CONAKRY, le 21 mai 2019―Perchée à 1 200 mètres d’altitude, Dalaba est la ville la plus haute de Guinée. La fraîcheur de ses températures et ses forêts de pins lui valent le surnom de « Suisse de l’Afrique de l’Ouest ». Elle a autrefois accueilli un sanatorium et séduit la célèbre chanteuse sud-africaine Miriam Makeba, qui y a passé une partie de sa vie. La ville est également connue pour ses fraises et ses jardins baptisés en l’honneur d’Auguste Chevalier, un botaniste français qui, au début du 20e siècle, y a acclimaté avec succès plusieurs variétés de pin.
Son statut de destination touristique prisée contraste fortement avec la réalité : les infrastructures sont en piètre état et l’accès aux services sociaux de base limité, notamment en matière de santé. D’autant que le système de santé de la Guinée ne s’est pas encore totalement remis des effets de la crise Ebola, en 2013. Avant la survenue de l’épidémie, les dépenses de santé ne représentaient que 2 à 3 % du total des dépenses publiques— une part que le gouvernement a récemment portée à 8 %.
À son arrivée à Koba, un village de la préfecture de Dalaba, il y a six ans, pour y diriger le dispensaire, le docteur Mabetty Camara avait été frappée par un phénomène singulier : « J’ai été consternée de voir que les femmes enceintes ne venaient pas au dispensaire pour les visites prénatales et les accouchements. En tant que femme et mère, cette situation me paraissait très grave. En tant que médecin et praticien, j’étais extrêmement préoccupée par les risques que ces femmes encouraient », explique-t-elle.
Les indicateurs de santé maternelle et infantile dans les zones rurales de la Guinée sont particulièrement inquiétants : seules 40 % des femmes effectuent au moins quatre visites prénatales pendant leur grossesse, contre 71 % en milieu urbain. Cette faible fréquentation rime avec un nombre peu élevé d’accouchements dans des centres de santé. À Mamou par exemple, le taux est de 42 %, à comparer aux 96 % enregistrés à Conakry, la capitale du pays.
Mabetty Camara a fini par comprendre pourquoi : le centre étant ouvert aux hommes comme aux femmes, celles-ci refusaient d’y accoucher. Financé par la Banque mondiale à travers l’Association internationale de développement (IDA), le projet de riposte à l’épidémie Ebola a pris en compte ce rejet et entrepris la rénovation et l’équipement d’une nouvelle maternité à Koba.