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Les apports du droit et de la justice pour une science de la prestation réussie en matière de développement

13 novembre 2013


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Une aide-soignante du service de pédiatrie de la Clinique du district de Bonthe en Sierra Leone administrant un vaccin. 

© Margaux Hall/Banque Mondiale

LES POINTS MARQUANTS
  • La mise en œuvre des projets de développement peut être améliorée en s’assurant que les populations sont entendues, que le contrat social et l’obligation de rendre des comptes sont respectés.
  • Les équipes de la Banque mondiale travaillent à la création de nouveaux outils et savoirs dans le domaine du droit et de la justice afin de contribuer à la réalisation de ces projets.
  • La semaine Droit, Justice et Développement 2013, organisée par la Banque mondiale du 18 au 22 novembre à Washington, explorera le concept émergent de « Science de la prestation » et ses implications en termes de droit et de justice.

Dans une clinique du district de Moyamba, au sud de la Sierra Leone, des mères attendent pour que leur bébé reçoive les vaccins gratuits fournis par l’Etat. C’est une image d’espoir dans un pays qui connaît l’un des taux de mortalité maternelle parmi les plus élevés : une femme sur sept meurt en cours de grossesse ou lors de  l’accouchement. Cependant, quand son tour arrive, chaque mère doit faire face à l’infirmière qui lui demande six tasses de riz avant d’administrer le vaccin. Les mères ne peuvent que s’y soumettre.

De l’autre côté de la frontière, dans l’Etat voisin du Libéria, les communautés de Bomi Hills  souffrent également, mais d’une autre façon, de l’échec de la prestation de services qui leur sont pourtant destinés. Les résidents de la région autrefois connue sous le nom de « Bomi Holes » ou « trous de Bomi » en raison de la longue tradition d’extraction de minerai de fer, ont bien été invités par les instances officielles à coopérer avec les investisseurs étrangers dans le domaine minier et agricole, en vue de promouvoir l’intérêt général. Malgré les investissements réalisés, cette région présente des indicateurs de développement particulièrement bas, ses habitants font face à une hausse de l’insécurité alimentaire et subissent régulièrement des déplacements de population. Sans institutions publiques crédibles pour poser un cadre pour les investissements, pour entendre les plaintes et y apporter des réponses, les  tensions qui résultent de cette situation ont de façon répétée dégénéré en troubles mettant en péril les efforts déployés pour le développement de la région.

Ces histoires trouvent un écho dans de nombreuses parties du monde. Trop peu d’attention a été accordée à la façon dont les services devraient être mis en œuvre pour profiter à ceux qui en ont le plus besoin. En conséquence, l’accès de ces populations défavorisées aux services essentiels, qui est l’objet même des actions de développement, n’est pas garanti ni effectif. La « science de la prestation » met justement l’accent sur les modalités de réalisation des projets, en se concentrant sur la résolution des problèmes et afin de construire des solutions prenant en compte les spécificités du contexte dans lequel elles interviennent. Il s’agit d’identifier en un même mouvement les besoins structurels, les moyens d’y répondre ainsi que les leviers d’action efficaces pour la réalisation des objectifs du développement.


« Il est nécessaire d’aborder les questions relatives au développement à travers le prisme de la justice, car quand elle est liée au droit, la justice peut ouvrir une infinité de voies nouvelles pour parvenir à des résultats significatifs et durables en matière de développement.  »
Hassane Cissé

Hassane Cissé

Conseiller juridique adjoint, chargé de la connaissance et des études, Vice-présidence juridique, Banque mondiale

Il est communément admis, dans la littérature relative au développement, que certains outils du droit et de la justice s’appuyant sur des valeurs telles que l’écoute des populations, le contrat social et l’obligation de rendre compte, quand ils sont conçus et mis en œuvre de façon appropriée, peuvent faire la différence quant à la qualité et l’effectivité de la prestation proposée. Dès lors, les équipes de la Banque travaillent sur les moyens innovants d’utiliser ces outils du droit et de la justice pour parvenir à la mise en œuvre effective des actions pour le développement.

  • L’écoute des populations nécessite que toutes les couches de la société puissent se faire entendre au travers de leur participation et la mise en place de mécanismes de consultation sur les questions d’importance.
  • Le contrat social s’assure qu’il existe une définition équilibrée des droits et obligations des parties concernées et qu’elles reçoivent une part équitable des bénéfices en termes économiques et de protections sociales.
  • L’obligation de rendre des comptes renvoie les acteurs majeurs à leurs responsabilités et s’assure, lorsque les obligations ne sont pas remplies, qu’un recours existe pour les personnes qui en subissent les conséquences.

Le Groupe de la Banque mondiale et ses partenaires appliquent également ces outils et ces approches du droit et de la justice pour  améliorer la prestation conçue et mise en œuvre dans les différents secteurs d’intervention des programmes de développement.

En Sierra Leone, par exemple, le programme Justice pour les Pauvres  (Justice for the Poor, J4P) apporte ainsi son soutien à l’Etat et aux acteurs de la société civile dans l’objectif de concevoir des interventions qui mettent l’accent sur la place du droit et l’obligation de rendre des comptes dans le domaine des services de soins.  J4P teste et évalue d’une part, la qualité des services rendus dans une clinique dirigée à l’échelon local, et d’autre part, la formation d’assistants juridiques pour répondre aux plaintes relatives au système de santé, toujours au niveau local. Ainsi, les représentants locaux et le personnel de la clinique passent en revue les indicateurs montrant les performances de celle-ci. Ils rédigent ensuite ensemble un plan d’action commun identifiant les moyens qu’ils peuvent chacun mettre en œuvre pour améliorer la santé des habitants. Enfin, après une période de quelques mois, ils supervisent mutuellement leurs performances.

Un projet similaire a également été lancé au Libéria. Il est destiné à prendre en compte l’avis de la population locale, d’étendre le niveau de contrat social et l’obligation de rendre des comptes en vue de réduire les conflits et répondre aux plaintes des populations dans les zones de concessions minières. Ce projet se concentrera ainsi sur l’amélioration des stratégies visant à favoriser la participation des citoyens aux négociations et à la mise en place des investissements miniers. Il contribue à démontrer comment les outils du droit et de la justice peuvent donner de meilleurs résultats en matière de développement, en particulier au profit des plus démunis.

La semaine Droit, Justice et Développement 2013  organisée par le Groupe de la Banque Mondiale se tiendra du 18 au 22 novembre au siège de l’organisation, à Washington D.C. Elle permettra d’explorer la façon de construire une science de la prestation tirant profit des outils du droit et de la justice et de l’intégrer dans le cadre actuel des politiques de développement. La semaine rassemblera des acteurs majeurs issus de gouvernements, d’institutions financières internationales, de la recherche sur le droit et la justice et de la société civile, qui partageront leurs idées et réfléchiront ensemble à des modalités innovantes d’intervention pour répondre aux enjeux globaux, régionaux et nationaux du développement.


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