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Santé maternelle et infantile : quand les pays subordonnent les financements aux résultats

20 mai 2011


LES POINTS MARQUANTS
  • Comment parvenir à atteindre les objectifs de développement pour le Millénaire relatifs à la santé maternelle et infantile : une question au centre de l'Assemblée mondiale de la santé réunie.
  • Baser les financements sur les résultats : les pays se tournent vers de nouvelles stratégies pour optimiser l'impact des investissements dans la santé.
  • Au Rwanda, en Afghanistan et en Argentine, les taux de mortalité infantile baissent tandis qu'augmentent les accouchements en centres de santé et les visites de contrôle prénatal.

20 mai 2011—Dirigeants et ministres de la Santé du monde entier se réunissent cette semaine à Genève (Suisse) pour participer à l’Assemblée annuelle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Leurs discussions seront dominées par une question qui a un impact essentiel sur le plan du développement : comment améliorer radicalement la santé de millions de personnes à travers le monde d’ici 2015, conformément aux engagements pris dans le cadre des objectifs de développement pour le Millénaire (ODM) ?

Alors que de nombreux pays sont encore loin d’atteindre les ODM relatifs à la santé maternelle et infantile, leurs gouvernements s’efforcent de trouver, en collaboration avec leurs partenaires de développement, de nouvelles stratégies qui permettraient d’augmenter l’impact des investissements dans la santé. Parmi ces stratégies, les approches de financement basé sur les résultats (RBF) appuyées par la Banque mondiale dans des pays à revenu faible ou intermédiaire ont permis de faire progresser l’utilisation des services de santé, d’améliorer la qualité et l’efficacité des services, et de renforcer la qualité des soins.

La stratégie de la Banque dans le secteur Santé, nutrition et population (pdf), adoptée en 2007, a en effet placé les résultats au centre des priorités de l’institution et fixé comme objectif de mieux lier les prêts aux performances en recourant davantage aux financements basés sur les résultats. Afin de soutenir le développement et la mise en œuvre de cette approche dans les pays, la banque a mis en place un Fonds fiduciaire d’innovation pour l’obtention de résultats dans le secteur de la santé (HRITF). Celui-ci joue un rôle majeur dans le déploiement des financements basés sur les résultats dans de nombreux pays.

Subordonner les budgets aux résultats

Cette approche vient de faire l’objet d’une conférence internationale organisée par la Banque : un mois avant l’Assemblée mondiale de la santé, cette conférence a réuni des représentants de ministères de la Santé et des Finances, des organisations non gouvernementales (ONG), des bailleurs de fonds, des fondations et des instituts universitaires et de recherche de plus de 15 pays afin de débattre des mécanismes de financement basé sur les résultats, des difficultés de leur mise en œuvre et des enseignements à en tirer. 

Le principe de cette approche de financement consiste à se concentrer sur les résultats — soit par exemple le nombre de femmes qui reçoivent des soins prénataux suffisamment tôt et accouchent dans des centres de santé — plutôt que sur les ressources — la construction de centres de santé et la formation du personnel — et à lier étroitement les budgets et financements aux résultats.

Comme le souligne Darren Dorkin, chargé des opérations senior pour le secteur Santé, nutrition et population à la Banque mondiale, « il est indispensable d’investir dans les systèmes de santé pour briser le cycle de la pauvreté, améliorer la santé des nations et sauver un nombre incalculable de vies ». Mais, souligne M. Dorkin, « si la fourniture de technologies vitales, la construction de cliniques et la formation des personnels sont des éléments essentiels des systèmes de santé, les pays doivent aussi prendre des mesures d’incitation pour augmenter à la fois l’offre et la demande dans un contexte d’insuffisance des services sanitaires ».

Les programmes de financement basé sur les résultats peuvent en effet intervenir au niveau de l’offre ou de la demande des services de santé. Dans le premier cas, il s’agira d’inciter les équipements sanitaires à fournir des services performants, non seulement en termes de quantité mais aussi en termes de qualité. Dans le second cas, ce sont des groupes de population ciblés qui reçoivent des incitations financières ou en nature pour surmonter les barrières qui entravent leur recours aux services sanitaires. Certains pays ont mis en place des programmes de financement basé sur les résultats qui combinent les incitations tant du côté de l‘offre que de la demande.

Optimiser l’impact des soins : les exemples rwandais, afghan et argentin

Dans l’ensemble du monde en développement, ces approches ont commencé à porter leurs fruits.

C’est le cas au Rwanda, où des ressources pourtant limitées parviennent à optimiser l’impact des soins de santé. Le recours aux financements basés sur les résultats a permis une augmentation de 21 % des accouchements en centres de santé, une hausse de 64 % des visites médicales préventives chez les enfants de moins de 2 ans et un bond de 133 % des consultations chez les enfants âgés de 2 à 5 ans. Une simple augmentation des ressources accordées aux équipements de santé n’aurait pas permis d’atteindre les mêmes résultats. L’opération menée au Rwanda compte parmi les 16 expériences pilotes financées par la Banque via le HRITF.

En Afghanistan, l’appui de la Banque aux efforts des pouvoirs publics a contribué à faire baisser, en trois ans seulement, le taux de mortalité des enfants de moins d’un an de 22 % et celui des moins de 5 ans de 26 %. Face aux problèmes rencontrés après la guerre pour assurer la prestation des services sanitaires, l’État a sous-traité celle-ci à des ONG spécialisées à partir de 2002. Les contrats étant axés sur la performance, les ONG ont eu le champ libre pour obtenir les résultats visés en faisant un usage innovant des ressources. La qualité des soins a augmenté de 32 % pour l’ensemble des équipements sanitaires sous contrat.

En Argentine, le plan Nacer consiste à subventionner des prestataires pour qu’ils fournissent gratuitement des prestations (80 au total) aux femmes enceintes, aux mères et aux enfants de moins de 6 ans. Selon une première évaluation, ce programme d’assurance sociale a permis, entre autres résultats notables, d’augmenter de 8,5 % la probabilité d’une première visite prénatale avant la 13e semaine de la grossesse et de 18 % avant la 20e semaine. Le nombre de consultations prénatales a enregistré une hausse de 17 % ; le poids moyen des bébés à la naissance a augmenté et le taux de mortalité néonatale diminué.

Même si le concept de financement basé sur les résultats n’est certes pas la panacée, cette approche bénéficie d’un intérêt croissant de la part des pays et de leurs partenaires de développement car elle permet de renforcer les systèmes sanitaires, de motiver les personnels, de promouvoir les systèmes d’information, de renforcer les capacités locales de gestion et fourniture des services sanitaires et, au bout du compte, d’améliorer les résultats du développement dans le secteur de la santé.


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