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La transparence compte

03 mars 2011


3 mars 2011

Lors de la cinquième conférence mondiale de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (EITI), qui s’est tenue à Paris les 2 et 3 mars dernier, dirigeants, entreprises et organisations de la société civile ont examiné les progrès accomplis dans différents pays et fixé le cap pour l’avenir : « la transparence compte », comme le soulignait le titre donné à la conférence, et l’impact de l’EITI doit être encore plus tangible.

Près de 3,5 milliards d’individus vivent dans des pays riches en hydrocarbures et en ressources minières, mais la plupart sont victimes de la mauvaise gouvernance, source de pauvreté, de corruption et de conflits. Depuis dix ans cependant, grâce à l’Initiative pour la transparence des industries extractives (EITI), la situation évolue.

Dans 35 pays riches en ressources, les pouvoirs publics ainsi que certaines des plus grandes compagnies pétrolières, gazières et minières se sont en effet engagés à rendre public, respectivement, ce qu’ils perçoivent et ce qu’elles paient. Les citoyens peuvent désormais connaître le montant des recettes que leur gouvernement tire des ressources naturelles de leur pays et lui demander des comptes.

Lancée en 2003, l’EITI a rapidement gagné du terrain pour devenir la norme internationale en la matière. En février 2011, cinq pays sont devenus « conformes » aux principes de l’Initiative, tandis que vingt autres avaient accompli des progrès significatifs en vue de la validation du processus (voir le tableau). Pour devenir « conforme », chaque pays doit avoir accompli une évaluation rigoureuse et indépendante de ses pratiques de divulgation et de notification.

À l’appui des efforts entrepris dans ces pays, un fonds fiduciaire multidonateurs (MDTF) administré par la Banque mondiale (secteur Pétrole, gaz naturel et mines) apporte des dons et une assistance technique pour aider à la mise en œuvre des principes de transparence des recettes et de responsabilité mais aussi au renforcement des capacités de la société civile. Les pays collaborent étroitement avec les équipes de la Banque mondiale et d’autres partenaires au développement.

Les bailleurs de fonds sont les suivants : Allemagne, Australie, Belgique, Canada, Commission européenne, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suisse.

Lors de la conférence, Mme Clare Short (ancienne secrétaire d’État britannique pour le développement international) a pris la succession de M. Peter Eigen (fondateur de Transparency International) à la présidence du Conseil d’administration de l’EITI.


« Lors de la conférence, Mme Clare Short (ancienne secrétaire d’État britannique pour le développement international) a pris la succession de M. Peter Eigen »

Fondateur de Transparency International

L’avenir de l’EITI

La délégation de la Banque mondiale, conduite par Mme Sri Mulyani Indrawati, directrice générale, était composée de Mme Obiageli Ezekwesili, vice-présidente pour la Région Afrique, de Hartwig Schafer, directeur des opérations et de la stratégie pour le développement durable et de Paulo de Sa, directeur sectoriel pour le pétrole, le gaz et les mines.

Dans son allocution liminaire, Mme Indrawati a insisté sur l’importance de la transparence car celle-ci permet aux parties prenantes de faire la lumière sur les problèmes de gestion des recettes, affirmant que cette transparence devait aussi se traduire par des gains tangibles pour les pays riches en ressources et l’ensemble de leurs citoyens.

La directrice générale a également mis en avant plusieurs impératifs : protéger les acquis du processus de l’EITI ; donner à la société civile les moyens de demander des comptes ; et prendre des dispositions plus audacieuses pour introduire d’autres réformes et renforcer la gestion des finances publiques tout au long de la chaîne de valeur. « La réussite de l’EITI se mesurera, à terme, à l’aune de sa contribution à la bonne gestion des ressources naturelles et au fait qu’elle profite à tous les citoyens, aujourd’hui et pour les générations futures », a-t-elle affirmé. « Nous devons faire en sorte qu’elle ait un impact réel et avéré sur le terrain ».

Impact sur le terrain

Dans plusieurs pays, les rapports de l’EITI ont permis de mettre au jour un certain nombre d’irrégularités financières et d’établir alors une feuille de route claire pour des réformes approfondies des secteurs pétrolier, gazier et minier. En voici trois exemples :

  • Au Nigéria, l’écart entre les sommes perçues et les sommes versées par l’industrie pétrolière a été réduit de 250 à 16 millions de dollars. Cela a ouvert la voie à des réformes sectorielles pour améliorer la gestion des finances publiques, renforcer les organismes publics chargés de réguler les industries extractives et consolider les capacités et la participation de la société civile.
  • Au Libéria, l’EITI fait partie intégrante du plan national de développement du secteur minier. Les autorités y ont aussi inclus le secteur forestier et ont contribué à la mise en œuvre de l’EITI en Sierra Leone, pays voisin du Libéria. Dans l’indice de perception de la corruption (IPC) mesuré par Transparency International, le Libéria est passé de la 137e place (sur 158 pays) en 2005 à la 97e place (sur 180 pays) en 2009. Cette évolution est propice aux investissements dans les industries extractives.
  • En Mongolie, la loi nationale de 2006 sur les mines a progressivement imposé aux entreprises et aux institutions publiques de rendre compte des versements et des recettes, conformément aux principes de l’EITI. Le rapprochement opéré à l’issue d’un premier audit a permis de ramener l’écart de 25 milliards de tugriks en février 2008 à 775 millions en novembre 2009. Le gouvernement s’est engagé à améliorer l’ensemble de la chaîne de valeur des industries extractives, des appels d’offres à la mise en œuvre de programmes de développement durable. Un texte de loi et une stratégie EITI pour la période 2010-2014 sont en cours de préparation, et les capacités et la participation des organisations de la société civile ont été renforcées.

« L’expérience de ces deux dernières années montre bien que l’existence d’un leadership fort et déterminé peut véritablement changer les choses. On peut gagner la confiance des citoyens des pays riches en ressources ; on peut gagner la confiance du secteur privé ; et on peut apporter des améliorations concrètes en termes de bien-être économique » a déclaré Mme Obiageli Ezekwesili. « Toutes les parties prenantes – pouvoirs publics, secteur privé, société civile et organisations internationales – doivent redoubler d’efforts pour donner des résultats plus rapides et plus tangibles ».

ADHÉRER À L’EITI, c’est :

  • envoyer un signal clair à toutes les parties prenantes quant à l’engagement d’un pays en faveur de la transparence
  • adopter une norme mondiale perçue comme un moyen concret de réduire le risque pour les investisseurs
  • instaurer un cadre systématique de collaboration entre les pouvoirs publics, les entreprises et la société civile
  • réunir en un seul endroit les informations sur les recettes et les flux financiers des industries extractives (plus de 50 rapports EITI publiés à ce jour)
  • offrir une plateforme pour les réformes de la gouvernance dans le secteur et une meilleure gestion des finances publiques – au-delà même de l’EITI
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