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Double défi pour les femmes rurales élues au Mali : gouverner et être prises en compte

08 mars 2010


BAMAKO, 8 mars 2010—Au Mali, les femmes rurales désireuses de se lancer dans la politique doivent surmonter deux obstacles : leur condition de femme tout court et leur situation de femme rurale. Plus qu’une course d’obstacles, c’est un vrai parcours du combattant.

Quelques 25 élues rurales de 33 communes du cercle de Kita (180 km de Bamako) ont discuté de ce sujet récemment dans le cadre d’un atelier, financé par le Fonds pour la Société civile de la Banque mondiale.

Certes, un atelier d’une journée ne pouvait épuiser ce grand débat de société, à savoir si une femme élue est comme un homme élu. Au fil des débats, il était évident que les problèmes des élus ne changent pas en fonction de leur sexe. En effet les discussions ont porté sur le non paiement des taxes et impôts dans leurs communes respectives, la question de l’état civil dont la gestion est aujourd’hui plus difficile parce que ses frais d’établissements sont partagés entre la commune et les cercles, la question de la santé, du droit des enfants, de la scolarisation des filles et de l’éducation en général.

« C’est un travail d’intérêt national que de former les femmes afin qu’elles puissant être à la hauteur de leurs possibilités dans la gestion de la chose publique », a indiqué Mamadou Sangaré, secrétaire permanent de la section d’un parti politique à Kita.

Echanges d’expériences

S’il y une qui a bien compris cette nécessité de formation, c’est Diogan Sakiliba. Cette conseillère municipale est venue d’une localité éloignée et d’accès difficile, surtout en cette période d’hivernage. Elue pour la première fois lors des élections municipales d’avril 2009, elle estime que cette formation peut lui donner des notions de gestion communale, à travers les thèmes de la décentralisation au Mali, le leadership féminin et la prise de décision, qui étaient les modules de l’atelier.

Parfois, les discussions ont pris des allures de consultations juridiques. « Certains de nos maires se disent qu’ils sont élus pour un mandat de cinq ans pendant lesquels ils peuvent se passer de conseillers. Ils n’en font qu’à leur tête et disent ne pas se soucier d’un second mandat. Quelles est la procédure détaillée pour mettre fin à ce type de dérive », déplore une participante.

Leadership féminin contre discipline de parti

De l’avis de toutes les participantes, la difficulté d’un bon positionnement des femmes dans les instances communales est la conséquence directe de leur mauvaise place sur les listes électorales. En effet, rarement les femmes sont des têtes de liste. Elles sont toujours reléguées en bas de liste. Or, le scrutin est à la proportionnelle qui fait que les mieux placés sont élus, au prorata du nombre de voix obtenues.

La discipline de parti, en défaveur des femmes, mais aussi les coups bas, les insinuations, les intimidations et même les menaces à peine voilées ont fait leurs effets pour les écarter ou les dissuader de viser plus haut. C’est l’exemple de cette femme handicapée motrice à qui les hommes de son parti auraient lancé : « quelqu’un qui ne tient pas sur ses pieds ne peut être maire ». Une autre s’est laissé dire qu’ « une femme tête de liste n’a pas longue vie ».

Le bureau de la Banque mondiale au Mali a offert un peu plus de 12 millions F CFA (25.000 dollars américains) de subvention à neuf ONG nationales, dans le cadre de la cinquième édition de son Fonds pour la Société civile, anciennement appelé Programme de petites subventions (en anglais, Small Grants Program).

L’atelier de formation des femmes élues du cercle de Kita a été organisé par un des bénéficiaires de ce programme, le Groupe interdisciplinaire d’assistance pour le développement des communautés (GRIDAC).

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