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Les acteurs du marché carbone appellent à une action rapide pour atténuer le changement climatique

03 juin 2011


LES POINTS MARQUANTS
  • Les milliers d'intervenants du marché carbone, réunis récemment en Espagne, ont appelé au développement des instruments financiers destinés à lutter contre le changement climatique.
  • La Banque vient de publier l'édition 2011 de son rapport État et tendances du marché du carbone.
  • Les pays émergents adoptent des mesures de riposte aux changements climatiques ; huit dons sont annoncés pour contribuer à la mise en œuvre d'instruments d'échange des émissions carbone.

Alors que l'évolution du climat continue de contrarier les efforts engagés dans le monde pour réduire la pauvreté, le marché du carbone commence à prendre une place importante dans l'action menée pour atténuer le changement climatique. Or, comme l’ont souligné les participants à Carbon Expo, la semaine dernière à Barcelone (Espagne), il faut mettre en place une gamme complète d'initiatives et d'instruments financiers pour pouvoir relever le défi croissant que représente le changement climatique.

Le rendez-vous a réuni plusieurs milliers d’experts du financement climatique et des technologies vertes, de décideurs et de professionnels des pays en développement. Ces derniers ont notamment plaidé en faveur du développement accéléré du marché carbone, par lequel les pays en développement bénéficient de transferts de capacités et de technologies vertes en mettant en œuvre des projets sobres en carbone donnant lieu à la délivrance de crédits d’émission.

De même, la secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), Christiana Figueres, a demandé aux gouvernements d'adresser des signaux forts aux marchés pour la période consécutive à 2012, qui marquera la fin de la première période d'engagement au titre du protocole de Kyoto.

Joëlle Chassard, responsable du service chargé de la finance carbone à la Banque mondiale, résume ainsi la teneur de la manifestation : « Nous sortons de cette semaine d'intenses discussions rassurés et enthousiastes quant à la perspective de voir les marchés du carbone tenir leur place dans la mosaïque des financements climatiques, notamment grâce à de nouvelles idées et initiatives qui devraient permettre à tous les pays d’utiliser les mécanismes de marché pour accélérer les efforts d’atténuation des changements climatiques à l'échelle mondiale. »

L’envoyé spécial de la Banque mondiale pour les changements climatiques Andrew Steer a rappelé aux participants les liens étroits entre changement climatique et développement : « Les changements climatiques mettent en péril tout ce que nous tentons d'accomplir. Nous sommes en retard sur l'action à mener, et les avancées du développement sont gravement menacées. »

Et d’avertir : « Mais un jour, et ce jour-là est proche, les citoyens vont exiger des actions plus vigoureuses face aux changements climatiques. Il est absolument essentiel que nous soyons prêts lorsque ce jour arrivera. »

Le panachage d'instruments financiers

L’édition 2011 de Carbon Expo a prolongé les débats bien au-delà des thèmes habituels du marché carbone pour aborder les possibilités de nouveaux mécanismes climatiques : instruments financiers, régimes nationaux de plafonnement et d'échange, plans d'action appropriés au niveau national, etc.

Les participants ont évoqué la nécessité de revoir les modèles d'atténuation des émissions, mis en œuvre jusqu’ici sur la base de projets individuels. Pour que les financements carbone puissent livrer leur plein potentiel, il est non seulement nécessaire d’accroître très considérablement les efforts d'atténuation mais aussi d’introduire et combiner des instruments financiers novateurs.

« Nous pourrons obtenir de meilleurs résultats en matière d'atténuation en combinant les instruments financiers », indique Mme Figueres. « Ce panachage constitue une expertise qui existe déjà dans le secteur financier, mais qui reste encore à appliquer au marché du carbone, où j'espère qu'elle sera introduite avec une créativité nouvelle et une approche fine de la gestion des risques. »

Au nombre des questions traitées figuraient également la réforme du Mécanisme pour un développement propre (MDP) et l'intégration effective dans les marchés du carbone des initiatives relatives aux forêts et à l'utilisation des sols — comme les projets de fixation du carbone par les sols et de restauration des terres dégradées. Selon les participants, il faudra normaliser les bases de référence, et lever les autres obstacles à la mise en œuvre des projets pour permettre au MDP de fonctionner efficacement.

Par ailleurs, le rapport annuel de la Banque mondiale sur le marché mondial du carbone, État et tendances du marché du carbone, également publié la semaine dernière, a montré que 2010 a marqué un tournant, avec un léger recul du marché à 142 milliards de dollars après cinq ans de solide croissance. Le MDP, qui est axé sur les pays en développement, a été particulièrement touché. Pour les auteurs du rapport, ce fléchissement s'explique de plusieurs façons, notamment par le manque de clarté sur la situation du marché après 2012, et l’absence de volonté politique en faveur de nouveaux régimes de plafonnement et d'échange carbone dans plusieurs pays développés.

Le monde n’attend pas

En dépit du manque de clarté quant à l'éventualité d'un accord climatique mondial, les pays émergents ont mis en place diverses initiatives nationales en rapport avec les changements climatiques. Le Partenariat pour le développement des marchés du carbone, la dernière initiative du service Finance carbone de la Banque, a été spécifiquement créé pour appuyer les innovations des pays en développement dans ce domaine. La semaine dernière, il a ainsi été annoncé que de premiers dons seraient accordés à huit pays émergents pour les aider à concevoir, puis à mettre en place des instruments de financement carbone afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

« Durant les deux derniers jours, près de 30 pays se sont réunis ici, à Barcelone, afin de discuter des nouvelles initiatives lancées dans les pays émergents pour mettre en place des instruments fondés sur le marché », souligne M. Steer. « Nous avons assisté à la présentation de projets remarquables de la part de la Chine, du Chili, du Costa Rica, de la Colombie, de l'Indonésie, du Mexique, de la Thaïlande ou encore de la Turquie. Avec le soutien du Partenariat, ces pays prennent les devants pour renforcer les capacités et jeter les bases d’un marché mondial du carbone. »

À la direction du service chargé des questions climatiques à l’Institut de la Banque mondiale, Neeraj Prasad conclut : « Nous avions espéré que Carbon Expo faciliterait les transactions et la mise en réseau et en relation, notamment entre pays développés et en développement, à la fois afin de soutenir les transferts de technologie et d’établir la feuille de route la plus efficace pour réduire les émissions et atténuer la pauvreté. »

« Ce que nous constatons, c'est qu'en dépit de l'incertitude qui pèse sur les prix à long terme, les acteurs du marché sont avides d'informations sur ce que réserve l'avenir, et nombre d'entre eux se tournent vers la Banque pour qu'elle leur fournisse des orientations et des indications quant à l'action à engager pour avancer. »


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