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Au Yémen, les organisations de la société civile sont vouées à devenir des partenaires clés du développement

24 juin 2014


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Scott Wallace

LES POINTS MARQUANTS
  • Les milliers d’organisations de la société civile nées dans le sillage de la révolution pourraient jouer un rôle important dans le développement du Yémen.
  • La Banque mondiale a organisé une conférence destinée à jeter des passerelles entre représentants de l’État et un large éventail d’organisations de la société civile.
  • Sur la base des enseignements tirés de cette conférence, les ministères réfléchissent à différents plans pour établir des partenariats avec la société civile.

Sur les milliers de nouvelles organisations gouvernementales (ONG) et organisations de la société civile (OSC) que compte le Yémen, beaucoup pourraient jouer un rôle essentiel dans la mise en œuvre des politiques publiques en faveur du développement local au Yémen.

Les autorités s’emploient à instaurer un système de coordination des activités des ONG et OSC depuis la tenue, en mars dernier à Sanaa, de la conférence « pour un partenariat autour des connaissances sur le développement » qui a réuni des membres du gouvernement et des OSC des différents gouvernorats du pays.

Organisée dans la capitale yéménite par la Banque mondiale, cette rencontre était inédite : pour la première fois, ces acteurs multiples ont abordé ensemble les partenariats possibles entre les pouvoirs publics et les OSC. Il s’agissait, pour celles-ci notamment, d’ouvrir la voie à une collaboration accrue avec les différents services et ministères du gouvernement et d’occuper ainsi une place plus grande dans le développement de leur pays. Comme l’a déclaré Sameera Balah au nom de l’organisation My Right, il est indispensable que les autorités impliquent les OSC dans « l’élaboration de stratégies qui garantissent leur participation. »

Du côté des pouvoirs publics, la conférence a bénéficié de la présence de hauts membres du gouvernement, dont le ministre des Affaires sociales et du Travail et le ministre du Plan et de la Coopération internationale.

Ce dernier, M. Mohammed Al-Saadi, a souligné que le gouvernement du Yémen était convaincu de l’importance du rôle des ONG, en qualifiant celles-ci de « partenaires essentiels, solides et indépendants » s’agissant de la promotion et du renforcement du développement, de l’amélioration des services publics et de la capacité à rendre les gouvernants « davantage à l’écoute des besoins et des aspirations des citoyens. »

Après les allocutions ministérielles, des représentants gouvernementaux et de la société civile de plusieurs pays (Indonésie, Inde, Ghana, Territoires palestiniens et Brésil) ont témoigné de leur propre expérience de partenariats fructueux de même que des difficultés rencontrées. La première journée s’est achevée sur une table ronde entre différents intervenants d’OSC internationales qui ont mis l’accent sur les enseignements tirés en fonction des différents pays concernés.

Le succès des partenariats noués entre État et OSC dans d’autres régions du monde a montré à de nombreux participants qu’indépendamment du degré de complexité des enjeux de développement, cette coopération est toujours la bienvenue. « Compte tenu du contexte au Yémen et de la réalité de notre quotidien, nous ne nous attendions pas à de tels résultats dans les autres pays », a observé Refatt Omer Fakirah de la fondation Al-Zahra.



« Ce dont nous avons besoin, c’est d’une collaboration totale, pas à moitié. »


Les deuxième et troisième jours ont été les principaux temps forts de la conférence : les participants se sont répartis dans cinq groupes de travail thématiques dans lesquels représentants du gouvernement et d’OSC ont discuté de questions spécifiques. L’objectif de ce travail était de mettre en évidence les champs où leur action pouvait être complémentaire ou au contraire se chevauchait, et de discuter des pistes possibles pour une meilleure collaboration. Les OSC ont ainsi pu rendre compte des difficultés qu’elles rencontrent quotidiennement dans le cadre de leurs activités. Les représentants du gouvernement ont quant à eux pu exprimer leurs inquiétudes et les contraintes auxquelles ils se heurtent.

Dans le cadre d’échanges individuels qui constituaient une première pour eux, certains participants ont ainsi été en mesure d’exposer leurs préoccupations réciproques. Parmi celles-ci, notamment, on note le manque de communication et de coordination entre diverses agences gouvernementales et les OSC, le non-respect de certaines lois et réglementations et l’absence d’un code de conduite standard pour les OSC.

Les participants ont également évoqué la pertinence de privilégier la coopération dans les secteurs qui demeurent hors de portée de l’État. Selon Sameera Balah, le gouvernement devrait « soutenir tout particulièrement les partenariats dans les zones isolées et rurales, auxquelles l’État ne peut avoir accès, malgré la vigueur des efforts qu’il déploie ».

Les groupes de travail ont permis de mettre un avant un certain nombre de sujets. Un large consensus s’est ainsi dégagé autour de secteurs clés privilégiés par les autorités et les OSC, comme la santé (notamment infantile et maternelle), l’éducation (élaboration d’un programme scolaire, éducation dans les zones rurales et éducation des filles), ainsi que le droit et l’émancipation des femmes.

Mohammed Al-Hawri, ministre adjoint du Plan et de la Coopération internationale, a indiqué que le gouvernement mettrait sur pied des directives pour les secteurs de la santé, de l’éducation et des droits de l’homme, afin de canaliser les projets et les activités des OSC.

Du côté des pouvoirs publics comme de celui des OSC, tous se sont déclarés en faveur d’une transparence et d’une responsabilisation accrues. Ces dernières ont proposé d’améliorer leur propre gouvernance afin de devenir des partenaires de développement crédibles pour le gouvernement et de contribuer à la création et au renforcement des institutions dans l’optique d’une plus grande prospérité du pays.

« Ce dont nous avons besoin, c’est d’une collaboration totale, pas à moitié », a précisé Taha Yaseen Abdo Ahmed, représentant du Yemeni Polling Center.

Les OSC yéménites se sont dites vivement intéressées par une collaboration avec les pouvoirs publics qui ne se limiterait pas à la phase de planification des projets, mais engloberait la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation.

Au terme de la conférence, les deux parties ont convenu des points suivants :

  • S’appuyer sur les conclusions des groupes de travail et des discussions avec le ministère du Plan et de la Coopération internationale, pour déterminer les secteurs prioritaires où des discussions plus poussées sont nécessaires.
  • Établir une plateforme en ligne pour chaque secteur afin de permettre aux OSC de se faire connaître. Les OSC s’inscriront aux sessions pour lesquelles elles interviennent déjà ou souhaitent intervenir. Ces sessions techniques seront l’occasion de définir la nature du partenariat et les responsabilités de chacun.
  • Les ministères se chargeront du travail préparatoire en vue des discussions techniques. Ces séries de dialogue propres à chaque secteur débuteront après le ramadan, qui, cette année, commencera fin juin pour s’achever fin juillet. Elles étaieront l’élaboration de plans sectoriels spécifiques afin d’identifier des activités concrètes entre les ministères et les OSC opérant dans un même secteur.


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