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publication 19 juillet 2021

La République centrafricaine : Investir dans le capital humain pour préserver l'avenir

Dernier numéro: 
  • July 2021
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LES POINTS MARQUANTS

  • L’économie de la République centrafricaine (RCA) se trouve à un tournant critique, sous l’effet combiné de la COVID-19 et du regain d'insécurité lié aux conflits électoraux.
  • Le rapport met en évidence les axes d’action prioritaires pour réduire les déséquilibres macroéconomiques et étayer une reprise soutenue. 
  • Les investissements dans le capital humain sont une priorité absolue pour améliorer les niveaux de vie de la population, créer des emplois de meilleure qualité, lutter contre les facteurs de fragilité et doper la croissance économique.

1. Pour la cinquième année consécutive, l'activité économique a encore ralenti en 2020. 

À la suite de la pandémie de COVID-19, la croissance du PIB réel est ressortie à 0,8 % en 2020, soit son niveau le plus bas au cours des cinq dernières années. Du côté de la demande, la consommation privée s'est contractée en 2020 en raison de la baisse des revenus des ménages imputable à la pandémie. Du côté de l'offre, en revanche, la dynamique positive du secteur agricole a évité à l'économie centrafricaine de plonger dans la récession, tandis que les secteurs de la foresterie et des télécommunications ont mieux résisté que prévu. Malgré les pressions inflationnistes dues aux perturbations des chaînes d'approvisionnement, l'inflation est tombée à 2,3 % en 2021 (en glissement annuel), un taux inférieur au critère de convergence régionale. La situation budgétaire s'est détériorée, mais le niveau d’endettement public a encore diminué pour s'établir à 44,1 % du PIB en 2020, grâce à des annulations et rééchelonnements de dette. La RCA reste toutefois exposée à un risque élevé de surendettement en raison principalement du faible niveau de mobilisation de ses ressources intérieures et de ses revenus d'exportation. Le déficit du compte courant s'est creusé à 8,7 % du PIB en 2020, contre 4,8 % en 2019. En cause, la faiblesse de la demande extérieure et des transferts privés, ainsi qu’un déficit accru de la balance commerciale, qui s’explique, dans le contexte de la pandémie, par une baisse des exportations de marchandises et une augmentation des importations liée aux investissements financés par des bailleurs de fonds. 

Figure 1. Taux de croissance annuelle du PIB réel et taux de pauvreté

 

2. Les perspectives économiques sont positives, mais très fragiles

Le PIB réel devrait reculer de 0,6 % en 2021, soit un niveau inférieur de 5,8 points de pourcentage par rapport aux projections antérieures à la pandémie et aux élections. À la suite de la COVID-19 et du regain d'insécurité, la RCA risque de perdre quatre années de progression économique : selon les estimations de la Banque mondiale, le PIB par habitant en 2023 devrait rester au même niveau qu'en 2019. Sous réserve d’un retour de la stabilité et de la sécurité, la croissance économique devrait se redresser à moyen terme, à la faveur d’une hausse des niveaux de production agricole et industrielle du côté de l’offre et de la bonne tenue de la consommation privée côté demande. Plus de 3,5 millions d'habitants devraient toutefois continuer à vivre dans l'extrême pauvreté en 2022-2024, tandis que l'insécurité alimentaire et l'accès limité aux services publics de base, en particulier dans les zones reculées, demeureront des préoccupations majeures.

3. La RCA doit investir dans le capital humain pour préserver son avenir

Le capital humain joue un rôle essentiel dans l'avènement d’une croissance durable et dans la réduction de la pauvreté. Or, la RCA est confrontée dans ce domaine à des carences importantes et des besoins immenses. Selon l’indice de capital humain, les enfants nés en 2020 ne réaliseront que 29 % de leur potentiel productif à l’âge adulte. La RCA comptait 0,8 million d’enfants en âge d’être scolarisés dans le primaire en 1990, et ce chiffre est appelé à doubler pour atteindre 1,8 million en 2050. D’où la nécessité d'agir maintenant et d’investir dans ce capital humain, avec à la clé plus d’opportunités pour les jeunes, mais aussi des perspectives considérables pour des améliorations durables sur le plan de la paix, de la productivité et du développement. En outre, alors que le pays n’a guère tiré parti jusqu’à présent de l’augmentation rapide de sa population en âge de travailler, il doit aujourd’hui agir pour transformer en « dividende » ce qui constitue encore une « malédiction » démographique.

Figure 2. Les résultats de la RCA en matière de capital humain sont très insuffisants
Source : Calculs des auteurs à partir des données de la Banque mondiale.

 

4. La RCA doit développer son capital humain pour préserver l’avenir, stimuler la croissance économique et améliorer le niveau de vie de sa population

Dans les circonstances actuelles, la croissance du capital humain devrait chuter de 0,6 % en 2020 à 0,15 % en 2050, en raison d'un sous-investissement chronique dans les secteurs sociaux. Pour inverser cette tendance, il faudrait des réformes vigoureuses et des interventions multisectorielles coordonnées dans les secteurs sociaux, ce qui implique de :  

i. Relever les défis du développement de la petite enfance afin de jeter les bases nécessaires à la prospérité et à la résilience des adultes de demain, mais aussi à la croissance économique et à la compétitivité du pays ; 

ii. Favoriser l’autonomie des femmes et des filles afin d’accélérer la transition démographique, de lutter contre les mariages et les grossesses précoces, d’accroître l'accès à la planification familiale et de réduire la mortalité infantile ; 

iii. Mettre l’accent sur une prestation de services efficace et inclusive afin de réduire les disparités régionales et de désamorcer les motifs de mécontentement nés des crises passées ;  

iv. Limiter les effets néfastes des conflits récurrents sur les acquis scolaires des enfants grâce à des mesures adaptées visant à atténuer et à remédier à terme aux pertes d'apprentissage causées par la fermeture des écoles en période de crise ;  

v. Renforcer la gouvernance et les institutions dans les secteurs liés au capital humain tout en améliorant la coordination entre les partenaires techniques et financiers ;  

v. Mobiliser les recettes intérieures afin d’accroître la marge de manœuvre budgétaire et de permettre au gouvernement d’investir dans le capital humain.