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Viet Nam : des petits agriculteurs s’unissent et innovent pour sortir de la pauvreté

12 novembre 2013


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Comment quelques cochons ont transformé la vie d’une famille démunie au Viet Nam. Cinquante mille familles dans le besoin devraient bénéficier d’un projet de lutte contre la pauvreté dans le pays.


LES POINTS MARQUANTS
  • Au Viet Nam, des agriculteurs ont formé plus de 6 000 groupes d’intérêt commun dans le cadre d’un projet soutenu par la Banque mondiale.
  • Le projet a également permis de réhabiliter 3 800 km de voies et de construire 1 500 mètres de ponts afin d’améliorer l’accès de ces agriculteurs au marché.
  • Depuis la création de ces groupes, le revenu des agriculteurs a considérablement augmenté.

Lo Thi Tiep, 28 ans, vit avec son mari et ses deux enfants dans une maison en terre au toit de palmes à Bung Lao, une commune de la province de Dien Bien, au Viet Nam. La population de la commune est notamment composée de Tày, importante minorité ethnique du pays. Plus de 70 % des ménages y vivent en dessous du seuil de pauvreté, soit un pourcentage très élevé par rapport à la moyenne nationale, qui est de 14,2 %.

La famille de Tiep possède une petite parcelle de terrain. Tous les jours, elle quitte sa maison à l’aube pour travailler dans la rizière, mais la productivité est faible car il n’y a pas suffisamment d’eau pour irriguer la plantation. Pour joindre les deux bouts et pouvoir acheter du riz durant la période de soudure, Tiep travaille comme ouvrière agricole saisonnière dans une plantation de café voisine, tandis que son mari est maçon. Malgré tous leurs efforts, ils gagnent péniblement 800 000 dongs vietnamiens par mois, soit l’équivalent d’à peine 40 dollars.

Depuis 2012, cependant, Tiep fait partie d’un groupe de femmes de la commune qui se sont lancées dans l’élevage de porcs pour compléter leurs revenus, ce qui lui a permis d’améliorer considérablement le quotidien du ménage.

« Notre vie était très difficile », témoigne-t-elle. « Maintenant, grâce aux cochons, nous avons de l’argent pour acheter des vêtements aux enfants et les envoyer à l’école. »

Pour aider ces femmes à démarrer leur activité, un projet soutenu par la Banque mondiale leur a fourni deux porcelets chacune, le fourrage initial ainsi qu’une formation sur l’hygiène, l’alimentation des bêtes et la prévention des maladies. Le deuxième projet de lutte contre la pauvreté dans les montagnes du Nord soutient les minorités ethniques rurales et démunies des zones les plus défavorisées du nord-ouest du Viet Nam.

Dans son groupe, Tiep est reconnue comme l’éleveuse la plus douée. Un an seulement après le début du projet, elle possède désormais cinq « beaux cochons » qui peuvent lui rapporter 12 millions de dongs (presque 600 dollars) de bénéfices en cinq mois, soit trois fois plus que le revenu de son ménage avant qu’elle ne rejoigne le groupe.

« Je suis très fière de mon élevage », confie Tiep tout en nourrissant ses bêtes. « Les cochons sont pleins de vie, ont le poil luisant et grandissent bien. »

Les membres du groupe se réunissent tous les mois pour visiter les porcheries et partager leur expérience. Les éleveuses font également la promotion de leurs bêtes en posant des affiches sur la route principale qu’empruntent régulièrement les négociants. Elles s’entraident en veillant à ne pas vendre leurs cochons en dessous du prix du marché.


« Notre vie était très difficile. Maintenant, grâce aux cochons, nous avons de l’argent pour acheter des vêtements aux enfants et les envoyer à l’école.  »
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Lo Thi Tiep

Agricultrice, la province de Dien Bien, Viet Nam

Des revenus multipliés par huit

Dans une autre province du Nord-Ouest, la province de Lao Cai, des agriculteurs du district de Muong Khuong sont en train de récolter les fruits de leur association au sein d’un groupe d’action collective. Lorsqu’ils ont pris conscience des bénéfices qu’ils pourraient trier de la culture du piment, ils ont décidé de s’associer pour augmenter leurs récoltes et les vendre plus efficacement.

C’est le même projet qui leur a fourni les semences initiales et de l’engrais pour commencer à exploiter une parcelle de 2 000 mètres carrés chacun. On les a également formés à la taille et à d’autres techniques afin de les aider à augmenter la productivité de leurs plantations.

Le groupe a réalisé sa première récolte de piments en juillet 2012 et, six mois plus tard, chaque agriculteur avait gagné entre 30 et 40 millions de dongs (soit 1 500 à 2 000 dollars). Comparé aux revenus qu’ils tiraient de l’exploitation du maïs sur les mêmes parcelles, le montant a presque été multiplié par huit.

« Je me suis rendu compte que de nombreuses familles pauvres et très endettées étaient capables de rembourser leurs dettes grâce aux bénéfices tirés de la culture du piment », raconte Thao Thi Lien, qui a rejoint le groupe récemment. « Le piment résiste mieux aux maladies et son prix est stable. »

Le groupe d’agriculteurs évite que les prix ne soient manipulés par les négociants grâce à un accord conclu avec la coopérative locale de Muong Khuong, qui transforme les piments et commercialise la pâte ainsi obtenue dans d’autres provinces du Viet Nam.

Mettre en relation les agriculteurs et les marchés

Les activités d’élevage porcin et de culture du piment illustrées ici ne sont que deux exemples parmi les 6 000 groupes d’intérêt commun créés autour de produits agricoles similaires dans six provinces du nord-ouest du Viet Nam grâce au soutien du projet. Plus de 50 000 ménages dans le besoin devraient pouvoir en profiter grâce à une augmentation de la productivité et des revenus.

Afin d’améliorer les échanges commerciaux et l’accès au marché pour les agriculteurs des zones reculées, le projet a également soutenu la remise en état et la modernisation de 3 800 kilomètres de voies et chemins de raccordement au réseau principal, ainsi que la construction de 1 500 mètres de ponts, entre autres types d’infrastructures.

À l’instar des autres éleveuses de son groupe, Tiep est convaincue que ses cochons constituent son meilleur plan d’épargne et qu’ils lui permettront de réaliser ses rêves.

« Je vais étendre la production à dix cochons », explique Tiep. « À ce stade, j’aurai suffisamment d’argent pour construire une nouvelle maison, et je pourrai sortir de la pauvreté. »


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