires et les marchandises sont généralement déchargées manuellement des bateaux, ce qui entraîne bien souvent des pertes importantes à cause des inévitables chutes et autres dommages.

À seulement quelques kilomètres plus au Sud, on trouve le terminal international de Tanjung Priok. Équipé des technologies les plus modernes, c'est le port le plus important et le plus performant d'Indonésie pour le trafic de conteneurs. Et il est en pleine expansion, avec un nouveau terminal en mer qui augmentera considérablement sa capacité.

Ces deux ports montrent clairement qu'il existe deux Indonésies : l'une moderne et compétitive, l'autre bloquée dans le passé et limitée par un manque criant de ressources.

Au cours de la visite qu'il a effectuée dans ces deux ports la semaine dernière, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim s'est engagé à fournir jusqu'à 12 milliards de dollars de financements nouveaux à l'Indonésie sur les trois à quatre prochaines années, notamment pour financer des ports maritimes, des routes d'accès à ces infrastructures et d'autres projets destinés à améliorer les liaisons et la logistique maritimes. On estime que le déficit d'infrastructures de l'Indonésie s'élèverait à 600 milliards de dollars pour les cinq prochaines années, et que les infrastructures maritimes et logistiques nécessiteraient un investissement total de 50 milliards de dollars au cours des cinq à dix prochaines années.

« Nous allons mobiliser tout le poids de l'institution et toutes les méthodes innovantes à notre disposition pour fournir les conseils et les financements dont l'Indonésie a besoin pour réaliser ses ambitions : bâtir ce qui pourrait devenir une super-autoroute maritime, susceptible de doper la croissance économique du pays de 2 % chaque année », a expliqué Jim Yong Kim, devant un alignement impressionnant de porte-conteneurs dans le port de Tanjung Priok.



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Le président du Groupe de la Banque mondiale Jim Yong Kim en visite dans le port de Sunda Kelapa, à Djakarta (Indonésie), le 21 mai 2015.


Les liaisons maritimes demeurent un immense défi pour un pays composé d'une multitude d'îles

Avec quelque 10 000 îles habitées et dispersées sur une zone aussi étendue que le continent nord-américain, le transport maritime est vital pour connecter les Indonésiens entre eux et à leurs partenaires commerciaux régionaux.

Or les insuffisances dont souffrent les infrastructures, l'organisation et la logistique des échanges maritimes continuent de perturber la connexion entre les îles et de saper les échanges commerciaux et la compétitivité du pays. La plupart des ports maritimes d'Indonésie fonctionnent comme celui de Sunda Kelapa, ce qui se traduit par d'importantes pertes d'efficacité qui font nettement grimper les coûts logistiques pour les entreprises et les consommateurs. En Indonésie, les coûts logistiques représentent 24 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui constitue un frein majeur pour la croissance économique du pays.

Si l'Indonésie parvenait à ramener ses coûts logistiques à 16 % du PIB, comme en Thaïlande, on estime que cela ferait économiser aux entreprises, aux administrations et aux ménages entre 70 et 80 milliards de dollars par an.

Le pays est encore loin du compte. Bien que le port de Tanjung Priok ait massivement investi dans des équipements modernes et amélioré les systèmes de gestion utilisés dans son terminal international, ses performances sont inférieures à celles des ports équivalents dans les pays voisins. Après son déchargement dans le port de Priok, un conteneur doit attendre six jours avant de repartir… Cette durée d'immobilisation est deux fois plus longue qu'en Malaisie et cinq fois plus qu'à Singapour. Et le délai est encore plus important dans d'autres ports indonésiens.

Ces coûts supérieurs sont bien évidemment répercutés sur les consommateurs. Du fait de l'inefficacité des installations portuaires mais aussi de la piètre qualité des liaisons entre les ports et l'arrière-pays, bon nombre des biens de première nécessité sont deux fois plus chers dans l'Est de l'Indonésie qu'à Java.

Il suffit de citer l’exemple des oranges importées de Chine, qui sont souvent moins chères que les oranges indonésiennes vendues en dehors de leur île de production. À l'inverse, les pêcheurs de Papua (l'île située dans la partie la plus orientale de l'Indonésie) ne parviennent à vendre leur thon de meilleure qualité qu'à 4 dollar le kilo sur l'ile, soit moins du dixième du prix que celui-ci peut atteindre à l'étranger.

Améliorer les liaisons et la logistique maritimes

Pour remédier à l’ensemble de ces difficultés, l'Indonésie dispose d'un certain nombre d’options. Elle pourrait, en premier lieu, changer de perspective et, comme disent les Anglo-Saxons, « penser en dehors de la boîte », ce qui signifie dans ce cas, littéralement, d'arrêter de se concentrer sur les conteneurs. Jusqu'à présent, les politiques publiques et les investissements se sont concentrés sur l'efficacité du transport de ces « boîtes » au sein des enceintes portuaires. Un changement d'orientation s'impose, pour envisager l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, les contraintes opérationnelles sous-jacentes et les liaisons entre les ports et l'arrière-pays.

Par exemple, de nombreux ports indonésiens devraient envisager d'effectuer les opérations de remplissage et de vidage des conteneurs en dehors de leur enceinte afin de libérer de l'espace, denrée précieuse s'il en est, et de gagner en efficacité.

Parallèlement, les transports routiers entre les différents sites sont souvent ralentis par des embouteillages. Par exemple, le transport d'un conteneur entre la zone industrielle de Cikarang et le port de Tanjung Priok peut prendre jusqu'à six heures, pour une distance de seulement 35 kilomètres. Une partie de la solution consiste donc à améliorer la composante terrestre de la chaîne logistique.

Aujourd’hui, le Groupe de la Banque mondiale entend s’appuyer sur les précédentes activités qu’il a entreprises en Indonésie dans le secteur portuaire pour développer, en collaboration avec toutes les parties prenantes publiques et privées du pays, des solutions globales aux problèmes de la logistique maritime et des liaisons de transport. Car des interventions isolées, qui ne tiennent pas compte de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, ne permettront pas d'obtenir les améliorations indispensables.

« Le Groupe de la Banque mondiale fera tout son possible pour soutenir les activités maritimes indonésiennes afin que l'ensemble des citoyens du pays bénéficient des investissements réalisés et de la promesse de prospérité partagée qu'ils portent », a affirmé Jim Yong Kim.


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