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Édifier un avenir durable : la triple mission des villes

19 avril 2017




Il y a vingt ans, Fatma et son mari Peter ont quitté leur village tanzanien pour Dar-es-Salaam, la ville la plus peuplée du pays. Parce qu’il souhaitait s’installer à proximité des emplois et faute de moyens financiers, le couple s’est retrouvé dans le plus grand bidonville de la ville, quasiment sans accès aux services de base. Ils vivent au milieu des déchets jetés dans les rues et n’ont que de l’eau insalubre pour cuisiner. Malgré tout, le fait de vivre en ville leur donne le sentiment de pouvoir saisir les opportunités et d’assurer ainsi un avenir meilleur à leurs six enfants.

Comme tous les pauvres urbains — environ 1 milliard de personnes dans le monde — Fatma et Peter (a) sont condamnés à vivre dans des habitats informels. La plupart ont rejoint les villes avec leurs familles dans l’espoir de décrocher un emploi digne de ce nom et d’améliorer leur niveau de vie. Mais l’urbanisation effrénée accroît les pressions qui pèsent sur les villes, liées entre autres au ralentissement de la productivité mondiale, à l’aggravation des risques climatiques et de catastrophes et au vieillissement rapide de la population. Tout cela complique singulièrement la lutte contre la pauvreté et la croissance économique. Pour Fatma, Peter et des milliards d’autres citadins comme eux, l’avenir devient de plus en plus incertain.

Dans ce contexte, les pays doivent de toute urgence trouver de nouvelles sources de croissance pour mettre fin à l’extrême pauvreté et promouvoir une prospérité partagée. Produisant plus de 80 % du PIB mondial et abritant plus de la moitié de la population actuelle, les villes doivent prendre leurs responsabilités et assumer un rôle moteur face à ce défi grandissant du développement.


« L’urbanisation est source d’énormes défis mais également d’incroyables opportunités, Nous devons rassembler les gouvernements, les organisations internationales, la société civile et le secteur privé pour planifier, connecter et financer les villes, afin d’inventer un développement urbain durable et pérenne. »
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Ede Ijjasz-Vasquez

directeur principal du pôle mondial d’expertise en Développement social, urbain et rural, et résilience de la Banque mondiale

Au niveau des Nations Unies, le 11e Objectif de développement durable et le Nouveau programme pour les villes (a) ont d’ailleurs articulé la vision de villes ouvertes à tous, sûres, résilientes et durables. C’est dans ce but que la Banque mondiale travaille avec des pays du monde entier pour veiller à ce que les villes et les zones métropolitaines excellent dans leurs trois missions majeures, au service des habitants et des entreprises : servir d’intermédiaires, être une force motrice et offrir un ancrage.

[Le 21 avril, sur Banque mondiale Live, retrouvez un panel de dirigeants et de responsables publics nationaux et municipaux du monde entier pour une discussion autour de l’avenir des villes.]

Que recouvrent ces missions ? Quelles mesures les villes peuvent-elles prendre pour garantir une croissance durable et une trajectoire assurée vers un avenir solidaire et résilient ? Un certain nombre d’idées ambitieuses émergent déjà pour inspirer et orienter les initiatives de la communauté internationale visant à promouvoir une urbanisation durable ne laissant personne au bord du chemin :

  • La ville, un intermédiaire entre les individus et les opportunités

En Afrique subsaharienne, les villes sont parfois déconnectées, surpeuplées et trop chères. Selon un rapport de la Banque mondiale intitulé Ouvrir les villes africaines au monde, elles doivent privilégier une gestion foncière durable pour améliorer les conditions de vie et rapprocher les individus des emplois. Les auteurs prônent pour cela une stratégie en deux axes : 1) régulariser les marchés fonciers, clarifier les droits de propriété et instituer des politiques efficaces d’aménagement urbain ; et 2) investir tôt et de manière coordonnée dans les infrastructures.

De même, dans des régions à l’urbanisation galopante comme l’Asie de l’Est et l’Asie du Sud (a), urbanistes et décideurs doivent adopter des politiques proactives pour fournir des terrains, des logements et des services tout en améliorant l’habitabilité et la mobilité des nouveaux citadins. Ce constat vaut également pour les villes du Moyen-Orient et d’Afrique, qui accueillent plus de la moitié des personnes déplacées de force dans le monde.

  • La ville, une force motrice pour une croissance économique sans exclus

Trois villes sur quatre parmi les 750 analysées dans un rapport consacré à la compétitivité des villes ont connu une croissance plus rapide que leur économie nationale depuis le début des années 2000. Mais dans les pays en développement, un citadin sur trois vit toujours dans un bidonville, souvent dans un climat de criminalité et de violence. Dans le but de veiller à ce que les villes de demain offrent des opportunités pour tous, la Banque mondiale plaide pour des villes ouvertes à tous, à travers une approche articulée autour de trois leviers à actionner concomitamment : l’inclusion spatiale, l’inclusion sociale et l’inclusion économique. Sachant qu’en investissant dans des institutions locales responsables et en donnant plus de pouvoir aux communautés urbaines, les villes pourraient également devenir plus sûres.

  • La ville, un ancrage pour pérenniser les acquis du développement malgré l’aggravation des risques climatiques et de catastrophes

Faute d’investissements suffisants dans la résilience des villes, les catastrophes naturelles pourraient coûter 314 milliards de dollars par an aux municipalités à l’horizon 2030, le changement climatique risquant de faire basculer jusqu’à 77 millions de citadins supplémentaires dans la pauvreté. Consciente de la nécessité d’augmenter les moyens financiers consacrés à la résilience des zones urbaines, la Banque mondiale entend, à travers son programme pour des villes résilientes (a) et avec le soutien de la Facilité mondiale pour la prévention des risques de catastrophes et le relèvement (GFDRR) (a), aider les villes d’Afrique et d’Asie à s’adapter à l’évolution des paramètres, affronter les chocs et préserver leurs fonctions essentielles, grâce notamment à des financements et à l’application d’outils de diagnostic tels que CityStrength (a).

« Les 10-15 années qui viennent seront particulièrement critiques pour les villes », analyse Sameh Wahba, directeur du développement urbain à la Banque mondiale. « Les décisions d’aménagement et d’investissement qui seront prises par les autorités locales définiront les trajectoires d’évolution pour les décennies à venir, mais aussi les programmes de lutte contre le changement climatique et les actions en faveur de l’inclusion sociale. »

Il ne s’agit là que de quelques exemples de pistes à suivre pour forger l’avenir des villes. Faites-nous part de vos suggestions pour offrir un avenir durable à votre ville en utilisant le hashtag #Cities4Dev sur Twitter et en suivant notre discussion en direct le 21 avril prochain.

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